# Entre démocrati­sation de la culture et construction collective {: .cartouche-titre} # Historique de l’ISELP {: .sous-titre} Mélanie %%Rainville, Mélanie|Rainville%% {: .cartouche-signature} Historique de l’ISELP {: .running-header}

L’art : pour qui ? pour quoi ?

1971-1981

### Décoder le langage de l’art pour saisir le monde Bruxelles, 1970. Le secteur des galeries commerciales est effervescent. Fernand %%Spillemaeckers, Fernand|Spillemaeckers%% a ouvert %%MTL%% (1966) et démontre son engagement artistique, social et politique à travers des publications qui traitent de l’art et de ses enjeux. %%New Smith Gallery%%, %%Galerie Aujourd’hui%%, %%Galerie Cogeime%%, %%Villa Hermosa%%, %%Galerie Paul Maenz%%, Les contemporains et divers espaces ouverts par %%Baronian, Albert|Albert Baronian%% sont autant d’endroits où l’on peut entrer en contact avec des œuvres contemporaines. Des galeristes – principalement bruxellois – ont créé l’%%Association des galeries d’art actuel|Association des%% galeries d’art actuel en Belgique (1967-2001) pour défendre leurs intérêts et concurrencer les autres capitales à proximité. Pour se doter d’un organe de visibilité, ils créent La %%Foire d’art actuel%% en Belgique[^1] (1968, aujourd’hui %%Art Brussels%%). L’univers marchand promeut des esthétiques qui ne sont pas toujours synchrones avec les tendances officielles. Il a l’avantage de la diversité et attire les amateurs. Il n’y a pas de %%Musée d’Art moderne de Bruxelles|musée d’art moderne%% à %%Bruxelles%% et les jeunes créateurs bénéficient de peu de visibilité au sein des institutions artistiques. Depuis un peu moins de cinq ans, des artistes et des intellectuels manifestent leur mécontentement envers les politiques en vigueur. Le %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais des Beaux-Arts%% a été occupé. Marcel %%Broodthaers, Marcel|Broodthaers%% a présenté son *Musée d’Art moderne, Département des Aigles, Section XIXe siècle* chez lui. Un nombre croissant d’artistes cherche à dépasser les limites des anciennes disciplines, notamment en recourant à la performance et au film. La dématérialisation de l’objet d’art est enclenchée. Les œuvres sont iconoclastes. Décriés ou acclamés, les concepts qui se cachent derrière elles sont bien en vue. Ils répondent à un désir de s’extraire des dynamiques commerciales et engendrent un usage accru du langage verbal dans la production artistique. La création artistique émergente bénéficie également de peu de visibilité au sein des canaux de transmission de l’histoire de l’art. Quelques initiatives prises en 1959 améliorent la situation. Le palais des Beaux-Arts crée %%Jeunesse et Arts Plastiques (JAP)|Jeunesse et%% Arts Plastiques (JAP). On y écoute des historiens de l’art, organisateurs d’expositions, conservateurs, artistes et autres personnalités du monde artistique actuel. Philippe %%Roberts-Jones, Philippe|Roberts-Jones%% devient conservateur aux %%Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique%%. À titre de chargé de cours, il fonde la chaire d’histoire de l’art contemporain ainsi qu’un cours sur l’art contemporain à l’Université libre de %%Bruxelles%%.[^2] Cette nouveauté est positive pour le secteur, bien que ce que l’on qualifie de contemporain dans le monde académique de l’époque n’est peut-être pas si récent. Les écoles d’art telles que l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (%%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%-EsA), l’ESA %%Saint-Luc — ESA|Saint-Luc%% et l’École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%% forment de jeunes artistes. Elles offrent des cours d’histoire de l’art, mais ceux-ci sont subsidiaires par rapport aux cours pratiques. Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%%, directeur de %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%, est toutefois en contact étroit avec une jeune professeure qui reconnaît l’importance du rôle social de l’art contemporain : %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% a deux enfants dans les années 1950 et réalise peu à peu que la vie de mère au foyer ne lui convient pas à long terme. Elle retourne aux études et achève un doctorat en histoire de l’art à la %%Sorbonne%%, à %%Paris%%, à la fin des années 1960. Elle produit une thèse sur Jean %%Brusselmans, Jean|Brusselmans%%, dirigée par René %%Jullian, René|Jullian%%, s’installe à %%Bruxelles%% et enseigne à la %%Chapelle Reine Élisabeth|Chapelle Reine%% Élisabeth. À la fin des années 1960, elle installe régulièrement son projecteur de diapositives au cinquième étage de l’Innovation pour dévoiler des tranches d’histoire de l’art aux publics qui s’y présentent. Face à la loyauté de ses auditeurs, elle observe un véritable désir d’éducation continue. Celui-ci souligne l’absence d’institutions bruxelloises offrant aux adultes la possibilité d’entamer, consolider ou approfondir des connaissances en histoire de l’art. Elle imagine une association sans but lucratif dédiée à l’éducation artistique. De passage à %%Paris%%, elle présente son projet au baron Joseph-Berthold %%Urvater, Joseph-Berthold|Urvater%%, un diamantaire anversois et collectionneur d’œuvres d’art. Il soutient d’emblée sa mise en œuvre. L’*Institut supérieur pour l’étude du langage plastique. Fondation J.B. %%Fondation Joseph-Berthold Urvater|Urvater%%* (ISELP) est créé le 20 juillet 1970. Une publication annonce la création de l’ASBL au moniteur belge le 11 février 1971. Le conseil d’administration de l’ est composé d’éminentes personnalités incluant des professeurs universitaires d’autres métropoles européennes (Rome, %%Lausanne%%, Amsterdam), ainsi que des conservateurs liés au musée d’Ixelles, aux Musées royaux d’Art et d’Histoire et au musée d’Art moderne de %%Paris%%. La dimension internationale de sa composition, même dans le contexte de mondialisation actuel, étonne. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% sait s’entourer. Certains administrateurs constituent des acteurs déterminants dans les orientations idéologiques de l’. Ils représentent d’ailleurs, dans certains cas, son premier corps professoral. Le milieu culturel bruxellois est doté d’un nouvel organisme qui propose des cours et des rencontres avec des artistes dans le but d’élargir la compréhension des arts de tous les temps. Il entame ses activités huit mois plus tard, à la fin octobre, dans un local appartenant à Robert %%Warche, Robert|Warche%%, membre de la %%Chambre des Antiquaires%%[^3]. Le nom est bien réfléchi, chaque mot est choisi avec attention. *Institut*. La structure en devenir est un lieu dédié à la recherche. Ni école, ni centre d’exposition à proprement parler, il s’agit d’un organe éducatif souhaitant indépendance et autonomie. *Supérieur*. L’absence de structure similaire dans le paysage culturel bruxellois impose un positionnement infaillible. Il importe de construire et démontrer une valeur, de faire preuve de crédibilité. La valorisation induite par cet adjectif est l’indice d’une quête de reconnaissance sociale, culturelle et politique. *Pour l’étude*. Dans la foulée de 1968, on souhaite que la culture soit accessible à tous. En art contemporain, l’initiation et la démocratisation sont à l’ordre du jour. Pop art, land art, art conceptuel, hyperréalisme, les courants artistiques se succèdent rapidement à l’aube des années 1970. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% estime important d’offrir des clés de lecture pour aborder l’art de son temps. La volonté de rassembler des historiens de l’art, des artistes et des publics est effective. L’étude se produit en amont et en aval de cours d’histoire de l’art, souvent au contact les uns des autres. Il y a innovation dans les méthodes d’étude, d’analyse et de transmission de connaissances. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% tente une approche de l’art contemporain par les sciences humaines. Elle considère les œuvres en fonction de l’individu et de la société, et non pas de leurs qualités formelles. Leur composition, par exemple, est relayée au second plan. *Du langage plastique*. La sémiotique visuelle se développe dans les années 1960.[^4] Cette approche se structure autour de signifiants et de signifiés. Dans cette optique, des formes esthétiques et plastiques deviennent *communication*. À la même époque, le mouvement d’art conceptuel entraîne la dématérialisation de l’œuvre d’art et laisse plus d’espace au langage verbal. La fondatrice et directrice de l’ conçoit les arts plastiques comme un langage à apprendre, à développer, à décoder, à transmettre. Dans cette perspective, l’artiste est un être sensible qui a l’aptitude de reconnaître les points forts du monde dans lequel il vit et de les traduire à travers ses œuvres. Il incarne un visionnaire que les publics doivent comprendre pour saisir l’essence de leur époque. L’artiste se positionne au cœur des activités de l’. L’inflexion pédagogique mise en avant est essentiellement sémiologique et sociologique. Les œuvres sont décodées en fonction du contexte social qui les a vues émerger. Après un an de présidence du conseil d’administration, le baron %%Urvater, Joseph-Berthold|Urvater%% cède sa place à Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%% (en poste jusqu’en 1980). Ce dernier souligne la pertinence de l’approche pédagogique tournée vers la sémiologie : « La transformation des moyens d’expression entraîne ou provoque nécessairement de nouveaux modes d’approche de l’art et parmi eux il me semble que des analyses dérivées de la linguistique sont susceptibles de renouveler non seulement la manière d’appréhender l’art d’aujourd’hui, mais plus profondément encore les méthodes d’investigation traditionnelles de l’Histoire de l’Art en général. Dès le moment où l’on accepte d’assimiler l’art au langage ou de considérer l’art comme langage c’est-à-dire comme système de signes, des perspectives nouvelles et exaltantes s’ouvrent pour en accuser la portée comme phénomène de communication. »[^5] Cet intérêt envers la sémiologie dont témoignent %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% et Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%% se manifeste dans le programme de cours. Daniel %%Peraya, Daniel|Peraya%% contribue au rapprochement entre la linguistique et l’art par l’intermédiaire d’interventions régulières dans le contexte des cours « Sémiologie générale » (1971), « Quelques approches des faits de communication » (1972), « Sémiologie, langage cinématographique et critique idéologique. Lecture de film » (1972), « Linguistique générale : notions fondamentales » (1973), « Langages : communication et/ou signification ? » (1973), « Sémiologie graphique élémentaire et portative » (1973). D’autres cours se distinguent en la matière : « Le langage de l’affiche » par %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% (1971), « L’image comme communication visuelle » par Abraham %%Moles, Abraham|Moles%% (1973), « La mutation des signes » par %%Berger, René|René Berger%% (1973) et « Sémiologie graphique élémentaire et portative », repris par Luc Van Malderen (1973), entre autres. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% fait également valoir l’importante imbrication entre l’art et son contexte social par un nombre conséquent de cours. Dès 1972, elle dispense elle-même un cours intitulé « L’aventure provocante de l’art contemporain » et anime un débat avec Michel %%Ragon, Michel|Ragon%% au palais des Beaux-Arts intitulé « L’art pourquoi faire ? ». Dans le même ordre d’esprit, Jean-Pierre Van Tieghem offre le cours « Approche sociologique de l’art actuel » (1972). Ces initiatives font écho au symposium « L’art et son contexte culturel », que Fernand %%Spillemaeckers, Fernand|Spillemaeckers%% organise à La Cambre en 1973. L’ est en phase avec son époque. Par la suite, entre autres, Claude %%Javeau, Claude|Javeau%% propose « Sociologiquement, l’art et l’image » (1976) et Daniel Vander Gucht propose « Initiation à la sociologie : la société, l’art dans la société, la société dans l’art » (1983). Ce dernier est d’ailleurs le premier sociologue belge à tisser et théoriser des liens entre l’histoire de l’art et la sociologie. Gita Brys-Schatan est sensible à l’intérêt de l’interdisciplinarité. À l’, d’autres professeurs traitent du sujet sous des intitulés de cours plus discrets. Ces quelques interventions démontrent de manière assez exemplaire l’adéquation entre la création de l’ et le contexte de démocratisation de l’art et de l’enseignement, en cours à l’époque. À l’instar de Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%%, l’architecte et urbaniste Maurice %%Culot, Maurice|Culot%%, enseignant à %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%, semble également introduire un champ de spécialisation à l’. %%Culot, Maurice|Culot%% s’intéresse à une nouvelle théorie du langage de la ville en 1971 : « De tout temps et aujourd’hui davantage encore, on constate une extraordinaire contradiction entre les nécessités de l’urbanisme et la réalité de l’aménagement des villes. C’est le résultat de cette politique des ‘théories urbaines écartées’ dues à des décisions politiques négligeant le besoin réel pour des intérêts immédiats. (…) L’étude du langage de la ville permet de déceler les facteurs déterminants de son caractère, son visage actuel et son futur. »[^6] Bien qu’il ne dispense qu’un seul cours à l’ (« L’architecture contre », 1972), sa sensibilité et ses préoccupations envers la ville font écho à de nombreuses activités ultérieures. Le programme de cours des deux premières années d’activité de l’ trace une ligne éditoriale assez claire qui persiste longtemps dans l’esprit de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% et l’orientation de sa structure. Les sciences sociales, spécialement la sémiologie et la sociologie, servent de filtre pour examiner les productions artistiques. À partir de l’année académique 1972-1973, le programme est divisé en fonction de plusieurs axes. Parmi ceux-ci, les rencontres-débats %%Inforart%% animées par Jean-Pierre Van Tieghem. Chaque mois[^7], le journaliste et critique des arts visuels de la %%RTBF/RTB|RTBF%% reçoit et interroge un artiste belge ou étranger dans l’auditorium de l’. De nombreux artistes participent à ces dynamiques évènements, dont Dennis %%Oppenheim, Dennis|Oppenheim%% [^8], %%Le Parc, Julio|Julio Le Parc%%, Jean-Pierre %%Ghysels, Jean-Pierre|Ghysels%%, %%Gilli%%, %%Acconci, Vito|Vito Acconci%% (films, exclusivement), %%Meurant, Serge|Serge%% et Georges %%Meurant, Georges|Meurant%%, Georges %%Miezanagora, Georges|Miezanagora%%, Pierre %%Cordier, Pierre|Cordier%%, Joël %%Kermarrec, Joël|Kermarrec%%, %%Cadere, André|André Cadere%%, Juan %%d’Oultremont, Juan|d’Oultremont%%, Jacques %%Lennep, Jacques|Lennep%%, Félix %%Roulin, Félix|Roulin%%, Henri %%Ronse, Henri|Ronse%%, %%Forest, Fred|Fred Forest%%, %%Bourgeois, Jean-Jacques|Jean-Jacques Bourgeois%%, Jacques %%’T Kindt, Jacques|’T Kindt%%, Eddy %%Devolder, Eddy|Devolder%%, Michel %%Thomas, Michel|Thomas%%, Alain %%Fleig, Alain|Fleig%%, Colette %%Deble, Colette|Deble%%, Marie-Jo %%Lafontaine, Marie-Jo|Lafontaine%%. Les rencontres %%Inforart%% cessent en 1981. Progressivement, ces axes sont structurés au sein d’un programme qui englobe quatre profils de cours. Un profil d’initiation et d’apprentissage culturels intitulé « Après le travail avant la soirée » est prévu pour ceux qui travaillent en journée. Un deuxième profil compile un cycle de cours fondamentaux et un cycle d’approfondissement visant la consolidation de connaissances. Un troisième profil prévoit le recyclage des enseignants[^9] et un quatrième l’approfondissement et la remise en question des connaissances. Ces quatre profils comptabilisent plus de 150 heures de cours répartis les lundis, mardis, mercredis, jeudis dans des horaires impartis entre 14 h et 23 h[^10]. Une impressionnante diversité de sujets sont abordés. L’année 1978, à elle-seule, regroupe les cycles de cours suivants : « Initiation et apprentissage culturels », « Initiation à l’histoire de la peinture et de la sculpture », « Initiation à l’histoire de l’architecture », « Panorama des arts plastiques », « XXe – Métamorphes », « Enquêtes : Renaissance, Inde », « Enquêtes : XXe siècle », « La logique des espaces urbains », « Les styles et leur symbolique », « Psychanalyse et langage », « Le jazz ? Pour quoi ? Par qui ? Comment ? », « Pour une nouvelle lecture de l’œuvre plastique », « Séminaire sur l’image électronique ». Si les premières années académiques comprenaient majoritairement des cours liés à l’art contemporain, ce n’est plus nécessairement le cas par la suite. Cherchant à toucher un large éventail de sensibilités et de niveaux de connaissance, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% diversifie la nature de ses activités et les sujets abordés. ### Professeurs, auditeurs, membres et artistes %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% constitue un corps professoral francophone qu’elle sollicite ponctuellement. Les professeurs ont la responsabilité de trouver le *ton juste* pour s’adresser aux différents groupes d’auditeurs. Ni trop spécialisé, ni trop basique, le langage employé joue un rôle important. Cette recherche représente un défi de taille qui résiste aux années. Il y a peu d’opportunités d’enseigner l’histoire de l’art à %%Bruxelles%% dans les années 1970. Elles sont encore plus rares lorsqu’il s’agit d’art contemporain. L’ invite des historiens de l’art spécialisés ou généralistes à s’adresser à ses auditeurs. Un passage dans l’auditoire de l’ caractérise le parcours professionnel de plusieurs acteurs ayant fait carrière dans les mondes académique, muséal et artistique. Claude %%Javeau, Claude|Javeau%%, Pierre %%Sterckx, Pierre|Sterckx%%, Rouve %%Hauser, Rouve|Hauser%%, Henri %%Van Lier, Henri|Van Lier%%, Ignace %%Vandevivere, Ignace|Vandevivere%%, Pierre %%Lenain, Pierre|Lenain%%, Bernard %%Marcelis, Bernard|Marcelis%%, Daniel %%Peraya, Daniel|Peraya%%, pour ne donner que quelques exemples, sont aujourd’hui des personnalités connues. Porteuse de crédibilité, cette expérience permet notamment de tester la prise de parole publique et de confronter ses idées. L’ s’apparente à un club social. Les auditeurs doivent payer un abonnement annuel et avoir une carte de membre avant de s’inscrire aux cours[^11]. Ils reçoivent un certificat de fréquentation lorsqu’ils sont assidus, un diplôme lorsqu’ils présentent un travail agréé par l’ensemble des enseignants[^12]. Calqué sur un modèle académique répandu, le mode de fonctionnement de l’ permet la formation de spécialistes du langage plastique. Les gains obtenus grâce aux abonnements et aux inscriptions aux cours sont insuffisants pour permettre la viabilité de la structure. Gita Brys-Schatan fait preuve d’imagination pour pallier le manque de budget et de soutien logistique. Elle lance un programme de vente de sérigraphies intitulé « 500 à 500 F », consistant à produire 500 sérigraphies et à les vendre 500 francs belges (aujourd’hui 12,39 euros) chacune (ce projet devient assez rapidement « 500 à 1 500 »). Jan %%Dibbets, Jan|Dibbets%%, Jo %%Delahaut, Jo|Delahaut%%, %%Loge, Bernard|Bernard Loge%%, Jean-Michel %%Folon, Jean-Michel|Folon%%, %%Mara, Pol|Pol Mara%%, entre autres, participent à cette stratégie de financement indépendante. Grâce aux membres de l’ qui s’emparent de l’opportunité d’acquérir une œuvre contemporaine à prix abordable, elle renfloue les caisses et maintient un peu de liquidités.[^13] Ce projet prend forme grâce au concours de Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%%, qui mobilise un atelier de %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%% pour la production des premières impressions. Dès le printemps 1972, cependant, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% mène une enquête sur les meilleurs ateliers de sérigraphie et de lithographie au profit des artistes qui participeront à ce projet. ### *Art et ordinateur* %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% commence à organiser des expositions en réponse aux sollicitations répétées des auditeurs assistant aux cours. Son premier projet est ambitieux : *Art et ordinateur* prend place à %%Forest National%%[^14] du 18 avril au 18 mai 1974. Une version réduite est présentée à la Maison de la %%Maison de la culture de Namur|culture de Namur%% l’automne suivant. Cette exposition organisée en collaboration avec le %%Goethe Institut%%[^15] aborde une thématique susceptible de toucher des publics qui ne s’intéressent pas forcément aux arts plastiques. Elle offre une exploration, une excursion dans un domaine méconnu. Il ne s’agit ni de rétrospective, ni d’explication. À l’époque, le terme *ordinateur* fait partie du lexique francophone depuis une vingtaine d’années. Depuis 1960, des artistes s’emparent graduellement de ce nouvel outil, continuellement perfectionné. L’exposition *Art et ordinateur* rassemble plus de 200 œuvres *programmées* par des créateurs travaillant en France, en Allemagne, en Italie, en Hollande, aux États-Unis, en Belgique, etc. Mathématicien et philosophe allemand, Georg Nees (1926-2016) est le premier artiste au monde à présenter publiquement ses travaux produits à l’aide d’un programme d’ordinateur en 1965. Il profite d’algorithmes pour générer ses dessins mécaniques et présente *Corner Graphics* dans *Art et ordinateur* près de dix ans plus tard. Peter Struycken, Yves %%Kodratoff, Yves|Kodratoff%% et le Groupe de %%Vincennes, Groupe de|Vincennes%% sont également de la partie. Leurs travaux démontrent différents usages de la machine et témoignent de préoccupations diverses, allant de la recherche de mécanisation ou de processus aléatoires à la sollicitation d’une participation active de la part des visiteurs et la réalisation d’enquêtes conceptuelles. Outre les œuvres exposées, la présentation publique inclut un montage audiovisuel de 35 minutes, une section didactique, des projections de films, une séance d'écoute de musique par ordinateur et une publication réunissant des écrits de spécialistes. L’apparence artisanale de cette publication produite à l’aide d’un ordinateur rassemble des recherches fouillées. Le ministère de la %%Ministère de la Culture française|Culture française%%, la Commission française de la Culture de l’Agglomération de Bruxelles, %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%% et le %%Goethe Institut%% lui offrent soutien et collaboration. Dans son ouvrage *Computer Graphics – Computer Art*, Herbert W. %%Franke, Herbert W.