Une construction impossible pour cet abri kafkaïen, faits de matériaux devenus obsolètes à force de ponçage. Pas d’issue autre que l’aliénation dans ce vain et méticuleux geste d’enfermement.
F. L.
Dnsep 2015 – Félicitations
La démarche intuitive voire pulsionnelle de Florence Lattraye se matérialise par un large registre de pratiques traitant de l’aliénation. Plus précisément elle aborde dans une violence contenue les représentations du travail et du domestique et leurs atours les plus obsessionnels pour ramener au premier plan les angoisses qui s’y rattachent.Ses objets dysfonctionnels, la collection de bilboquets, les chutes d’atelier retravaillées, les planches de bois poncées jusqu’à leurs limites constituent à la fois un exutoire paradoxal et l’aveu de l’impossibilité d’un aboutissement.
Dans ses événements, le performeur joue son propre rôle et semble habiter l’exposition dans un rapport ambivalent avec le spectateur. Ici aussi c’est le corps comme matériau qui est poussé dans ses retranchements. Le sien, lorsqu’elle arpente inlassablement les pourtours d’une marre de boue à la manière de Nauman dans son atelier. Celui des autres, lorsqu’elle donne l’instruction à quelqu’un de monter une palissade qui par la nature de ses planches est vouée à systématiquement chuter.
C’est ainsi que le dessin d’un Maelström se relie à un parterre de verre brisé tandis qu’un carnaval de pacotille se joue dans un interstice.
Un certain chaos s’organise non sans ironie.
Benjamin Laugier
Une construction impossible pour cet abri kafkaïen, faits de matériaux devenus obsolètes à force de ponçage. Pas d’issue autre que l’aliénation dans ce vain et méticuleux geste d’enfermement.
F. L.
Une fenêtre ouverte, une personne debout sur le toit terrasse d’en face statique nous observe de son perchoir. Rien ne se passe, on détourne le regard et l’on continue notre conversation, jusqu’à ce qu’un écho se fasse entendre…
La performeuse, avec un subtil différé, cite les visiteurs. Avec l’aide d’un complice lui transmettant discrètement des phrases prélevées dans les conversations qui ont lieu dans l’espace d’exposition.
F. L.
C’est en réinventant le spectre fonctionnel de certains objets que mes interventions révèlent des motifs psychologiques solidement ancrés dans l’inconscient collectif. Ils sont postés comme témoins d’une fuite de l’être et de l’altération évidente de sa condition dans nos sociétés.
L’obsession de la propreté est souvent le leurre d’une âme brouillon et Manufrance est un nom chargé d’histoire : deux aspects non négligés lors de l’élaboration de cette pièce. En effet l’entreprise fut un modèle d’organisation et de production pour son époque mais aussi le théâtre de conflits sociaux de grande ampleur jusqu’à ce qu’elle succombe aux crises financières des années 1970.
Cet objet figé dans le temps est posté comme mémoire de ces histoires personnelles et collectives. Le tapis est fendu d’une ligne nette qui annonce le début d’une longue chorégraphie maniaque à moins peut-être qu’il ne demeure immobile pour l’éternité. Enfin, par ce geste d’aspiration, la pièce retrouve sa matière d’origine et une nouvelle boucle se forme.
F. L.
Un homme seul essaye de faire son trou. Il creuse et creuse encore. La terre glisse inlassablement sur la paroi de la structure pour retomber de nouveau à ses pieds. Il pelte sans relâche ne semblant pas comprendre l’absurdité de sa condition et la répétition de son geste.
F. L.
Des confettis grossièrement découpés criblent le sol. Un à un ils tombent par intervalles plus ou moins réguliers et si l’on tend bien l’oreille l’on peut entendre la respiration de cette fabrique fatiguée. À travers l’histoire du confetti, force est de constater que l’autorité s’étend même là où elle ne devrait pas avoir sa place : innocent phanère de l’exaltation populaire, son usage fut réglementé et parfois même interdit lors de certaines festivités qu’elles soient carnavalesques (ou pas d’ailleurs).
F. L.
Le bilboquet un jeu d’oisiveté et d’agilité par essence. Ici c’est une invitation au défi perdu d’avance sous forme d’une singulière collection, d’une genèse de l’impossibilité… Lorsque l’on ne peut plus jouer qu’est-ce que l’on peut bien faire, peut-être simplement comprendre ces architectures complexes. Étagère qui casse littéralement son plan suit la hauteur de chacune des pièces : on s’adapte.
F. L.
Volonté de repousser les limites pour satisfaire ou déjouer l’ego. C’est une panoplie d’épuisement de la matière et du geste. Par la forme de l’objet et son usage, on convoque l’essence des matériaux du bois et du corps. Le fakir est ici autant le sculpteur que le manipulateur de ces pointes dangereusement fragiles. Sang et veinage du bois, l’objet est à l’image de l’homme : dans l’épreuve physique il donne sens à sa matérialité et s’offre accès à la spiritualité.
F. L.