|Franke%%, pionnier du graphisme informatique et auteur de science-fiction, cite des dizaines d’expositions rapprochant l’art et l’ordinateur présentées entre 1968 et 1980[^16]. Celle de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% y est mentionnée comme la première manifestation présentant des graphiques informatiques en Belgique[^17]. Abraham %%Moles, Abraham|Moles%%, auteur et professeur à l’université de Strasbourg, publie une importante étude intitulée *Art et ordinateur* aux éditions Casterman en 1971. Il y pose des questions cruciales : l’artiste est-il remplacé par l’ordinateur ou simplement déplacé ? Que sera une nouvelle critique d’art ? Quelles sont les bases de la nouvelle culture en symbiose avec la machine ? De passage à l’ deux ans plus tard pour une conférence intitulée « L’image comme communication visuelle » (1973), il nourrit sans doute la réflexion de Gita Brys-Schatan. *Art et ordinateur* est traversée par ces questions. L’ répond à sa mission fondamentale : explorer la notion de langage dans les productions culturelles. Il est question d’arts plastiques, mais également de musique et de films. Un essai d’Abraham %%Moles, Abraham|Moles%% intitulé ‘L’art permutationnel : la conscience du jeu et ses règles’, issu de son ouvrage de référence de 1971, est reproduit dans la publication qui accompagne l’exposition. Manfred %%Mohr, Manfred|Mohr%%, Yves %%Kodratoff, Yves|Kodratoff%% (‘Pour un art par ordinateur’), Jean-Claude %%Halgand, Jean-Claude|Halgand%% (‘Peinture ordinateur’), Hervé %%Huitric, Hervé|Huitric%% et Monique %%Nahas, Monique|Nahas%% (‘Distance, texture et vieilles dentelles’) ainsi que %%Arveiller, Jacques|Jacques Arveiller%% (‘L’informatique musicale, qu’est-ce que c’est ?’), pionniers en ce qui concerne l’art digital, signent un essai dans cette publication. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% y ajoute sa contribution : ‘Au point de vue de l’histoire de l’art’. ### Des locaux permanents Depuis sa fondation, l’ occupe ponctuellement des auditoriums situés à %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%, ainsi qu’au 4 rue aux %%Laines (rue aux)|Laines%% et au 116 rue de %%Livourne (rue de)|Livourne%%. Face au succès des activités programmées, la nécessité d’un espace de travail plus confortable s’impose. La Commission française de la Culture de l’Agglomération de Bruxelles (la %%Commission communautaire française (COCOF)|COCOF%% – Commission communautaire française, en est l’héritière et se dénomme aujourd’hui le %%Service public francophone bruxellois%%) voit le jour en 1972. Créée pour développer une politique culturelle originale, complémentaire à celle du %%Ministère de la Culture française|ministère de la Culture française%%, elle a pour mission de contribuer à la mise en place de structures et de services d’éducation permanente qui manquent à %%Bruxelles%%. L’initiative de Gita Brys-Schatan trouve un soutien majeur au sein de cette entité politique[^18]. Jean-Pierre %%Poupko, Jean-Pierre|Poupko%%, son président (1972-1989), ainsi que Maurice %%Culot, Maurice|Culot%%, architecte-urbaniste engagé dans le conseil d’administration de l’, soutiennent sa recherche de locaux permanents. Ils identifient le potentiel des espaces du 31 %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%. Ceux-ci correspondent aux anciennes écuries du %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%% et appartiennent à la Ville de %%Bruxelles%%. Ils jouxtent le %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%% et sont classés au registre du Patrimoine par la Commission royale des %%Commission royale des Monuments et Sites|Monuments et Sites%%. L’octroi de bâtiments de la Ville à l’ correspond à l’agenda politique de Jean-Pierre %%Poupko, Jean-Pierre|Poupko%%, qui souhaite œuvrer à la préservation du patrimoine et au soutien d’une structure culturelle francophone. Il permet en outre à la Commission française de participer à l’Année européenne du patrimoine architectural (1975). L’histoire du %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%% remonte au milieu du XVIe siècle. Il s’agit d’abord de deux hôtels achetés par la famille %%D’Arenberg (Famille)|d’Arenberg%% et rassemblés lors d’importants travaux d’architecture en 1752. Le palais %%Palais d’Egmont|d’Egmont%% est rénové en 1838 et cette intervention donne lieu à la construction de nouvelles écuries de part et d’autre du passage de Milan, qui relie le %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%% et le %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%. Ces nouvelles écuries accueillent : « […] les chevaux (aile gauche depuis le Palais), des voitures (aile droite), la cuisine des palefreniers, ainsi qu’une habitation particulière de service côté boulevard, et une autre côté parc. »[^19] Les bâtiments néoclassiques, composés de seize arches, sont construits selon les plans de l’architecte Tilman-François %%Suys, Tilman-François|Suys%%. À l’issue de la Première Guerre mondiale, la famille %%D’Arenberg (Famille)|d’Arenberg%% quitte la Belgique et cède le %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%% à la Ville de %%Bruxelles%%. Indépendantes du reste du site, les écuries ont plusieurs fonctions au fil des années. Une intercommunale, sous-station d’électricité de la Ville de Bruxelles, cloisonne les pièces en fonction de ses besoins en 1930. « Le courant haute tension y est transformé et distribué à basse tension. Le pont roulant, emblématique de la grande salle d’exposition actuelle, porté par une succession de portiques en béton armé qui rythment l’espace, est un héritage de cette époque. »[^20] Le sculpteur Georges %%Dobbels, Georges|Dobbels%% loue également à la Ville de Bruxelles, de 1953 à 1987, un espace de 180 mètres carrés de la partie du bâtiment située à proximité du %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%. Il y établit son atelier. Par ailleurs, des ateliers de danse, de théâtre et d’escrime s’y installent temporairement. En 1975, le positionnement de ce bâtiment dans cette partie de la ville représente un atout pour l’. Situé au carrefour de boutiques de luxe et d’un canal de circulation internationale (le %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%%, cédé par la Ville de %%Bruxelles%% au ministère des %%Ministère des Affaires étrangères|Affaires étrangères%%), il connecte le bas et le haut de la ville. Le %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%% ainsi que ses accès, classés parmi les sites patrimoniaux de la Ville de %%Bruxelles%% par arrêté royal depuis le 20 juillet 1972, contribuent également à l’intérêt du site. Les écuries nécessitent d’importants travaux de rénovation suite à des occupations et inoccupations successives. Les espaces sont redessinés en fonction des besoins de l’Institut. Mené par les architectes Daniel %%Lelubre, Daniel|Lelubre%% et Brigitte %%Libois, Brigitte|Libois%%, le chantier se déploie dès 1974-1975. Au bout du %%Milan, passage de|passage de Milan%%, à proximité du parc, la partie du bâtiment développée en hauteur, à droite du portique, est réaménagée au profit de fonctions administratives (secrétariat, direction, salle de séminaire, foyer, bibliothèque). Le foyer et la bibliothèque sont fermés par des portes vitrées qui donnent sur une salle polyvalente. Créée grâce au réaménagement d’un vaste espace des écuries, cette salle d’une centaine de mètres carrés, jouxtant l’atelier du sculpteur Georges %%Dobbels, Georges|Dobbels%%, est dédiée à des conférences, des expositions, etc. L’inauguration publique des nouveaux espaces du 31, %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%% est combinée au vernissage de *Patrimoine bruxellois : reportages* le 15 octobre 1975. Présenté dans la nouvelle salle polyvalente, ce projet marque la reconnaissance de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% envers Jean-Pierre %%Poupko, Jean-Pierre|Poupko%% pour l’octroi de locaux exceptionnels. Il se décline en trois reportages photographiques documentant les travaux de rénovation des anciennes écuries du %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%%, un inventaire du patrimoine architectural de la culture de l’Agglomération et une enquête menée dans les rues de %%Bruxelles%%. Intimement lié à la ville, à la société et à l’histoire, ce projet souligne l’importance des problèmes posés par la préservation et la restauration de l’immobilier bruxellois. Jean-Pierre %%Poupko, Jean-Pierre|Poupko%% profite de l’occasion pour souligner la nécessité d’agir en faveur de ce patrimoine. Lors de l’événement, ce dernier annonce la mise sur pied d’une campagne d’éducation, dès 1976, visant la promotion de tous les musées. L’ n’attend pas cette campagne pour poursuivre ses activités. Il continue à organiser des programmes de cours et des expositions. Suivant une périodicité assez irrégulière compte tenu de la nature polyvalente de la salle où elles prennent place, ces expositions durent environ un mois. Hormis les expositions individuelles présentées dans l’Espace Éphémère dont il sera question plus loin, par exemple, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% organise deux expositions en 1975, une en 1976, une en 1977, trois en 1978, quatre en 1979, deux en 1980, etc. Plutôt hétérogènes au premier abord, elles confirment la sensibilité annoncée lors de la fondation de l’Institut : elles témoignent, en alternance ou simultanément, d’approches sémiologique et sociologique de l’art. Si l’ est précurseur en la matière, cette tendance s’ancre graduellement dans le milieu artistique au cours des années 1970. Appelé à commenter le petit nombre de visiteurs ayant vu la célèbre exposition du %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais%% des Beaux-Arts %%Andre, Carl|*Carl Andre*%% / %%Broodthaers, Marcel|*Marcel Broodthaers*%% / %%Buren, Daniel|*Daniel Buren*%% / %%Burgin, Victor|*Victor Burgin*%% / %%Gilbert & George|*Gilbert & George*%% / %%Kawara, On|*On Kawara*%% / %%Long, Richard|*Richard Long*%% / %%Richter, Gerhard|*Gerhard Richter*%% en 1974, Pierre %%Sterckx, Pierre|Sterckx%% réagit d’ailleurs en ce sens : « L’art actuel n’est valable que s’il interroge, non pas tellement l’esthétique, mais la politique, la technologie, la sociologie, la sémiologie. L’exposition mise sur pied par Yves %%Gevaert, Yves|Gevaert%%, n’aurait-elle eu que ce retentissement-là, qu’elle se justifierait. »[^21] L’écrivain, critique d’art et enseignant belge résume les préoccupations qui continuent d’animer la fondatrice de l’ trois ans après la création de son ASBL. Quelques expositions organisées ou accueillies par %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% sont particulièrement représentatives de son approche sémiologique de l’art. Trois d’entre elles articulent l’image et le texte de manière similaire. *Héros-Tics* retrace l’évolution du concept de héros dans les bandes dessinées. Des planches de dessin originales invitent les lecteurs de bandes dessinées à côtoyer les amateurs d’œuvres d’art. Outre une rétrospective %%Tillieux, Maurice|Tillieux%%, cette exposition de mars 1978 inclut des planches originales de %%Druillet, Philippe|Druillet%%, %%Moebius%%, %%Tardi, Jacques|Tardi%%, %%Pratt, Hugo|Pratt%%, %%Gir|Gir%%, %%F’Murr%%, %%Forest, Jean-Claude|Forest%%, %%Franquin%%, %%Gottlieb%%, %%Hergé%%, %%Macherot%%, %%Vance, William|Vance%%, etc. Présentée du 28 novembre au 7 décembre 1978, l’exposition *Les livres d’enfants ne sont plus ce qu’ils étaient* traite du rapport entre l’enfance, l’image et le texte. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% estime que les dessins produits à destination des enfants peuvent être analysés dans le champ de l’histoire de l’art et intellectualise le sujet dans une publication éponyme. Plutôt didactiques, ces deux projets rapprochant art et langage esquissent l’histoire de deux formes de littératures. L’*Exposition internationale de tampons d’artistes*[^22] prolonge les recherches entamées sur le langage plastique. Du 1er mars au 3 avril 1981, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% rassemble des tampons d’une centaine d’artistes venus du monde entier sur des documents-témoins[^23]. Grâce à un formulaire de participation bilingue (français, anglais) envoyé par courrier postal à tous les artistes de son carnet d’adresses, la poste lui livre le contenu de son exposition. À l’époque, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% conçoit le tampon d’artiste comme le signe d’une singularisation similaire à la signature. Ce projet, vraisemblable­ment ludique et humoristique, lui permet de creuser la relation entre le texte et l’image présents sur les traces imprimées. Durant les années 1970, l’ présente également un ensemble d’expositions qui soulignent ou révèlent des phénomènes de société. *Art en série provenant d’intérieurs ouvriers du pays de la %%Ruhr%%* (19 novembre-13 décembre 1975), organisée en collaboration avec le %%Goethe Institut%% dans le contexte des Journées de la %%Ruhr%%, constitue un exemple probant. Cette exposition atypique est liée à un phénomène socioculturel propre à %%Bergkamen%%, une petite ville ouvrière. Tous les deux ans, une foire aux tableaux y est organisée. Dans ce contexte, les ouvriers peuvent, s’ils le souhaitent, échanger gratuitement une œuvre qu’ils ont en leur possession contre une gravure moderne de leur choix. L’ensemble des œuvres abandonnées est acquis par la municipalité de %%Bergkamen%%, intégré à une collection et, éventuellement, exposé à l’étranger. Le titre de l’exposition décrit le contenu présenté à l’ : reproductions de représentations de cygnes et d’angelots, de Jésus en bon pasteur, de buveurs de bière, de cerfs, entre autres, classées par thèmes. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% s’intéresse à ces œuvres et à ce phénomène pour des raisons sociologiques, indépendamment de leur qualité esthétique. Elle présente également dans la salle d’exposition, sous forme de cartes postales, les gravures modernes offertes en échange des œuvres exposées. Cette juxtaposition souligne l’incontestable différence entre les deux esthétiques, voire les deux idéologies. Du 4 au 27 décembre 1976, l’exposition *Humour/Caricature/Miroir du monde* regroupe une sélection de deux cents dessins représentant des personnalités ou des faits divers liés aux actualités de l’époque. L’ accueille un volet de l’exposition collective *Musée de poche. Inventaire permanent 1 – Milieu rural*.[^24] Cette exposition itinérante établit l’inventaire des œuvres récentes produites par des artistes de la Communauté française de Belgique qui abordent un ou plusieurs aspects du milieu rural. Elle permet notamment à Jacques %%Lennep, Jacques|Lennep%% de présenter le cinquième personnage de son *Musée de l’Homme* : %%Six, Madame Paul|Madame Paul Six%% (fermière collectionnant des autographes). Véhicule de l’esthétique relationnelle formulée par l’artiste dès 1972, ce *Musée* décline les trois types de relation synthétisant sa théorie : la relation structurale, la relation au récit et la relation sociale. Jacques %%Lennep, Jacques|Lennep%% et Gita Brys-Schatan partagent une volonté de positionner l’homme au centre de l’art et d’un carrefour de relations, de s’interroger sur la nature et le rôle de l’art. Cette volonté est spécialement prégnante au sein de l’exposition *Les bâtisseurs de l’imaginaire*[^25], présentée à l’ en 1979. Il s’agit d’une exposition didactique regroupant des ensembles de documents constitués par %%Prévost, Claude|Claude%% et %%Prévost, Clovis|Clovis%% Prévost pour rendre compte du travail de créateurs singuliers : des créateurs inclassables, souvent autodidactes et obnubilés par leur entreprise, qui se sont appropriés un lieu pour y vivre, construire ou transformer des formes architecturales. On parle alors d’architecture *brute*, comme on dit *art brut*. Pour ces artistes, la création en devenir devient simultanément un mode de vie et une raison de vivre. Raymond %%Isidore, Raymond|Isidore%% (surnommé %%Picassiette%% parce qu’il emploie des éclats de vaisselle pour créer ses mosaïques) décore l’intérieur et l’extérieur d’une maison-jardin à Chartres. Irial %%Vets, Irial|Vets%% achète une chapelle désaffectée près de Broglie, en Normandie, et y reproduit le plafond de la chapelle %%Chapelle Sixtine|Sixtine%%. %%Vidal, Camille|Camille Vidal%% produit près de 150 sculptures en ciment représentant des personnalités de la télévision, des hommes politiques, des personnages de fiction, des animaux, etc. Dispersées dans son jardin, ces sculptures forment un ensemble intitulé *L’Arche de Noé*. %%Monsieur G%% construit une maison en Seine-et-Marne qu’il conçoit comme un sanctuaire le protégeant des lasers du gouvernement russe. Cette maison est également décorée de fresques et de bas-reliefs. Quelques années auparavant, le sociologue et professeur bruxellois Claude %%Javeau, Claude|Javeau%% publiait la première édition de son ouvrage *L’Enquête par questionnaire. Manuel à l’usage du praticien* (1972), aux Éditions de l’Université de %%Bruxelles%%. Celui-ci ne passe certainement pas inaperçu aux yeux de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%. Dès 1975, elle intègre l’enquête dans son approche pédagogique en organisant un cycle de cours de spécialisation intitulé « Enquête sur l’image, ses structures, ses finalités », reposant sur le principe d’une enquête interdisciplinaire. Quelques années plus tard, elle organise deux expositions reposant sur de véritables enquêtes. Une première est entamée en 1979 en collaboration avec l’Institut interuniversitaire de l’opinion publique (%%Institut interuniversitaire de l’opinion publique (INUSOP)|INUSOP%%). Gita Brys-Schatan sonde l’opinion publique sur son rapport aux arts plastiques et souhaite, entre autres, mesurer l’impact visuel que certains lieux artistiques bruxellois ont sur elle. Les questions sont intimement liées aux préoccupations ayant mené à la fondation de l’ : « Attachez-vous de l’importance à l’éducation visuelle ? », « L’art est-il intégré à votre vie quotidienne ? », « Jugez-vous les tendances de l’art actuel, en cette fin de siècle, comme étant ’décadentes’ ? Quelle en serait la raison ? », « L’artiste a-t-il un rôle à jouer dans notre société ? Si oui lequel ? », « L’art dans la rue, dans le contexte urbain, dans le circuit quotidien, vous semble-t-il : dangereux, enrichissant, intéressant, éducatif, décoratif, subversif ? », « À votre avis, une incompréhension s’est-elle installée aujourd’hui entre les artistes et le public ? Dans l’affirmative, pourquoi ? », « Achetez-vous (aimeriez-vous acheter) de l’art contemporain ? Si vous achetez, quel est votre but ? », « Pour vous, que serait une œuvre de ‘mauvais goût’ ? », « Pour apprécier une œuvre contemporaine, faut-il une connaissance particulière ? », « Auriez-vous une idée originale pour réaliser un projet à Bruxelles ? », « Quelle serait la question importante à laquelle vous auriez aimé répondre et qui manque à cette enquête ? » L’enquête de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% s’apparente à une étude de marché cherchant à valider la pertinence des champs d’activité de l’, à l’aube de son dixième anniversaire. L’exposition *1 000 Bruxellois et l’art* (7-20 décembre 1979) rend compte des réponses obtenues. Bien qu’on connaisse peu de choses sur son contenu réel, elle apporte certainement une précieuse matière à réflexion à l’historienne de l’art. L’année suivante, elle réalise une autre enquête, essentiellement par correspondance. Cette fois-ci, des artistes contemporains sont interrogés sur la place qu'ils accordent à la photographie dans leur travail. L’exposition *La photographie et la peinture aujourd’hui* (13 mars-4 avril 1980), toujours aussi documentaire et didactique, révèle le fruit de ses recherches à travers des interventions écrites. On y retrouve des contributions %%D’Alessandro|d’Alessandro%%, %%Alluin, Monique|Monique Alluin%%, %%Ben|Ben%%, %%Forest, Fred|Fred Forest%%, %%Collins, Hannah|Hannah Collins%%, %%Delay, Alexandre|Alexandre Delay%%, %%Dubit, Philippe|Philippe Dubit%%, %%Erró%%, %%Gerz, Jochen|Jochen Gerz%%, %%Le Gac, Jean|Jean Le Gac%%, %%Lennep, Jacques|Jacques Lennep%%, %%Lizène, Jacques|Jacques Lizène%%, %%Mariani, Umberto|Umberto Mariani%%, %%Messager, Annette|Annette Messager%%, %%Urban%%, %%Untel%%, %%Viallat, Claude|Claude Viallat%% et %%Warhol, Andy|Andy Warhol%%, entre autres. Ces quelques exemples d’expositions présentées à l’ durant sa première décennie d’activité partagent un point commun : elles ouvrent et décloisonnent des mondes considérés distincts par ailleurs au profit de l’examen d’un phénomène social. Des œuvres graphiques, musicales et filmiques produites par ordinateur, par exemple, sont placées sur le même plan que des photographies documentaires, des représentations picturales reproduites à grande échelle, des œuvres modernes, des dessins de bandes dessinées, des livres pour enfants. Par conséquent, la définition de l’œuvre d’art s’ouvre à toutes formes de productions culturelles. ### Un Espace Éphémère pour l’art contemporain Outre quelques expositions intimement liées à des préoccupations sociologiques et sémiologiques, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% s’attache également à présenter des œuvres contemporaines. L’Espace Éphémère[^26], existant entre octobre 1978 et 1985, offre de la visibilité aux œuvres d’artistes émergents. C’est d’abord l’occasion d’exposer des photographies d’artistes belges et étrangers : « L’ désire être un centre vivant de recherches dans les domaines d’expression actuelle (…). (Il) veut donner au public la possibilité de comprendre les nouvelles directions dans lesquelles s’engage la photographie actuelle. Les expositions ont été réalisées pour donner à voir et à penser en éliminant les sujets faciles et commerciaux. »[^27] À partir de l’été 1983, l’Espace Éphémère est détaché de la photographie au profit du cycle « Dessins et autres desseins ». L’ donne libre cours à des artistes employant la plume et le crayon « afin de montrer la différence et la richesse des diverses disciplines qui dessinent ». Ce cycle d’expositions présente alors des œuvres de Myriam %%Kervyn, Myriam|Kervyn%% (photographe), Jacques %%Richez, Jacques|Richez%% (graphiste), Jean-François %%Octave, Jean-François|Octave%% (architecte), José %%Roland, José|Roland%% (peintre) et Félix %%Roulin, Félix|Roulin%% (sculpteur). Compositeurs, dessinateurs de BD, scientifiques et designers sont également exposés. Par la suite et jusqu’en 1999, l’ISELP délaissera considérablement l’exposition d’œuvres, contemporaines ou non, et concentrera davantage ses efforts sur ses cours et ses activités de recherche et d’édition autour de l’art environnemental. Cette première décennie d’activité est marquée par un changement majeur au sein du conseil d’administration : Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%% (1980) cède la présidence à Ilya %%Prigogine, Ilya|Prigogine%%. Le célèbre physicien, chimiste et philosophe belge d’origine russe reçoit des distinctions prestigieuses depuis quelques années, dont un prix Nobel de chimie en 1977. Il accompagne %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% et son équipe, quelques mois plus tard, à travers les célébrations du dixième anniversaire de l’. Des évènements sont organisés : une rencontre entre le professeur Abraham %%Moles, Abraham|Moles%% et le professeur et auteur Henri van Lier intitulée « Demain l’art », une conférence dispensée par le philosophe %%Kostas, Axelos|Axelos Kostas%% intitulée « Le problème de la fin de l’art » et une table-ronde intitulée « Présent et avenir » rassemblant Jacques %%Meuris, Jacques|Meuris%%, Georges %%Vercheval, Georges|Vercheval%%, Carole %%Naggar, Carole|Naggar%%, Pierre %%Cordier, Pierre|Cordier%% et Alain %%Fleig, Alain|Fleig%%. Par la suite, une publication dressant le bilan de ce qui a été accompli est produite. Elle se décline en plusieurs essais et listes qui présentent des manifestations culturelles, des cours, des professeurs. Elle représente un précieux effort d’archivage témoignant de la profonde vivacité de l’ASBL.

Croissance et profession­nalisation

1982-1986

### Diversifier les activités Dix ans auparavant, l’Institut proposait trois séminaires et accueillait une cinquantaine d’auditeurs par année académique. À présent, il développe un programme compilant vingt heures de séminaires et de cours par semaine au profit de près de cinq cents auditeurs par année académique. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% a dorénavant besoin de plus d’espace pour déployer le spectre d’activités qu’elle souhaite mener. L’ jouit d’une plus grande visibilité à partir de décembre 1983. Il s’agrandit en occupant désormais une nouvelle salle du bâtiment des anciennes écuries du %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%% qui s’ouvre sur le %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%.[^28] Les deux espaces ne sont pas connectés entre eux, mais l’entrée initiale, accessible depuis le %%Milan, passage de|passage de Milan%%, n’est plus le seul point d’accès à ses activités. Une boutique est installée dans cette zone d’accueil. Les visiteurs y retrouvent des sérigraphies d’artistes, des livres d’art, des guides des monuments de Belgique et des ouvrages de photographie. En complément de cette activité commerciale, l’ ouvre une %%Foire du livre d’art%% en septembre 1985, un mois avant la rentrée académique. Cet événement est reconduit durant quelques années. En cherchant à identifier et transmettre un langage artistique (plus ou moins) universel, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% semble œuvrer à une forme de cohésion sociale, à une quête de légitimité ou de reconnaissance des artistes, comme si elle participait à une démocratisation à travers la reconnaissance des créateurs de tout acabit. L’ajout de cours à destination des enfants dans la programmation de l’, à raison d’une heure par semaine pour un groupe d’enfants de 8 à 11 ans et un groupe de 12 à 15 ans, semble également s’inscrire dans un projet sociétal. Dans l’annonce du cours d’initiation des enfants à l’histoire de l’art dans le programme de deuxième cycle de 1986-1987, une nomenclature justifie la pertinence de cet ajout à la grille horaire. Parmi les « bonnes raisons de faire courir ses enfants à l’ », quelques points attirent l’attention : « - Parce qu’il est grand temps de pallier la carence de plus en plus accusée des enfants et des futurs adultes en matière artistique ; - Parce que si l’on ne court pas quand on est jeune, cela devient plus difficile à rattraper après ; - Parce qu'à l’ il y a un cours rien que pour eux… Faites les courir pour qu’ils puissent discourir de peinture, de sculpture, de publicité de manière autre (…) ». En filigrane, ces trois motivations semblent traiter du fossé entre la société et l’art contemporain – régulièrement sujet à polémiques – qui a probablement toujours fait partie de la réalité citoyenne. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% propose d’y pallier par l’éducation : un citoyen ayant développé un esprit critique par rapport à l’art durant sa jeunesse a effectivement plus de chances de *discourir* du sujet de *manière autre*. ### Champs de spécialisation et récurrences Le rapprochement entre l’art et la société opéré par %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% prend corps au sein d’une forme précise au fil des années : l’art intégré dans l’espace urbain[^29].  Bien qu’il propose des cours liés à l’architecture, à l’urbanisme et à l’art dans l’espace social depuis sa fondation, ce n’est qu’à partir de 1983 que l’Institut donne une forme officielle et concrète à ce champ d’intérêt. Il crée alors le domaine de recherche, de réflexion et d’investigation « %%Environnemental%% ». Un cycle de sept entretiens sur les grands problèmes urbains (1978-1979) intitulé les « %%Midis de l’art urbain%% », ainsi que le colloque « Architectes + plasticiens = une ville différente » (1979), en représentent les premières manifestations tangibles.[^30] À partir de ce moment, l’ favorise des contacts réguliers entre plasticiens et architectes pour traiter de l’intégration des arts plastiques à l’architecture et à l’urbanisme. Ce faisant, il éveille le public aux possibilités de rendre la ville plus *sensible* en y intégrant des œuvres d’art. « Plus qu’un champ de recherche, même, cette sphère d’investigation prolonge une perception de l’art, un credo, une conviction : l’art doit être intégré à la ville, voire à la vie quotidienne des citoyens. L’art nous apprend beaucoup sur le monde qui nous entoure. »[^31] Depuis la fondation de l’, les programmes de cours développés soulignent une curiosité marquée envers les arts extra-européens. Durant les années 1980, ce champ d’investigation est spécialement prégnant. En 1981, un cycle de cours intitulé « Découvertes : culture, art, site » se décline en différents volets : l’Inde, la Chine, l’Égypte, la Grèce. En outre, un cours abordant la civilisation islamique est mis au programme. L’année suivante, le même cycle de cours se décline différemment : la Russie et l’art byzantin, le Japon, les pays indianisés du Sud-Est asiatique, les États-Unis et leurs grandes collections. La civilisation grecque est mise à l’étude. Une impressionnante liste de cultures et de civilisations est étudiée au fil des années grâce à l’engagement de différents professeurs, choisis en fonction de leur champ de spécialisation. Cette tentative de présenter des productions culturelles issues d’autres pays fait notamment écho à la célèbre exposition *Les magiciens de la terre*[^32], qui est présentée au %%Centre Georges-Pompidou%% en 1989. Dans ce contexte, %%Martin, Jean-Hubert|Jean-Hubert Martin%% développe un discours interculturel en rapprochant des œuvres occidentales d’œuvres non occidentales, généralement considérées distinctes. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% ne se spécialise pas à proprement parler en arts extra-européens mais s’y intéresse tôt et multiplie les opportunités de s’y confronter : voyages culturels dédiés aux membres, séminaires menant à la découverte de cultures et sites étrangers, expositions dévoilant des créations d’autres pays[^33], stages. C’est dans cet esprit international que l’artiste allemand Jörg %%Immendorff, Jörg|Immendorff%% est invité à diriger un atelier durant trois matinées et trois soirées en 1984-1985. Étudiants et enseignants se réunissent autour du praticien et participent à un échange artistique, pédagogique, interfacultaire, interculturel. L’objectif de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% est clair : « (…) afin de donner aux étudiants des diverses écoles d’art la possibilité de travailler avec un plasticien étranger de renom, nous inaugurons cette année une formule workshop ». Dans les faits, cet atelier constitue l’heureuse prolongation du séminaire « Le pinceau – l’aérographe – le tableau – le graffiti », produit par Dr %%Becker, Wolfgang|Wolfgang%% Becker (conserva­teur de la %%Neue Galerie%%, Aix-la-Chapelle). L’intervention pratique de Jörg %%Immendorff, Jörg|Immendorff%% advient donc, en toute logique, après une analyse de la peinture des *nouveaux fauves* du début des années 1980. En 1987, peut-être dans une dynamique similaire, Tony %%Cragg, Tony|Cragg%% dispense à son tour un atelier de sculpture. L’ propose plusieurs événements consacrés au film et à la vidéo, en parallèle avec l’évolution de la production artistique.[^34] À la fin des années 1970, tous les jeudis soirs d’août à septembre, il offre gratuitement des projections de films consacrés aux arts plastiques dans le %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%%. Peut-être précurseur du premier festival de films sur l’art qui voit le jour à l’automne 2000 (aujourd’hui le BAFF – %%BAFF – Brussels Art Film Festival|Brussels Art Film Festival%%), ce programme estival souligne un intérêt marqué pour les films produits *par* et *sur* les artistes. En novembre 1978, un séminaire de recherches intitulé «  Cinéma non-narratif » s'inscrivant dans un cycle sur le cinéma indépendant, entre autres, paraît à la grille de cours. Du 11 au 18 juin 1983, l’ accueille l’un des deux volets de l’exposition itinérante *%%Méliès, Georges|Méliès%% l’enchanteur*.[^35] La figure de Georges %%Méliès, Georges|Méliès%%, illusionniste et pionnier du spectacle cinématographique, fait écho à l’intérêt de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% pour l’interdisciplinarité et les pratiques artistiques fédératrices. D’autant plus que son œuvre incarne un véritable objet de recherche – une recherche technique et conceptuelle pour lui d’abord, une recherche historique et intellectuelle pour sa petite-fille Madeleine Malthête-%%Méliès-Malthête, Madeleine|Méliès%% et de nombreux autres chercheurs ensuite. Quelques mois plus tard, des films d’artistes américains et anglais sont projetés dans le contexte de « Les belles heures du film d’art ». George %%Segal, George|Segal%%, Andy Warhol, Ed %%Kienholz, Ed|Kienholz%%, David %%Hockney, David|Hockney%% et %%Bacon, Francis|Francis Bacon%% sont à l’honneur. Des expériences d’artistes sont présentées. *%%Gilbert & George|Gilbert%% & George par %%Gilbert & George|Gilbert%% & George* et *KI-I, respiration espace/temps au Japon* de Toshio %%Matsumoto, Toshio|Matsumoto%% sont également à l’affiche. Pour clore le programme, un deuxième volet présente à nouveau le film de %%Matsumoto, Toshio|Matsumoto%%, ainsi que *%%Bouts, Dirk|Dirk Bouts%%* d’André %%Delvaux, André|Delvaux%%. Le 18 janvier 1984, l’ invite l’historien de l’art et professeur Alain %%Vanderhofstadt, Alain|Vanderhofstadt%% à présenter *France, tour, détour, deux enfants*, un film de Jean-Luc %%Godard, Jean-Luc|Godard%% et Anne-Marie %%Miéville, Anne-Marie|Miéville%% produit en 1978. Durant les douze épisodes de 26 minutes composant cette création, on suit deux enfants d’une dizaine d’années dans leur routine quotidienne. Dans le contexte du séminaire « Comme si elle (la photographie) était née de la peinture », ils servent d’objet analytique, de filtres pour déconstruire la photographie et étudier le langage – les *dits* et les *non-dits* – de l’image. Au printemps 1984, %%Berckmans, Jean-Pierre|Jean-Pierre Berckmans%%, producteur et réalisateur de vidéo clips, associé à la %%Dream Factory%%, propose un séminaire de trois séances. À cette époque, la chaîne de télévision américaine %%MTV%% diffuse des vidéo clips en continu depuis deux ans et demi, la musique est imagée au sein des foyers privés. Les enchaînements d’images en mouvement qui accompagnent dorénavant la musique représentent un sujet d’étude par excellence pour l’. Sur le programme de l’année académique 1983-1984, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% demande : « Hier… et ailleurs… fallait-il aussi être ainsi dans le vif du vent ? » Elle soulève le plaisir et la difficulté – toujours d’actualité aujourd’hui – de saisir les tendances du moment, de se renouveler, d’*être de son temps*. Elle enchaîne : « Des séminaires nous apportent l’éclaircissement (ou la complexité) d’une problématique qui nous cerne et nous concerne. Mais déjà nous jetons les ‘Pleins feux sur…’ des moments de culture fascinants. Qui nous enseignent et nous renouvellent. Tout comme – fidèles à nous-mêmes – nous entrons à nouveau dans une polémique de l’actualité de l’art. » Est-ce que l’examen d’images associées à des supports musicaux, au début des années 1980, peut faire partie des polémiques évoquées ? Du 18 mai au 3 juin 1983[^36], l’ présente l’exposition *Pochettes de disques, enluminures du XXe siècle*. Le rassemblement de pochettes de disques dans le contexte d’une exposition est l’occasion d’accorder plus d’attention à l’impact visuel et plastique de l’emballage de cet objet du quotidien.[^37] Objet familier des citoyens de toutes classes sociales et générations confondues, la pochette de disque sert un projet culturel et pédagogique visant à sensibiliser le public le plus large possible à l’importance du langage plastique. Fait assez rare à l’ dans les années 1980, la recherche est déployée au sein d’une publication. Cette dernière est divisée en trois parties. Une première partie intitulée « L’œil écoute » regroupe des textes de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, %%Borgers, Marc|Marc Borgers%%, Luc %%Van Malderen, Luc|Van Malderen%%, Henri %%Pousseur, Henri|Pousseur%%, Clément %%Dailly, Clément|Dailly%% et Gilles %%Verlant, Gilles|Verlant%%. À la lecture de plusieurs essais, on sent que l’image de la pochette de disque est un sujet d’étude récent, que les auteurs écrivent leurs observations et demeurent dans la subjectivité. Une deuxième partie consiste en un répertoire de pochettes de disques reproduites en noir et blanc, composé en fonction de leur qualité visuelle : « Il tend à souligner la volonté d’impact, produite par l’usage de différents moyens culturels et psychologiques : ce sont ces allusions, ces archétypes, ces chocs affectifs ou ces agressions volontaires qui sont ici mis en valeur. À chacun ensuite de poursuivre son enquête. »[^38] Enfin, une troisième partie propose un historique intitulé « L’art d’habiller le disque, de An %%Girard, An|Girard%% à Hipgnosis », signé par Jean-Patrick %%Duchesne, Jean-Patrick|Duchesne%%, alors aspirant au Fonds de la Recherche Scientifique (%%Fonds (national) de la recherche scientifique (FNRS)|FNRS%%). Ce dernier essai témoigne d’une véritable recherche et, à juste titre, l’auteur est identifié comme un collaborateur scientifique dans le colophon de l’ouvrage. Suite à cette exposition, la musique est abordée à quelques reprises au sein du programme de cours de l’ : opéra, rock des années 1950, 1960, 1970, les %%Beatles%%, %%Cage, John|John Cage%% et Pierre %%Boulez, Pierre|Boulez%%, le jazz, etc. L’ occupe un créneau spécifique dans le monde artistique. Il est complémentaire par rapport aux autres structures de diffusion culturelle. Il est avant tout un institut. Un regroupement de professeurs, chercheurs, artistes et autres penseurs qui tentent de dégager les enjeux culturels de leur époque au profit de différents publics, des néophytes aux érudits. Cours d’initiation, approfondissements de connaissances, séminaires, remises en question : les activités s’adressent à tous. Il s’agit d’un lieu de formation continue ni trop académique, ni trop expérimentale. Le principal public visé concerne ceux qui font partie de la vie active. Des individus détenteurs d’une formation qui souhaitent élargir leur spectre de connaissances. Certains par intérêt sincère envers l’art et la culture, d’autres par désir de culture générale ou par simple loisir. Ainsi retrouve-t-on dans la grille-horaire de l’ des activités portant sur toutes sortes de sujets. La spécialisation ne se situe pas véritablement dans les choix de sujets, mais dans la manière de les approcher. Indépendamment de son support, le langage plastique constitue le centre des préoccupations. Surtout lorsqu’il imprègne le quotidien des citoyens. La vie quotidienne intéresse %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%. En 1981, le sociologue Claude %%Javeau, Claude|Javeau%% dispense le cours « Au degré zéro de la vie quotidienne : les symboles de la banalisation ». Ils parlent alors d’organiser une exposition ensemble, mais le projet ne voit malheureusement pas le jour. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% manifeste clairement ce positionnement. Sa structure accueille des historiens de l’art qui peuvent s’exprimer sur l’art contemporain du temps présent, mais elle ne fait pas partie de l’effervescence liée au microcosme qui l’anime. Avec les avantages et les inconvénients que cela peut apporter, elle s’inscrit en marge des réseaux officiels. Ainsi l’ peut-il se permettre de présenter des films expérimentaux de Georges %%Méliès, Georges|Méliès%%, Andy Warhol, %%Gilbert & George|Gilbert%% & George et Jean-Luc %%Godard, Jean-Luc|Godard%% avant ou après une exposition didactique sur les masques, par exemple. Présentée du 22 au 29 avril 1982, *Masque et autres masques* se décline en trois séquences : le masque comme objet ethnologique, le masque en tant qu’objet d’art et rituel, le comportement quotidien dans nos sociétés. Bien qu’on annonce des œuvres anciennes et contemporaines, des animations et des films, la dimension anthropologique et sociologique du projet prend le dessus. Il est surtout question de commedia dell’arte, d’uniformes, de folklore, de sociétés sans écriture et de rituels, alors que le langage plastique du masque est à l’ordre du jour. ### Une approche inclusive de l’exposition %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% se donne pour principale mission *d’éduquer le regard et de sensibiliser au langage plastique.* Elle sous-entend une hiérarchie, mais la déconstruit constamment au fil des années en sollicitant ses publics de différentes manières. Les expositions *1 000 bruxellois et l’art* (1979) et *La Photographie et la peinture aujourd’hui* (1980) donnent une dimension publique à la parole de citoyens. D’autres initiatives confondent les rôles et les responsabilités, rapprochent les artistes, les visiteurs et les organisateurs. L’appel de dossiers qui est à l’origine de l’*Exposition internationale de tampons* illustre déjà une forme d’ouverture par rapport aux hiérarchies artistiques. L’ reçoit plus d’une centaine de propositions d’artistes. Dans le texte d’introduction du catalogue associé à cette exposition, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% écrit : « Nous avons été surpris par la diversité, la quantité et la spontanéité des envois : Australie, Océanie, Vénézuela, États-Unis, Pologne, Italie, Allemagne, Hollande, France… Belgique, etc… Certains auteurs réputés pour avoir exposé leurs œuvres dans les galeries les plus célèbres… d’autres vraisemblablement peu connus. » Ainsi ce projet semble-t-il dévoiler une envie de voir ce qui se passe au-delà des sphères d’artistes établis. Il élargit la prise de parole de l’artiste. Mené au début de l’année 1983, le projet *Ne vous mettez pas en boule, mettez-nous en boîte* intrigue en ce sens. On sait peu de choses sur le résultat de ce projet, mais nous en connaissons tout de même les modalités. Une feuille divisée en douze carrés, visiblement destinée à être découpée et assemblée en cube, invite à contribuer à une entreprise collective : « À vous de jouer, et avec nous : faites des faces, faites des cubes, faites des boîtes… imaginez, fantasmez, colorez, dessinez, découpez, riez, photographiez, bricolez, ajustez, collez… osez ! Renvoyez-nous (monté ou non) le ou les cubes. Exposition, prix et verre de l’amitié : jeudi 20 janvier à 18h30. »[^39] Cette initiative collégiale, possiblement dédiée à nourrir les liens sociaux entre l’équipe de l’, ses membres, ses auditeurs et ses visiteurs, est peut-être le prétexte d’une simple célébration de la nouvelle année entre pairs, peut-être une occasion de remercier tout le monde. Le caractère « organisé » de l’événement laisse croire que, soit on lui a accordé une véritable importance, soit on singe les codes de l’exposition. Réalisé avec un sens de l’humour et de l’autodérision sous-entendu par son titre, ce projet sollicite la participation, le volontarisme des visiteurs, des auditeurs, des artistes, des pairs. Dans le même esprit, l’ annonce l’exposition *José %%Roland, José|Roland%%. Carnets, petits cahiers…*[^40] par une affiche à découper et plier. Il invite les visiteurs à reconstituer un carnet permettant de voir des dessins de l’artiste et de lire des extraits de presse : « Pour reconstituer le carnet, pliez cette face (vers l’intérieur) suivant le pointillé, puis coupez les pages. » Un peu plus d’un an plus tard, l’ présente *Travaux en cours* qui, du 10 au 20 septembre 1985, regroupe des travaux d’étudiants inscrits dans les écoles d’art bruxelloises. Dans ce cas-là, des inscriptions imprimées sur le carton d’invitation de l’événement proposent au lecteur de le découper suivant des lignes pointillées et d’y fixer une épingle au dos. L’assemblage vise la création d’un badge permettant de « pénétrer sans danger dans les *Travaux en cours* ». Ces deux derniers exemples où le visiteur est invité à bricoler avant d’entrer dans l’espace d’exposition sont significatifs. Faisant office de *préparation à la visite*, les deux bricolages encouragent une responsabilisation du visiteur envers ce qu’il s’apprête à découvrir. Malgré leur caractère ludique et humoristique, ces initiatives peuvent sous-entendre une réflexion sur les dispositions nécessaires à la confrontation d’une exposition. Et si elles ne représentent en réalité que de simples invitations à mener un geste créatif ensemble, on peut toujours y percevoir une approche inclusive et active de l’exposition. Dans le même esprit, les trois projets évoqués brouillent les responsabilités des organisateurs, des artistes et des visiteurs. Invité à produire un objet pouvant prendre place *dans* ou *autour* des ensembles d’œuvres, le visiteur profite d’une plus grande marge de manœuvre pour investir l’espace de monstration et peut même, dans certains cas, accorder une dimension publique à sa *production*. Les publics ont dorénavant la possibilité de quitter leur rôle *passif* et de se positionner sur le même plan que *ceux qui savent*. Le travail linéaire réalisé entre les historiens de l’art et les artistes au profit d’un public se transforme graduellement en triangulation ; un désir de co-construction prend forme.

L’histoire de l’art est-elle finie ?

1987-2001

### Une entrée dans la postmodernité Dès l’automne 1987[^41], l’ prépare un appel à dossiers et l’expédie par la poste à tous les artistes[^42] de son carnet d’adresses. C’est une invitation à prendre part à un important projet éditorial : *Mémoire de l’histoire de l’art*. Un document rassemblant des reproductions en couleurs accompagnées de leurs informations techniques fait partie de l’envoi.[^43] « Avez-vous été concerné dans un moment de votre vie par l’histoire de l’art ou par une œuvre plus précise (parmi les 150 chefs-d’œuvre cités ci-après) ? » Les artistes peuvent choisir une œuvre qui résonne en eux et créer, à partir de cette référence, une nouvelle proposition artistique. L’initiative remporte un succès dépassant toutes les attentes. L’ sélectionne trente-six propositions parmi les 350 candidatures reçues. *Mémoire de l’histoire de l’art* est un ouvrage imposant par sa taille et son contenu. Ses 317 pages cumulent, en trois parties, des essais d’historiens de l’art, de sociologues et autres chercheurs, une introduction à ce que signifie l’histoire de l’art, une partie où sont regroupés d’importants chefs-d’œuvre (« Les chefs-d’œuvre des chefs-d’œuvre ») et leur réactualisation par les trente-six artistes actuels sélectionnés (« Création et recréation »).[^44] Pour chacune des citations, on retrouve une notice écrite par %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, parfois un texte de l’artiste, ainsi que des photos en noir et blanc qui positionnent la nouvelle œuvre, reproduite en couleur, dans le contexte de la pratique de l’artiste concerné. L’œuvre citée, qualifiée d’« œuvre mémoire », est systématiquement annoncée. Nul jeu de devinette, la filiation est rendue évidente. Par conséquent, la prise de parole individuelle de l’artiste se transforme en véritable dialogue ; les subjectivités se superposent. Cet ouvrage est la première publication de l’ à ne pas entretenir un lien direct avec sa programmation. Il ne s’agit pas d’un catalogue, mais d’un véritable projet éditorial. Il constitue une mise en abyme de la vocation de l’Institut qui veille à varier les méthodes pour transmettre la *mémoire*[^45] de l’histoire de l’art. Cours, colloques, expositions, ateliers et centre de documentation, entre autres, répondent à ce désir de reconstituer, ajuster et partager des pans d’histoire de l’art. Ils génèrent en outre des points de rencontre entre individus, cultures et pratiques. Si la copie est un mode d’apprentissage historique pour l’artiste, la citation est une occasion de réaliser une transaction identitaire avec un autre artiste en s’appropriant et réinterprétant l’une de ses formes artistiques dans sa propre pratique. Une possibilité, pour l’artiste-citant, de s’inscrire dans une généalogie historique et artistique. Les époques et les subjectivités se mélangent. Cela fait partie de l’ADN de l’ : « (…) les périodes et les cultures d’un passé proche ou lointain enracinent notre savoir et notre vision contemporains », écrit Gita Brys-Schatan à l’automne 1981. Vincent %%Heymans, Vincent|Heymans%%, dans le contexte d’une « Petite anthologie », traverse cinq siècles de littérature dédiée à l’art avant de poser une question qui est dans l’air du temps à l’époque : l’histoire de l’art est-elle finie ? Quelques paragraphes plus loin, l’auteur termine son historique relativement linéaire en se référant à %%Belting, Hans|Hans Belting%% pour annoncer un passage à la postmodernité. Ce qualificatif arrive à point nommé à la fin de l’ouvrage puisque tout ce qui le précède est résolument *postmoderne*. L’histoire de l’art – le passé – devient un répertoire de formes au sein duquel les artistes contemporains peuvent puiser pour faire émerger une nouvelle création. La subjectivité du créateur devient un critère de jugement valable et reconnu tandis que l’hétérogénéité règne. Les artistes créent des liens entre le passé et le présent au détriment d’une chronologie continue, tout en opérant une mise à distance de leur œuvre-source. La citation, l’ironie, la parodie, le pastiche et l’imitation sont d’ailleurs des procédures artistiques postmodernes par excellence. En outre, la question de la valeur, indissociable du postmodernisme, est également abordée à travers l’essai de Raymonde %%Moulin, Raymonde|Moulin%%, « Le marché et le musée, la constitution de la valeur artistique contemporaine »[^46]. Entre les créations, aucun autre fil conducteur que le concept originel (l’invitation à *citer* une œuvre à travers une nouvelle œuvre) dont elles découlent. Les lecteurs sont invités à naviguer entre les époques, les territoires et les esthétiques. Ils expérimentent le temps relationnel et relatif entre les œuvres et les artistes. Qu’est-ce que l’histoire de l’art ? Comment s’écrit-elle, se transforme-t-elle et se transmet-elle ? À l’aube des années 1990, Gita Brys-Schatan s’interroge : « La décade ‘90’ entre en vigueur… et les disciplines artistiques, fidèles à leur spécificité – la macro-sensibilité – explorent et constatent. L’ fidèle lui aussi, mais aux exigences qu’il s’est donné dès sa création, va cette année poursuivre à nouveau sa voie : ouvrir les domaines des arts visuels, en former une trame comme un langage que l’on offre, une langue que l’on traduit. Nous sommes toujours attentifs aux points forts de ce langage, ainsi qu’aux nécessités exprimées par nos publics en nos auditoires. »[^47] L’ est une structure où l’on fait confiance aux artistes pour déterminer les aspects du monde qui méritent attention. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% et son équipe reprennent une interrogation déjà entamée à la fin des années 1970 en invitant Jan %%Hoet, Jan|Hoet%% à présenter une conférence intitulée « L’art actuel – Présences pour l’avenir », en 1990. Quel est le sens de l’art ? Pour %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, il semble qu’il n’ait jamais véritablement changé et qu’il vise toujours à créer et révéler des liens entre les personnes, indépendamment des époques et des territoires. ### Chantier et politique éditoriale En 1981 déjà, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% introduisait une demande d’extension de ses locaux. Elle reçoit finalement une réponse positive en 1988. Après des années d’attente, le ministre Valmy %%Féaux, Valmy|Féaux%% accorde officiellement le budget de rénovation et d’extension revendiqué. Peu de temps après, la Ville de %%Bruxelles%% manifeste toutefois son intention de vendre une partie de ses locaux et toute l’extension attendue à des promoteurs privés : un marchand voisin de l’ souhaite agrandir ses espaces, avec la complicité de l’échevin de la Ville de Bruxelles, Michel %%Demaret, Michel|Demaret%%, tenté par le prix plus élevé du loyer.[^48] En opposition à ces démarches, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% lance une pétition pour faire valoir ses missions d’éducation permanente. Elle récolte 6 000 signatures et les médias relaient largement l’information. Un an plus tard, la signature d’un bail emphytéotique entre la Ville de %%Bruxelles%% et la Communauté française permet à l’ de conserver et d’agrandir les bâtiments qu’il occupe déjà. De profondes transformations structurelles et immobilières marquent la troisième décennie de l’. Dès 1992, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% et ses collaborateurs suivent des démarches administratives concernant l’immobilier : établissements et réajustements de plans, choix des architectes entérinés par le ministre de la Communauté française, commande de la première esquisse aux architectes, soumission de l’esquisse à la Commission royale des %%Commission royale des monuments et sites|monuments et sites%% pour avis et accord, approbation de l’esquisse, etc. Le bureau d’architectes %%Lelubre, Daniel|Lelubre%% et %%Libois, Brigitte|Libois%% est sollicité. Il s’agit de moderniser l’espace, de doubler sa superficie (1 000 mètres carrés) et d’adapter les espaces intérieurs aux activités qui se sont décuplées entre 1971 et 1992. L’équipe cherche des locaux disponibles pour la location afin de poursuivre les cycles de cours durant l’archivage et le déménagement interne. L’auditorium est encombré. On délocalise les cours dans les salles du %%Palais des Congrès de Bruxelles|palais des Congrès%% de %%Bruxelles%% et du centre des %%Centre des Riches-Claires|Riches-Claires%% en 1992-1993[^49], et dans une salle de la Maison de la Francité en 1993-1994. Les cours sont suspendus à partir de mars 1994 en vue du début des travaux. Ce n’est toutefois que trois ans plus tard, le 6 mars 1997, que Charles %%Picqué, Charles|Picqué%%, ministre de la Culture de la Communauté française, fait un discours pour marquer l’ouverture du chantier de rénovation de l’. Les cinq années durant lesquelles les bureaux administratifs sont délocalisés, d’abord dans des locaux provisoires à l’ (1994-1997), puis dans l’hôtel néoclassique %%Puccini, Hôtel|Puccini%%, un bâtiment de la Communauté française hérité de feu la province du Brabant et situé au 294, rue %%Royale (rue)|Royale%% (printemps 1997 – printemps 1999), marquent un ralentissement bien relatif compte tenu de l’important travail éditorial réalisé durant cette période. À cette époque, en plus de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% qui orchestre tout, une équipe de trois personnes réalise un travail journalistique, de recherche et d’écriture sur l’art urbain. Plus d’une dizaine de numéros de la revue *%%Environnemental%%* sont publiés entre 1989 et 1999. Cette revue est le principal organe d’un vaste champ de réflexion continuellement développé au fil des années. Conscient de ce champ d’expertise développé par l’, Charles %%Picqué, Charles|Picqué%% annonce un concours lors de son discours d’ouverture des travaux : des jeunes créateurs sont invités à concevoir une bâche pour couvrir la façade de l’ durant le chantier. La bâche sollicitée mesure 8,5 mètres de large sur 7,2 mètres de haut. Les élèves des classes terminales des écoles d’art de la %%Communauté française de Belgique%%, ainsi que les jeunes artistes sortis depuis moins de cinq ans d’une de ces écoles, peuvent participer. Un prix de 75 000 FB (environ 1 800 euros) est alloué à l’auteur du meilleur projet retenu par le jury. Un trio composé de Berta %%Truyols, Berta|Truyols%%, %%Baltus, Michaël|Michaël Baltus%% et Charles %%Kaisin, Charles|Kaisin%% remporte le concours et accroche sur la façade des milliers de petites bandelettes de plastique de différentes couleurs en 1997. Les travaux, devant initialement durer 200 jours ouvrables, prennent fin en janvier 1998. Le 16 janvier 1998, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% prononce un discours qui marque la fin du chantier. Elle en profite pour annoncer le redémarrage des activités un an plus tard, après emménagement et mise en place d’une programmation. ### Extension La fondatrice et directrice de l’, négociatrice hors-pair, réussit à doubler le nombre de ses collaborateurs en obtenant un certain nombre de postes liés au statut d’agent contractuel subventionné (ACS). Le deuxième mandat (1995-1999) de Charles Picqué, en qualité de ministre-Président de la %%Région de Bruxelles-Capitale/Région bruxelloise|Région bruxelloise%%, aura permis à l’ de prendre de l’ampleur. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% remercie son équipe le soir du vernissage de l’exposition *Liberté, libertés chéries ou l’art comme résistance… à l’art : un regard posé sur dix années d’acquisitions de la %%Communauté française de Belgique%%. 1989-1998*. Durant les trois années de délocalisation des bureaux, cette équipe se consacre à des publications (revue *%%Environnemental%%*), restructure le centre de documentation, la diathèque et la gestion de fichiers. Elle prépare également des programmes de cours et des expositions pour anticiper son retour dans ses espaces rénovés. Au sein de l’équipe renforcée, cette période de transition ne se fait pas sans remous. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% est une femme passionnée. Elle ne compte pas ses heures de travail et n’établit pas de frontière claire entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. On ne crée pas une structure du tout au tout comme on accepte un emploi de salarié. Or, l’effervescence engendrée par la création de politiques culturelles au début des années 1970 – notamment grâce à la création de la Commission française de la Culture de l’Agglomération de %%Bruxelles%% – s’amenuise à l’aube des années 2000. D’autant plus que la quantité de structures culturelles bruxelloises augmente. Les métiers artistiques s’institutionnalisent[^52] et se professionnalisent continuellement. Du côté du monde de l’emploi, à l’ comme au sein d’autres institutions culturelles, une prise de conscience modifie le rapport au travail. L’absence de règlement du travail devient un sujet sensible. L’histoire des trente premières années de l’ raconte, outre l’évolution d’un microcosme artistique, les difficultés inhérentes à la gestion d’un espace de diffusion du secteur non marchand. Le jour de l’emménagement dans les nouveaux locaux arrive malgré de nombreux reports. La tâche est colossale, mais l’équipe s’y affaire sans soutien extérieur. Une fois encore, empaquetage, location de camionnette, déplacement des boîtes, emménagement. L’équipe de professionnels a des airs de famille. Les activités reprennent au 31 %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%, dans des locaux transformés, en janvier 1999. Dorénavant, l’équipe de l’ bénéficie d’une salle de cours, d’un double espace d’exposition, d’un centre de documentation, d’une galerie d’art (%%Galerie-Découverte%%), d’une vitrine d’objets et de livres d’art (Rayon Art), d’un café-restaurant (*%%Au Passage de Milan%%*), de nouveaux bureaux, d’une salle de réunion et de nombreux espaces techniques. La superficie des espaces, atteignant maintenant 1 000 mètres carrés, a littéralement doublé grâce à l’installation d’une passerelle qui relie les espaces initiaux du bâtiment (attenants au %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%%) et l’espace anciennement occupé par le sculpteur Georges %%Dobbels, Georges|Dobbels%% (à proximité du %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%). %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% profite du réaménagement et de l’agrandissement de ses espaces pour réactualiser ses activités. La %%Galerie-Découverte%% et %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%% se substituent à l’Espace Éphémère. Les noms sont différents, mais les principes sont similaires : on y découvre des œuvres d’artistes contemporains belges et étrangers qui ne sont pas encore connus du grand public. La %%Galerie-Découverte%% se concentre sur les beaux-arts, tandis que %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%% se concentre sur les arts décoratifs (bijoux et autres petits objets produits à partir d’arts du feu – céramique, verre, porcelaine, etc.). Indépendamment de leur statut, les œuvres sont mises en vente. %%Rayon Art/Librairie%%, par ailleurs, est un tout nouveau concept pour l’. Il s’agit d’une librairie spécialisée en art dirigée par Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%%[^54] et installée dans l’espace d’entrée du %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%. Mille cinq cents livres d’art – et sur l’art – sont répartis sur deux longues bibliothèques murales. Depuis trente ans, l’ est un lieu de rencontre. Il mélange artistes et professeurs d’ici et d’ailleurs avec des publics en tous genres autour d’enjeux artistiques, culturels et sociétaux. Le réaménagement des espaces permet de renforcer la convivialité de l’Institut puisque les visiteurs peuvent désormais flâner dans un espace polyvalent où ils peuvent se restaurer, bouquiner et découvrir une œuvre. Un concept inédit à Bruxelles, à l’époque. À l’issue de cette deuxième phase de travaux, le bâtiment de l’ est bonifié d’une œuvre de Joseph %%Kosuth, Joseph|Kosuth%% grâce au décret relatif à l’intégration d’œuvres d’art dans les bâtiments publics.[^55] En contact avec l’artiste depuis 1995, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% propose l’œuvre *A Map with 13 Points* à la Commission artistique de la Communauté française, qui l’accepte et la commande. Un assistant de %%Kosuth, Joseph|Kosuth%% se rend à l’ et grave treize citations d’artistes célèbres sur les vitres du bâtiment, le long du %%Milan, passage de|passage de Milan%%. Ces citations traitent d’art et de relation à l’art.[^56] Elles font écho à la vocation pédagogique, artistique et relationnelle de l’. Elles rappellent en outre le profond intérêt envers le langage et le discours qui anime Gita Brys-Schatan. L’intégration de cette œuvre dans le bâtiment de l’ est cohérente en regard de son histoire, même avec vingt ans de recul. Les citations de paroles d’artistes font d’ailleurs écho aux citations artistiques reproduites dans la publication *Mémoire de l’histoire de l’art* qui, dix ans auparavant, faisait entrer l’ dans la postmodernité. L’ reprend ses cours à l’automne 1999. Nouveaux espaces, nouveau site internet[^57] (novembre 2000), nouveau logo. Un design graphique légèrement différent accompagne un programme académique qui véhicule des motivations intactes. « C’est en s’intéressant de près à l’œuvre des artistes que l’on apprend de nouvelles manières de regarder le monde, que l’on aiguise une perception rabotée par la routine quotidienne… On se donne ainsi une immense forme de liberté. »[^58], écrit Gita Brys-Schatan. Elle réitère son parti-pris. Les cours divisés en trois niveaux (initiation, approfondissement, remise en question) traversent toujours un large éventail de sujets et de temporalités. Une séance académique de réouverture entame l’année académique 1999-2000. Le 24 septembre 1999, exceptionnellement au %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%%, divers intervenants prennent la parole. Le président du conseil d’administration de l’, Ilya %%Prigogine, Ilya|Prigogine%%, situe l’Institut dans le contexte de la « culture culturante ». Guy %%Haarscher, Guy|Haarscher%% (doyen de la faculté de philosophie et lettres de l’%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%%) prononce une conférence intitulée « Vers une véritable université des droits de l’homme ». Joseph %%Kosuth, Joseph|Kosuth%% témoigne de l’art en situation et Johan %%Muyle, Johan|Muyle%% évoque l’art actuel interculturel. Enfin, Thierry %%Genicot, Thierry|Genicot%%, journaliste à la %%RTBF/RTB|RTBF%%, évoque l’action de l’. Ces cinq interlocuteurs définissent l’Institut directement ou indirectement : une école ouverte à tous où l’on peut fréquenter des œuvres, et spécialement réfléchir à l’art urbain et l’art extra-européen, et à leurs enjeux. Cette séance académique se prolonge par une collation dinatoire dans les locaux rénovés de l’, ainsi que par le vernissage de l’exposition *Côté parc, côté boulevard, l’ISELP, un chemin pour les arts*. À l’aube du trentième anniversaire, ce projet ouvertement commémoratif rappelle les points forts de l’institution culturelle bruxelloise. Du 25 septembre au 9 octobre 1999, les visiteurs peuvent voir des documents extraits des archives de l’ qui témoignent de son passé. On y voit des photographies prises lors des cours, des reproductions de pages couvertures de la revue *%%Environnemental%%*, des cartons d’invitation et des affiches d’expositions telles que *Art et ordinateur* (1974) ou *Masque et autres masques* (1982), entre autres, mis en espace par Winston %%Spriet, Winston|Spriet%%. Il n’est d’ailleurs pas anodin que Paul %%Gonze, Paul|Gonze%% ait réinstallé son œuvre *Rêve de voyance ou de cécité* dans le %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%% à cette occasion. Son rayon laser animant la statue du prince de Ligne produite par John %%Cluysenaar, John|Cluysenaar%% en 1935, rappelle un moment clé : l’exposition *Néon, fluor et Cie.* (1984).[^59] *Le Réservoir d’idées*, exposition et publication, est un projet imaginé par %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% pour accorder une visibilité publique à des idées qui sont restées à l’état de projet. Une soixantaine d’artistes belges et internationaux exposent des plans, des dessins, des maquettes et des photomontages de projets d’art environnemental du 21 octobre au 13 novembre 1999. Cette exposition marque la fin d’une tendance didactique et documentaire qui imprègne les expositions organisées par la fondatrice de l’ depuis *Art et ordinateur*, en 1974. ### Une nouvelle approche de l’exposition Durant les années 1970, le %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais des Beaux-Arts%% est l’une des rares structures publiques bruxelloises présentant des œuvres contemporaines. Yves %%Gevaert, Yves|Gevaert%%, d’abord comme collaborateur de la %%Société des expositions%% (1968-1972) puis comme codirecteur aux côtés de %%Bertouille, Suzanne|Suzanne Bertouille%% (1972-1975), introduit au sein de l’institution une pléiade de jeunes pratiques, souvent conceptuelles. Karel %%Geirlandt, Karel|Geirlandt%%, à titre de directeur de la %%Société des expositions%% (1974-1986) inscrit et maintient le palais des Beaux-Arts dans un réseau de circulation d’œuvres actuelles et internationales.[^60] Sous l’impulsion de Philippe %%Roberts-Jones, Philippe|Roberts-Jones%%, les %%Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique|Musées royaux des Beaux-Arts%% inaugurent le %%Musée d’Art moderne de Bruxelles|musée d’Art moderne%% (1962-1978, 1984-2011) qui, tout comme le %%Musée d’Ixelles|musée d’Ixelles%%, inclut ponctuellement des œuvres d’artistes émergents dans son programme d’expositions. Jean-Louis %%Godefroid, Jean-Louis|Godefroid%% fonde l’ASBL bruxelloise %%Contretype%% en 1978. Cette initiative le mène à exposer les travaux de jeunes photographes dans son appartement, jusqu’à ce qu’il investisse l’hôtel de maître Art Nouveau d’Édouard %%Hannon, Édouard|Hannon%% en 1988. Face à ces différentes entités, l’ a une identité distincte et complémentaire, bien que la création de %%Contretype%% rappelle celle de son Espace Éphémère. La scène bruxelloise évolue durant les années 1980. Le Centre d’art contemporain, ouvert par la %%Fédération Wallonie-Bruxelles|Fédération Wallonie-Bruxelles %% en 1983 et dédié à la présentation d’expositions d’art contemporain, est actif jusqu’en 2004. Sa directrice, %%Dumont, Fabienne|Fabienne Dumont%%, s’intéresse au milieu artistique belge à travers l’organisation d’expositions collectives et d’échanges d’artistes internationaux. Elle crée notamment le cycle d’expositions *Parcours*, destiné à donner de la visibilité aux jeunes artistes qui sortent des écoles d’art bruxelloises %%Erg — ESA|(Erg,%% %%Le 75 — ESA|le 75%%, l’%%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%, %%Saint-Luc — ESA|Saint-Luc%%, à tour de rôle). Le centre culturel du %%Botanique%% propose également par moments des productions émergentes à partir de sa création en 1984. %%ARGOS ASBL|ARGOS%% à partir de 1989. Les artistes Alec %%De Busschère, Alec|De Busschère%%, %%Bedel, Delphine|Delphine Bedel%%, Christophe %%Draeger, Christophe|Draeger%% et Patrick %%Everaert, Patrick|Everaert%% créent l’espace de diffusion %%Établissement d’en face|Établissement%% d’en face en 1991. La création de ce premier centre d’artistes autogéré (*artist-run space*) bruxellois, non institutionnel et non commercial, contribue à la visibilité des jeunes artistes. Tandis qu’on assiste à l’élargissement, la multiplication et la diversification des réseaux voués à la création artistique contemporaine dans plusieurs villes du monde occidental, %%Bruxelles%% entame lentement sa prise de position. À défaut de profiter d’un musée dédié à l’art contemporain, les créateurs trouvent des alternatives. L’évènement %%Bruxelles|*Bruxelles*%% *2000, capitale culturelle européenne* engage un important investissement financier dans une rénovation urbaine. Cette valorisation rayonne sur le secteur culturel qui, à cette occasion, présente 1 500 projets en plus de la %%Zinneke Parade%%. La manifestation semble agir comme une étincelle au sein d’un foyer de créateurs en tous genres, dont les initiatives métamorphosent durablement le tissu urbain et le secteur culturel. Le collectif de curateurs %%Komplot%% est créé en 2002. Un nouveau modèle de structure voit le jour et diversifie le secteur. La dynamique est en train de changer, un nouvel équilibre est à trouver. L’ est profondément affecté par la transformation du milieu de l’art contemporain bruxellois. Bien qu’elle se déploie lentement, cette mutation l’oblige à renforcer son positionnement pour faire face à de nouveaux enjeux. L’année académique 1999-2000 marque une prise d’importance des expositions. Pour la première fois, elles sont annoncées dans le programme de cours. Ce même programme annonce en outre : « Nos expositions se positionnent déjà en 99 et augmenteront encore leur impact dans les temps qui viennent. » L’approche documentaire et didactique de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% est substituée par une sensibilité accrue envers la singularité des démarches artistiques. L’exposition quitte la sphère du livre et de l’étude pour celle de l’expérience esthétique. Un nouveau paradigme de l’exposition est d’ailleurs annoncé lors de *Find*, qui rassemble des créations de design finlandais du 2 au 29 février 2000 : « Par cette démarche volontariste, *Find* veut donner une nouvelle impulsion au concept même d’exposition : l’exposition doit faire avancer la création. » Que ce soit grâce aux nouveaux espaces de l’ ou à une tendance générale observée dans le milieu artistique, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% modifie son approche de l’exposition. Elle accorde dorénavant plus de place aux expositions individuelles, qu’elle avait délaissées depuis l’abandon de l’Espace Éphémère, en 1985. Les projets durent toujours aussi peu de temps, un mois tout au plus. Une hiérarchie s’établit entre les espaces suivant l’entrée du 31 %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%% et les grandes salles visibles depuis les mezzanines et la passerelle, un étage plus bas, au niveau du passage de Milan. Plus expérimental, l’espace du haut, la %%Galerie-Découverte%%, accueille des œuvres d’artistes émergents. Les salles inférieures accueillent plutôt des œuvres d’artistes connus, du moins établis. Elles sont inaugurées par une exposition d’œuvres d’%%Axell, Evelyne|Evelyne Axell%% (1935-1972) initiée par le réalisateur et époux de l’artiste, %%Antoine, Jean|Jean Antoine%%. Organisée par %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, avec la collaboration du %%Musée d’Ixelles|musée d’Ixelles%%, *Mémoire de Bacchante* est présentée du 9 au 30 juin 2000. Quelques mois auparavant, l’ accueillait une dizaine de conférenciers francophones dans le contexte d’un cycle de cours de quarante heures intitulé « Messagerie de l’art contemporain. Dakar - Haïti / %%Lausanne%% - Ouagadougou / Lyon - Le Caire / Yaoundé - Montréal / Cotonou - Alger : le train de l’art contemporain roule en francophonie, 1ère étape ». Ils avaient la mission d’analyser les particularités des œuvres produites par des artistes de différentes nationalités s’exprimant en français. Historiens de l’art, artistes et journalistes se succédaient pour examiner la corrélation entre le langage verbal et la création artistique. Ce cycle de cours incarne la base scientifique d’une exposition présentée à la fin de l’année : *Messagerie de l’art contemporain. Le train de l’art contemporain roule en francophonie. 2e étape*[^61], présentée du 9 novembre au 6 décembre 2000. Cette entreprise représente un véritable tour de force compte tenu du budget disponible pour l’organiser. Elle rassemble des œuvres trouvées en Belgique, bien qu’elles soient généralement produites par des artistes de nationalité étrangère, par exemple. Paradoxalement locale et internationale, cette exposition interroge le rôle de la langue véhiculaire dans la culture d’un pays, soulève des pistes de réflexion sur la spécificité culturelle et la globalisation de la création contemporaine. Elle s’inscrit dans l’événement « Le tour du monde francophone en 80 villes », organisé par la Commission communautaire française, à l’occasion de * %%Bruxelles 2000%% *. Avec cette exposition, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% réaffirme plus directement son intérêt pour les cultures non occidentales et leurs pratiques artistiques et remarque que c’est dans l’air du temps : « Auparavant, certains n’hésitaient pas à classer l’art non occidental dans le tiroir de l’anthropologie plutôt que dans celui de l’art contemporain. Aujourd’hui, les créateurs contemporains non européens commencent à être appréciés à leur juste valeur, au même titre que les artistes occidentaux. Une nouvelle preuve nous en est donnée au travers de cette exposition. »[^62] En 2001, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% initie un cycle de six expositions et publications monographiques intitulées « Avoir lieu – Être au fond ». Elle sélectionne six artistes qui recourent à l’installation artistique et les invite à créer des œuvres autour du sens profond des verbes *avoir* et *être*. Les artistes Bob %%Verschueren, Bob|Verschueren%%, Johan %%Muyle, Johan|Muyle%% et Philippe %%Decelle, Philippe|Decelle%% sont associés au sous-titre « Avoir lieu », tandis que Paul %%Gonze, Paul|Gonze%%, Michel %%Mouffe, Michel|Mouffe%% et %%Carez, Christian|Christian Carez%%, sont associés au sous-titre « Être au fond ». Remises en contexte au sein des publications, les œuvres offrent une expérience sensible dans les salles d’exposition. Respectant profondément les publics auxquels elle s’adresse, Gita Brys-Schatan consulte régulièrement les auditeurs et les visiteurs. Sollicitations de commentaires sur la programmation, acceptations de propositions de sujets d’étude, enquêtes collectives menant à des études sociologiques : les méthodes sont variées. Dans le contexte de la série « Avoir lieu – Être au fond », elle se met à risque en sollicitant des avis sur son concept d’exposition. « Que vous inspirent ces deux concepts ? Avoir lieu… Être, au fond. Ces deux concepts vont successivement stimuler la création de six artistes ; que peuvent-ils inspirer au public, à ceux qui investiront le lieu de création ? »[^63] Les témoignages et les opinions recueillis sont intégrés dans le contenu des publications ; les publics ont un rôle actif. À travers cette démarche, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% manifeste son attachement pour l’être humain et son sens critique. Présentée à l’ du 26 octobre au 24 novembre 2001, l’exposition *Le Clonage d’Adam* rassemble une cinquantaine d’œuvres cernant des problématiques liées au corps humain. Les représentations et les métamorphoses du corps se structurent selon trois axes : l’automate, la poupée, le clone. On y retrouve notamment des œuvres d’%%Orlan%%, de Philippe %%Druillet, Philippe|Druillet%%, de %%Gilbert & George|Gilbert%% & George, de %%Lang, Fritz|Fritz Lang%% et de Niki de %%de Saint-Phalle, Niki|Saint-Phalle%%. Pour l’une des premières fois, les communications autour de l’exposition sont intimement liées à un programme de conférences et de performances. Le 15 novembre, Dr Robert %%Schoysman, Robert|Schoysman%%, spécialiste en génétique, propose une conférence, et les jumelles hermaphrodites berlinoises %%Eva & Adele%% réalisent une performance. Ces dernières se retrouvent également autour d’une table ronde intitulée « Art et clonage », en compagnie de %%Durant, Ben|Ben Durant%%, Michel %%Clerbois, Michel|Clerbois%%, Gita %%Brys-Schatan, Gita|Brys-Schatan%% (les commissaires de l’exposition), et du sociologue Daniel %%Vander Gucht, Daniel|Vander Gucht%%.

De l’initiative privée à l’institution publique

2002-2009

### Expositions et programme scientifique Durant trente ans, la personnalité et les convictions de Gita Brys-Schatan imprègnent toutes les activités menées *à*, *par* et *avec* l’. Trois décennies durant lesquelles elle maintient la structure à bout de bras. Elle négocie durement lorsque son projet nécessite des ressources supplémentaires pour s’épanouir. Elle sait travailler en réseau et identifier les soutiens potentiels. Le maintien d’une toute petite équipe de travail jusqu’à la fin de années 1990 permet une gestion collégiale et une cohérence dans la programmation. Lors de son départ en 2002, la fondatrice et directrice lègue un héritage conséquent. La petite structure privée est devenue une véritable institution publique. Des subsides (Communauté française, %%Commission communautaire française (COCOF)|COCOF%%, %%Actiris%%, %%Loterie nationale%%, etc.), des mécènes (%%Eeckman Art & Insurance|Eeckman%% Art & Insurance) et des philanthropes (de nombreux membres) sont engagés dans le projet, et ces revenus doivent être justifiés par une programmation conséquente en termes de quantité et qualité d’événements. Le duo formé par Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% et Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% fait face à un défi. Il est à la tête d’un puissant outil mais doit se l’approprier et le définir en fonction d’un monde en constante évolution. ### Une nouvelle génération s’engage Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% prend la direction de l’ le 1er août 2002. Sociologue agrégée et collectionneuse d’art, elle a plusieurs types d’expériences professionnelles à son actif. Entre autres, dix ans de recherche démographique à l’%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%%, dix-huit ans d’implication au sein de Présence et action culturelles (%%Présence et action culturelles (PAC)|PAC%%), un mouvement d’éducation permanente. Autodidacte, elle a une formation de terrain en art contemporain, nourrie d’histoire de l’art, de visites d’ateliers d’artistes, de vernissages, ainsi que de lectures d’essais. Elle est membre de la %%Commission consultative des arts plastiques%% durant deux ans et critique d’art pour *%%Art et Culture%%*. Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% s’est joint à l’ trois ans auparavant avec son concept %%Rayon Art/Librairie%%. En dotant %%Bruxelles%% d’une structure qui existe au cœur d’autres villes, il inscrit l’ dans un mouvement novateur. L'Institut devient un organisme culturel polyvalent où l’on peut se restaurer, bouquiner, voir des œuvres. Le binôme identifie rapidement un mode de travail viable. Directrice générale, Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% assure la gestion financière du bâtiment et du personnel – alors composé de treize employés –, ainsi que des expositions. Directeur scientifique, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% gère la programmation des cours donnés par une quinzaine de professeurs, les colloques, les grandes conférences et les voyages culturels. Cette direction bicéphale apporte quelques modifications au fonctionnement de l’. Elle établit un règlement de travail et installe une pointeuse pour un comptage des heures de travail plus transparent. Restructuré, le travail est distribué en cellules correspondant aux champs d’activités : cellule Communication, cellule Internet, cellule %%Galerie-Découverte%% et %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%%, cellule %%Rayon Art/Librairie%%, cellule Voyages-découvertes. Les employés sont associés à des tâches spécifiques mais se retrouvent lors des montages et des démontages pour des tâches communes. Parfois, une graphiste se retrouve en salopette pour peindre, un historien de l’art recoud le textile d’une œuvre, une secrétaire emballe ou déballe une œuvre. Grâce à une clause inscrite dans le contrat des employés, les expositions constituent un vecteur de cohésion au sein de l’équipe. En outre, la liste des membres du personnel de l’ est publiée sur le programme annuel. L’individualité des membres du personnel ne s’efface plus derrière la vision d’une direction, on assiste à l’émergence d’une somme de personnalités contribuant au développement d’un projet commun. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% quitte la direction le 31 juillet 2002 mais demeure membre du conseil d’administration de l’ASBL. Elle poursuit la programmation des expositions prévues jusqu’à la fin de l’automne 2002. Un an plus tard, elle signe le document attestant la succession d’Ilya %%Prigogine, Ilya|Prigogine%% par Michel Van der Stichele à la présidence du conseil d’administration. Inspecteur général des Finances puis directeur général à la %%Région de Bruxelles-Capitale/Région bruxelloise|Région de Bruxelles-Capitale%%, Michel Van der Stichele s’est toujours intéressé à la gestion des institutions culturelles. À l’époque, il préside notamment les conseils d’administration du %%Botanique%% %%Botanique|Centre Culturel de la Fédération Wallonie-Bruxelles%%, et du %%Cirque Royal%%. Le baron %%Urvater, Joseph-Berthold|Urvater%%, qui est administrateur de l’ depuis le tout début, décède la même année. Une nouvelle génération s’engage. ### L’art contemporain à travers le spectre de l’exposition L’ se repositionne au sein d’un milieu artistique en profonde et continuelle transformation depuis 2000 : de plus en plus perçue comme un *médium*, l’organisation d’expositions prend de l’importance. Tristan %%Trémeau, Tristan|Trémeau%% aborde cette nouvelle réalité lors d’une conférence intitulée « De la naissance de la valeur d’exposition à la substitution de l’œuvre par l’exposition : questions esthétiques posées par une mutation, de %%Benjamin, Walter|Walter Benjamin%% à aujourd’hui »[^64], en 2003. Il exprime en partie ces changements dans la capitale. À partir de 2005, le concours annuel %%ArtContest%%[^65] encourage les artistes de moins de 35 ans. La Ville de Bruxelles, souhaitant avoir son propre organisme pour organiser des expositions, crée la %%Centrale électrique%% en 2006. Cette structure accueille trois expositions temporaires par année. Six ans plus tard, elle précise son identité sur la scène culturelle belge et internationale pour s’adapter au microcosme de l’art contemporain. Elle devient la Centrale for Contemporary Art en 2012. Ce changement se traduit par une nouvelle identité graphique et une programmation mettant les artistes belges à l’honneur, tout en les plaçant dans une perspective internationale. Le Wiels ouvre ses portes en 2007. Cette structure entame ses activités avec des méthodes de travail professionnelles de pointe, adaptées aux enjeux du secteur. La Loge ouvre ses portes en 2012 et diversifie encore davantage l’offre d’expositions d’art contemporain. Les *artist-run spaces* se multiplient, de nombreuses galeries commerciales ouvrent leurs portes ou installent une antenne à %%Bruxelles%%. La Fondation %%Fondation Thalie|Thalie%% voit le jour en 2014, la %%Patinoire royale%% et %%Société|Société en 2015%%. Le rythme s’accélère. La signature des organisateurs d’exposition devient de plus en plus importante, la singularité des projets est recherchée. Entretemps, face à la forte concurrence tant pour les lieux de diffusion qui peinent à maintenir leur singularité et leur complémentarité que pour les artistes qui tentent de se démarquer, il devient aussi important de savoir présenter son travail que de le réaliser. Si les expositions constituent une activité subsidiaire par rapport aux cours dispensés par l’ entre 1974 et 2002, ce n’est définitivement plus le cas par la suite. Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% se joint à l’équipe avec l’intention de programmer et développer des expositions d’art contemporain. Face à l’irrégularité qui régnait auparavant dans ce champ d’activité, notamment due au manque de locaux disponibles, elle a carte blanche. Ce faisant, elle insuffle une énorme dynamique à l’. Les espaces et la hiérarchie entre « les grandes salles », la %%Galerie-Découverte%% et le %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%% sont maintenus sous sa direction. À partir de 2003, le programme d’expositions qui concerne les grandes salles de l’ se structure en faveur de trois modalités, même si celles-ci connaissent des exceptions. Chaque année, il se compose désormais d’une exposition individuelle, d’une exposition collective et d’une exposition liée à un cycle de cours, une actualité artistique ou une collaboration. Dans ces trois cas, une périodicité de deux mois est adoptée et les jeunes artistes de la Communauté française sont privilégiés. Les grandes salles accueillent une exposition monographique par année. Un artiste y rassemble des œuvres inédites, produites en fonction de l’architecture intérieure. L’ n’est pas un *cube blanc*. Les murs sont coupés à intervalles réguliers par des pilastres qui multiplient les recoins. Les fenêtres, les verrières et les portes constituent autant d’obstacles aux murs pleins. Traversée par une passerelle et bordée de mezzanines de part et d’autre, la salle principale peut accueillir de très grandes pièces compte tenu de sa hauteur impressionnante. Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% choisit de tirer parti de ce magnifique espace, exempt de neutralité. En 2002, elle découvre le travail de Guillaume %%Liffran, Guillaume|Liffran%% lors d’une exposition à la %%Galerie Gabriel Brachot%%. Le jeune artiste, alors âgé de 27 ans, partage son intention de créer des sculptures qui déclinent la forme du pylône électrique. Séduite par son projet, la nouvelle directrice lui propose une collaboration et développe *Guillaume %%Liffran, Guillaume|Liffran%% : Electric* (21 février au 5 avril 2003). Sculptures et dessins sont dispersés dans les salles. La pièce maîtresse est ambitieuse : une tour dont la base carrée repose sur le sol de la grande salle et le faîte surplombe largement la passerelle. Trois façades sur quatre sont fermées par des peaux. Créée spécifiquement pour l’exposition, *Enfermement I* impressionne par ses 5,70 mètres de hauteur. Outre ce que l’artiste souhaite y insuffler comme sens, la référence physique et graphique au pylône électrique rappelle que les murs de l’ ont déjà abrité une sous-station d’électricité de la Ville de %%Bruxelles%%. Un passé qui se manifeste par la conservation d’un pont roulant qui traverse une partie des salles d’exposition. Elle rappelle en outre l’intérêt que l’ manifeste envers l’espace et le mobilier publics dans toutes leurs facettes. Par la suite, %%Cardoen, Philippe|Philippe Cardoen%% (*Gises*, 2004) expose une trentaine de sculptures en acier brut (corrodées partiellement et traitées au noir), pesant entre 10 et 150 kg chacune, au centre de la salle ; Bénédicte %%Henderick, Bénédicte|Henderick%% (*Lætitia B : autopsie*, 2006) installe une immense sculpture tubulaire qui occupe une bonne partie de la salle et s’élève pratiquement jusqu’au plafond. Christian %%Rolet, Christian|Rolet%%, Michel %%Clerbois, Michel|Clerbois%%, %%Bornain, Alain|Alain Bornain%%, Didier %%Mahieu, Didier|Mahieu%%, Bernard %%Gaube, Bernard|Gaube%%, Sylvie %%Macías Díaz, Sylvie|Macías Díaz%% et %%Carez, Christian|Christian Carez%%, avec la collaboration d’Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%%, composent à leur tour avec cette architecture qui fait dorénavant partie de l’identité de l’. Des expositions collectives s’ajoutent également au programme annuel régulier de l’. La sélection collégiale d’un thème mène à l’organisation de réunions où la directrice, les historiens de l’art de l’ et des artistes invités affinent une réflexion ensemble. La première occurrence s’intitule *Du diaphane et de l’illusion : une pluralité d’apparences*, présentée du 16 mai au 19 juillet 2003. Dans ce contexte, quinze artistes femmes exposent des œuvres abordant la suggestion, la perception, le visible, l’invisible. %%Amathéü, Catherine|Catherine Amathéü%%, %%Bertrand, Lucile|Lucile Bertrand%%, %%Cambruzzi, Marie-Ange|Marie-Ange Cambruzzi%%, Marie %%Delfosca, Marie|Delfosca%%, Laurence %%Dervaux, Laurence|Dervaux%%, Bénédicte %%Henderick, Bénédicte|Henderick%%, Aïda %%Kazarian, Aïda|Kazarian%%, Niki %%Kokkinos, Niki|Kokkinos%%, Sylvie %%Pichrist, Sylvie|Pichrist%%, Marianne %%Ponlot, Marianne|Ponlot%%, Aude %%Renault, Aude|Renault%%, Isabelle %%Rousseau, Isabelle|Rousseau%%, Léopoldine %%Roux, Léopoldine|Roux%%, Ela %%Stasiuk, Ela|Stasiuk%% et Reiko %%Takizawa, Reiko|Takizawa%% profitent de l’exercice. Le parti pris de la jeune création locale est maintenu, et les femmes y sont visibles. Le projet collectif suivant, *Le Dessus des cartes : art et cartographie* (2004), donne la parole à vingt artistes belges et étrangers. Ces derniers livrent des visions personnelles de la cartographie de la Terre par l’intermédiaire d’œuvres existantes ou de nouvelles productions. La matière exposée traite du territoire. Par conséquent, elle souligne des enjeux politiques, militaires, économiques, sociaux et écologiques qui traitent de la distribution du pouvoir. Françoise %%Schein, Françoise|Schein%% dénonce des injustices sociales typiquement brésiliennes en pointant l’absence des favelas sur les cartes de la mégalopole de Rio de Janeiro. Le militant écologiste Peter %%Fend, Peter|Fend%% souligne l’importance des ressources naturelles en brouillant la traditionnelle hiérarchie entre l’océan et la terre ferme sur des cartes d’un nouveau genre. Certains artistes, dont la démarche est structurée autour du voyage et du déplacement, réfèrent à des expériences vécues plus directement. Parmi ceux-ci, Christophe %%Fink, Christophe|Fink%%, Marie-Christine %%Katz, Marie-Christine|Katz%%, Capucine %%Levie, Capucine|Levie%%, Jessica %%Vaturi, Jessica|Vaturi%%, Angel Vergara se distinguent. D’autres abordent la cartographie de manière plus poétique. Dans tous les cas, cette exposition invite à adopter de nouveaux points de vue – ceux des artistes – pour examiner le fonctionnement du monde privé ou collectif. Lors d’un entretien mené par Christine %%Jamart, Christine|Jamart%% et publié dans le magazine *%%L’Art même%%*, Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% affirme : « Le but des expositions à sujet générique de l’ est de convier artistes confirmés et jeunes plasticiens afin que ces derniers retirent un enrichissement de cet échange et de cette confrontation. C’est là la mission de service public d’une institution culturelle comme la nôtre et c’est un risque volontiers assumé. »[^66] La commissaire de l’exposition cherche à susciter une forme de collégialité et d’émulation. Elle ne travaille d’ailleurs pas seule. Sa plus proche collaboratrice est assurément la jeune historienne de l’art Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%% (%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%%), qui s’est jointe à l’équipe de l’ en 2003. Celle-ci soutient la production de chacune des expositions. Les expositions développées sous la responsabilité d’Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% sont pérennisées par une publication. Le contenu du *Dessus des cartes : art et cartographie*, comme celui des autres projets, est archivé et approfondi dans un ouvrage illustré qui présente les œuvres exposées et le contexte historique dans lequel elles ont émergé. Marie-Ange %%Brayer, Marie-Ange|Brayer%%, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, Kim %%Leroy, Kim|Leroy%%, Claudine %%Marlaire, Claudine|Marlaire%% et Pierre %%Sterckx, Pierre|Sterckx%%[^67] y apportent leur contribution critique. Dans ce catalogue comme dans l’entretien publié dans *%%L’Art même%%*, Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% ne fait pas l’économie du contexte global dans lequel son projet s’inscrit. Elle traite d’une prise de conscience générale, rendue perceptible par la 50e %%Biennale de Venise%% (2003) et la %%Documenta%% XI (2002), liée à la distribution du pouvoir sur la planète. Et pour cause ! En 2002, Okwui %%Enwezor, Okwui|Enwezor%% devient le premier directeur non européen de la %%Documenta%% XI, à Cassel. Il développe une stratégie pour décloisonner l’approche eurocentrique habituellement associée à la célèbre manifestation culturelle : des antennes sont distribuées à Vienne, Berlin, New Delhi, Sainte-Lucie et Lagos afin de répartir l’évènement au cœur de nouveaux espaces. Il adjoint en outre un fond conséquent à cette forme ambitieuse tandis que les œuvres sélectionnées comprennent majoritairement des photos, des films et des vidéos de nature documentaire cernant des problématiques liées à la migration, à l’urbanisation et au postcolonialisme. Plus de vingt ans après *Les Magiciens de la Terre* (1989) de %%Martin, Jean-Hubert|Jean-Hubert Martin%%, %%Enwezor, Okwui|Enwezor%% profite d’une manifestation internationale de grande envergure pour souligner l’importance d’une nouvelle cartographie du monde de l’art contemporain qui tarde à s’établir. En février 2003, l’historien de l’art Jean-Philippe %%Theyskens, Jean-Philippe|Theyskens%% en aborde les enjeux dans le contexte de « Onze éditions : bilans pluriels et états des lieux de la %%Documenta%% », un séminaire de recherche et de spécialisation dispensé à l’. Grâce au concours des historiens de l’art qui y travaillent régulièrement et des professeurs qui y sont embauchés ponctuellement, l’Institut s’attache à développer un discours critique sur l’actualité artistique. Par la suite, l’ présente les expositions *Picto(s)* (2006), *Paysages/Visions paradoxales* (2007), *De Narcisse à Alice : miroirs et reflets en question *(2008), *Dress Code* (2009), *Flesh* (2009), *En quelques traits, un cabinet de dessin* (2010). Ces expositions ne sont pas reliées par un fil rouge évident, mais chacune d’entre elles représente une recherche au *temps présent*. Leur sujet et leur contenu, devenus objets d’études, sont explorés et nourris par des artistes, des historiens de l’art et d’autres auteurs. Les grandes salles accueillent un troisième type d’exposition, d’abord placé sous le signe de la transversalité. Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%% et Éric Van Essche en profitent pour dresser des parallèles avec des cycles de cours et des colloques. L’exposition *Apparition(s)*, développée en collaboration avec les ASBL Ad Libitum (%%Chamboisier, Anne-Laure|Anne-Laure Chamboisier%%) et Transcultures (%%Frank, Philippe|Philippe Frank%%), présentée du 14 novembre au 6 décembre 2003, rassemble des interventions médiatiques de Bertrand %%Gadenne, Bertrand|Gadenne%% et Alexandra %%Dementieva, Alexandra|Dementieva%%. Cette dernière, par exemple, propose un dispositif composé d’un écran de projection faisant miroir : en léger décalage par rapport à la réalité, le visiteur y observe son image projetée sur les images d’une vidéo incluant parfois d’autres personnes. Il s’agit d’une occasion de conscientiser sa présence dans la salle d’exposition de l’, de même que sa réception d’une œuvre contemporaine au moment même. Cette œuvre performative, au sens propre où l’entend %%Austin Langshaw, John|John Langshaw Austin%%[^68], opère une mise en abyme qui soulève, entre autres, des enjeux inhérents à la considération des publics. En parallèle, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% organise un colloque international intitulé « Exposer l’image en mouvement ? De la grammaire spatiale à la production de contenus » qui se tient les 28 et 29 novembre 2003. Des chercheurs et des artistes, belges et étrangers, dispensent des communications, deux tables rondes et des projections. Ils profitent du festival Netd@ys Wallonie-Bruxelles pour creuser les pistes de réflexion amorcées par l’exposition *Apparition(s)*. Les actes de ce colloque, co-édités avec %%La Lettre Volée%%, paraissent en septembre 2004. Difficile à organiser dans la durée, ce croisement systématique entre cours, colloque et monstration d’œuvres est graduellement abandonné[^69]. Le troisième type d’exposition présenté dans les grandes salles de l’, généralement au printemps, se cristallise plutôt autour d’enjeux actuels et de collaborations avec d’autres organismes culturels. Il s’agit d’une mise à disposition des salles où la collaboration se joue à différents niveaux selon les cas, incluant ceux de la scénographie, du montage et du démontage, du gardiennage, de l’accueil des visiteurs, des visites guidées et des relations de presse. Hormis l’accueil annuel d’expositions de photographies produites et organisées par Leica au tournant de chaque année entre décembre 2003 et janvier 2009, l’ accueille, en présence d’Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%%, *Demain, j’irai mieux* (2004), *Le Bijou contemporain en Communauté française* (2004), *%%Mass moving%%. Un aspect de l’art contemporain en Belgique 1969-1975* (2004), *Les Grands Moments de vie* (Véronique %%Ellena, Véronique|Ellena%%, 2006), *Artistes pour Amnesty* (2006), *Hommage à Marthe %%Wéry, Marthe|Wéry%%* (2007), *White Noise. Carte blanche à la céramiste Caroline %%Andrin, Caroline|Andrin%%* (2008), *Singuliers/Pluriels. Huit artistes s’installent. Carte blanche à %%Chantelot, Marie|Marie Chantelot%%* (2010), *Sonopoetics : De la parole à l’image, de la poésie au son* (2010), *Ceci n’est plus Beyrouth. Photographies de Fouad %%Elkoury, Fouad|Elkoury%%* (2011). Assez courtes de prime abord, ces expositions soulignent néanmoins un fondement de son ADN : la rencontre et la collaboration. Outre les expositions déployées dans les grandes salles, une grande quantité de projets prennent également place au sein de Rayon Art/Objets[^70] et de la %%Galerie-Découverte%%. Plus expérimentaux, ces deux espaces liés à une modeste activité économique permettent la découverte de nombreux artistes. %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%% est le premier espace traversé lorsque l’entrée publique de l’ donne sur le %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%. Attenant à %%Rayon Art/Librairie%%, cet espace présente des œuvres artistiques de petites dimensions : sculptures, bijoux contemporains, objets en porcelaine, en émail, etc. Le travail de deux ou trois artistes y cohabite le temps d’une exposition qui dure en moyenne deux mois. La %%Galerie-Découverte%% est un espace d’exposition consacré aux jeunes artistes de la Communauté française. Entre sa création en 2000, sa transformation en 2006[^71] et sa mutation en 2011, cet espace de diffusion apporte à lui seul de la visibilité au travail de 70 artistes. ### Une direction scientifique et des prises de parole La fondation de l’ découle d’une volonté d’étudier et d’enseigner différents pans de l’histoire de l’art. Il s’agit de sa principale activité entre 1971 et 1994, avant qu’il se consacre entièrement à l’édition entre 1994 et 1999. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% choisit l’indépendance et écarte tout système susceptible de transformer l’ en école officielle, notamment en diversifiant les activités qui y sont menées. Sur ce plan également, l’ doit se repositionner au sein d’un secteur en transformation. Ses cours d’histoire de l’art, contemporain ou non, sont dorénavant disséminés parmi les initiatives d’universités, d’écoles supérieures d’art ou d’autres lieux de diffusion artistique. Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%%, à titre de directeur scientifique de l’, développe une programmation qui permet d’explorer des problématiques propres à l’art contemporain au profit de publics variés. En marge des cours structurés en fonction du statut de leur contenu – initiation, fondamental, recherche –, les grandes conférences offrent un beau panorama des préoccupations de l’, tant par la qualité des interlocuteurs que par celle des sujets abordés. Entre 2004 et 2010, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% accueille plusieurs grands noms associés à la réflexion sur l’art, dont Bernard %%Stiegler, Bernard|Stiegler%%, Alain %%Fleischer, Alain|Fleischer%%, Paul %%Ardenne, Paul|Ardenne%%, Régis %%Cotentin, Régis|Cotentin%%, Christian %%Ruby, Christian|Ruby%%, Marc %%Jimenez, Marc|Jimenez%%, Catherine %%Millet, Catherine|Millet%%, %%Michaud, Yves|Yves Michaud%%, Georges %%Didi-Huberman, Georges|Didi-Huberman%%, Norbert %%Hillaire, Norbert|Hillaire%%, Thierry %%Davila, Thierry|Davila%%, %%Michaud, Éric|Éric Michaud%%, Bernard %%Marcelis, Bernard|Marcelis%%, Jacques %%Donguy, Jacques|Donguy%%, %%Bastin, Olivier|Olivier Bastin%%, %%Audi, Paul|Paul Audi%%. Ces penseurs partagent l’état de leurs recherches sur le statut et la fonction de l’objet d’art, la théâtralisation, l’enrobage et les limites du corps, l’esthétique, les nouvelles technologies et l’espace public, entre autres. Autant de sujets qui confirment l’inscription de l’ dans un réseau de circulation des savoirs. À travers les activités du directeur scientifique, l’ se démarque surtout par ses colloques internationaux, dont les actes sont publiés en collaboration avec la maison d’édition %%La Lettre Volée%%. Ces évènements de réflexion de deux jours, généralement reconduits tous les deux ans, permettent d’approfondir des aspects de l’art contemporain. Assez descriptifs, les titres des colloques à eux seuls révèlent les sujets examinés : « Exposer l’image en mouvement : de la grammaire spatiale à la production de contenu » (2003), « Le sens de l’indécence : la question de la censure des images à l’âge contemporain » (2004), « Les formes contemporaines de l’art engagé : de l’art contextuel aux nouvelles pratiques documentaires » (2006), « Spéculations spéculaires : le reflet du miroir dans l’image contemporaine » (2008), « Aborder les bordures : l’art contemporain et la question des frontières » (2010), « Hors-cadre : peinture, couleur et lumière dans l’espace public contemporain » (2012). Ces colloques voient le jour sous la direction d’Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%%, mais sont le fruit de précieuses collaborations. « Les formes contemporaines de l’art engagé » bénéficie du concours de l’École de recherche graphique (Erg), %%Culture et démocratie%%, la fondation %%Fondation Marcel Hicter|Marcel Hicter%% et Vox/Polymorfilms. Les actes de ce colloque se divisent en deux parties nourries par près de trente auteurs : « Engagement et positions théoriques », « Engagement et pratique artistique ». On y perçoit une articulation entre la théorie et la pratique qui est dans l’air du temps : deux ans auparavant, en mars 2004, la création du décret de %%Bologne%% entraînait l’alignement de tous les types d’enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (universités, hautes écoles, écoles supérieures d'art, établissements d’enseignement de promotion sociale) sur un modèle commun à l’échelle européenne. Ce modèle structure l’enseignement supérieur en trois cycles distincts, soit le bachelier, le master et le doctorat. Cette réforme de l’enseignement supérieur mène à la création d’un doctorat en art et sciences de l’art, développé conjointement entre les écoles supérieures d’art et les universités. Les pratiques artistiques et scientifiques se rapprochent au sein d’un parcours académique, lequel est largement commenté par les critiques, historiens et théoriciens de l’art, les artistes, les enseignants et autres acteurs du milieu culturel. L’ évolue en dehors du système académique et n’est donc pas affecté directement par cette transformation du système éducatif belge. Son statut d’institut de recherche indépendant lui épargne ces complications. Toutefois, ce phénomène socioculturel ne tarde pas à se refléter dans la programmation de l’. La recherche prend majoritairement deux formes au sein des activités menées à l’. D’une part, on invite différents acteurs à présenter leurs travaux de recherche personnels dans le contexte de cours qui y sont dispensés. Liés à l’Institut ou indépendants, ces acteurs évoluent dans le milieu de l’histoire de l’art, de la culture au sens large, ou d’une autre science humaine. D’autre part, on soutient la recherche à travers les services d’un centre de documentation depuis l’année académique 1976-1977. Au départ, le centre de Documentation des arts visuels actuels (DAVA) contient un département d’information, une diathèque, une sonothèque et une bibliothèque. Cette dernière regroupe des ouvrages de base sur les arts anciens et extra européens, ainsi que des ouvrages généraux, encyclopédies, monographies, écrits d’artistes, catalogues d’expositions, revues d’art internationales, dossiers d’artistes portant sur les arts visuels contemporains. Durant les années 1980, le centre est régulièrement promu dans le programme annuel. On cherche à l’enrichir en sollicitant des dons de catalogues, de livres et de revues traitant des arts visuels contemporains. Pour remercier la générosité des donateurs, on propose même de créer un fonds à leur nom. Par ailleurs, les auditeurs prenant part au programme d’activités sont invités à s’y rendre pour s’approprier et approfondir les savoirs acquis. À la fin des années 1990, les historiens de l’art liés à l’ restructurent l’organisation de son contenu. Le centre de documentation traverse une importante étape de son développement en 2004 lorsqu’il est bonifié par la %%Communauté française du fonds documentaire du Centre d’art contemporain|Communauté française du fonds documentaire%% du %%Centre d’art contemporain%% (63 avenue des %%Nerviens, avenue des|Nerviens%%, Bruxelles) suite à sa fermeture. Par la suite, un historien de l’art de l’ gère et développe une collection de documents spécialisés en « art environnemental » en ses locaux, et Michèle %%Stanescu, Michèle|Stanescu%% gère une collection de documents consacrés à l’art moderne et contemporain conservée dans le bâtiment de l’avenue des %%Nerviens, avenue des|Nerviens%%. Un tri des ouvrages et une fusion des catalogues sont opérés, mais la gestion en deux lieux est maintenue jusqu’en 2011. Michèle %%Stanescu, Michèle|Stanescu%% est documentaliste au centre de documentation du %%Centre d’art contemporain%% de 1984 à 2004 avant d’intégrer l’équipe de l’ en 2005. Elle y apporte un savoir et une expérience conséquents en collaborant avec les historiens de l’art engagés dans l'Institut, et en contribuant à la gestion de ses ressources documentaires. Documentaliste de formation, elle développe des dossiers d’artistes (tâche initiée par le Service des arts plastiques de la Communauté française), des mallettes pédagogiques et soutient activement ses lecteurs.

Médiation et co‑construction de sens

2010-2020

Longtemps assimilé à une école, l’ a toujours eu le souci d’introduire l’art contemporain auprès du plus grand nombre de publics possibles afin de rétrécir le fossé historique qui les tient à distance, de leur donner des clés pour aborder le monde autrement. Le projet social annoncé dans les années 1970, « étudier les œuvres d’art pour mieux comprendre son époque », se décline en cycles de cours au fil de ses quarante premières années. Au départ, il faut *initier*, *éduquer* et *démocratiser*. Le mode de fonctionnement de l’Institut est calqué sur le modèle académique. À partir de 2010, après quelques essais et erreurs, la volonté de *faire école* prend corps à travers des activités pédagogiques et des collaborations directes avec des écoles existantes. Au fil des années, des historiens de l’art de l’ plus ou moins sensibles au contact avec les publics prennent des initiatives. Les activités pédagogiques visent de nouveaux publics et s’engagent auprès d’écoles et d’associations pour développer des programmes d’activités qui correspondent à leurs besoins. C’est ainsi qu’en 2006, un atelier de sensibilisation à l’art public conduit une classe de sixième secondaire à rédiger un appel d’offres pour la réalisation d’une œuvre à l’Institut %%Institut Saint-Louis|Saint-Louis%%. L’œuvre, conçue par l’artiste Jean-François %%Octave, Jean-François|Octave%%, est réalisée en concertation avec les élèves. Les activités pédagogiques commencent à quitter l’auditorium et à faire l’objet de partenariats. Des visites guidées d’expositions – à l’ ou en d’autres lieux culturels – sont toujours offertes mais ne constituent plus une forme unique. Ce secteur d’activité gagne beaucoup d’importance en 2009 : « L’art contemporain continue à susciter méfiance et scepticisme auprès du grand public. Pourtant les créateurs d’aujourd’hui vivent dans le même contexte que nous et posent, avec les moyens actuels, des questions qui nous concernent tous et toutes. Pour permettre au plus grand nombre d’aborder les enjeux de l’art contemporain, l’ propose aux écoles, associations et entreprises des conférences illustrées conçues sans hermétisme dans un souci d’échange et de dialogue. »[^73] La mise en place de ce nouveau champ d’activité, de plus en plus affirmé, accompagne le changement de statut d’Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% qui devient directeur général suite au départ d’Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%%. À ce moment-là, il réorganise le travail en *pôles* (« Recherche », « Expositions », « Médiation »). Les activités pédagogiques sont rassemblées dans le pôle « Médiation », qui inclut essentiellement des cours, des séminaires, des conférences, des conversations et des projections. De manière plus ponctuelle, on y ajoute des colloques, des festivals, des visites guidées, des excursions et des voyages culturels. Ce pôle est assurément celui qui englobe la plus grande diversité d’activités. À travers celui-ci, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% – intégré à l’équipe de l’ en 2003 – et Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% – qui rejoint l'Institut en 2010 – s’engagent à développer des projets qui tissent des liens avec les publics, notamment avec les écoles. À cette époque, les cours ne sont plus identifiés en fonction du statut de leur contenu (initiation, approfondissement, remise en question), mais en fonction de leur horaire. La durée des cycles rétrécit et le terme « cours » est parfois remplacé par « conférence ». L’abandon des catégories historiques joue en faveur d’une réactualisation des modes de communication et permet un décloisonnement salutaire. Dorénavant, les auditeurs n’ont plus à positionner leur niveau de connaissances en découvrant le programme de l’. À l’aube du quarantième anniversaire, l’expression « , faculté ouverte » est toujours d’actualité. D’autant plus qu’il ne faut désormais plus être membre de l’Institut pour y suivre un cours. Ces modifications dans la programmation s’accompagnent d’une tentative de redéfinition identitaire. Une expression fait son apparition sur les communications à la fin des années 2000 : « Histoire de l’art et art contemporain ». L’adoption de cette « maxime » remet, d’une certaine manière, le long nom de l’ au goût du jour. L’expression « langage plastique », légitime et justifiée dans les années 1970, jure désormais. La nouvelle génération – visée par la programmation – manque de référents pour interpréter le sens de cet archaïsme. On réussit à réactualiser le fond et la forme du programme d’activité, mais on choisit de conserver l’intitulé « Institut supérieur pour l’étude du langage plastique », qui porte quarante ans d’histoire. Le slogan « Voir et comprendre l’art contemporain » complète le sous-titre. « En montrant et en expliquant la création actuelle, l’ contribue à la diffusion de la culture contemporaine et à la compréhension de notre présent à l’aide du regard porté par les artistes sur le monde d’aujourd’hui. »[^74] Plusieurs changements adviennent à cette époque. Par exemple, le Festival du film sur l’art, réservé jusqu’alors aux membres, est ouvert au grand public à l’occasion de son dixième anniversaire, en 2010. Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% en reprend la coordination et l’associe, dès l’année suivante, à la remise de deux prix : le Prix découverte (1 250 euros) et le Prix du Film sur l’art (1 750 euros). Cet événement rassembleur prend beaucoup d’importance par la suite, grâce à une collaboration fertile avec le %%Centre du film sur l’art%%. Bientôt, le festival, renommé BAFF – %%BAFF – Brussels Art Film Festival|Brussels Art Film Festival%%, sera accueilli à Bozar, à %%Cinematek%%, voire à la %%Koninklijke Academie voor Schone Kunsten (KASK)|KASK%% à Gand et au %%Plaza|Plaza%% à Mons. ### Un généreux 40e anniversaire L’ se replonge dans les travaux de rénovation à la fin de la décennie grâce au soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles, emphytéote des bâtiments. Ces travaux donnent lieu à une extension et une modification d’une aile du bâtiment des anciennes écuries du palais %%Palais d’Egmont|d’Egmont%% d’après les plans initiaux des mêmes architectes, Brigitte %%Libois, Brigitte|Libois%% et Daniel %%Lelubre, Daniel|Lelubre%%. Les deux bâtiments situés de part et d’autre du %%Milan, passage de|passage de Milan%%, reliés au-dessus du porche attenant au parc d’Egmont, permettent à l’équipe de l’ de réaménager ses bureaux et de redéployer sa grille d’activités au sein de nouveaux espaces après une fermeture publique de quatre mois. À l’automne 2011, l’ profite de son quarantième anniversaire pour dévoiler ses locaux. Parmi les changements majeurs, on note que le centre de documentation est installé dans la nouvelle aile. Deux niveaux supérieurs accueillent les étagères et la salle de lecture. Les fonds précédemment conservés à l’ et sur l’avenue des %%Nerviens, avenue des|Nerviens%% sont enfin rassemblés en un seul endroit, et bonifiés à nouveau. On leur ajoute un fonds traitant d’arts plastiques offert par la Fédération Wallonie-Bruxelles, et un fonds développé par %%Contretype%% et déposé à long terme à l’[^75]. Grâce aux efforts conjugués d’Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% et de ses collaborateurs, le centre de documentation regroupe dorénavant quatre collections de documents et représente un organe de recherche majeur. Le niveau inférieur de cette nouvelle aile est dégagé pour constituer une nouvelle salle d’exposition : l’atelier. Celui-ci est dédié à accueillir des plasticiens, mais également des artistes du monde du spectacle, de la performance, de la vidéo, de la danse et de la musique. Il est propice à l’expérimentation, tant sur le plan de la production que sur celui de la diffusion. Il accueille des workshops et des répétitions, mais surtout des artistes en résidences. Ces derniers l’investissent durant des périodes de trois mois, le temps de développer un projet et d’expérimenter son rapport avec un public lors d’une ouverture publique. Dès le printemps 2012, sous la direction d’Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%%, le programme de résidences artistiques permet de soutenir le travail de Sébastien %%Reuzé, Sébastien|Reuzé%%, Fabrice %%Samyn, Fabrice|Samyn%%, Cie %%Cie t.r.a.n.s.i.t.s.c.a.p.e|t.r.a.n.s.i.t.s.c.a.p.e%%, Emmanuel Van der Auwera, Aurore %%Dal Mas, Aurore|Dal Mas%% & Sandrine %%Morgante, Sandrine|Morgante%%, Adrien %%Lucca, Adrien|Lucca%%, Anne %%Penders, Anne|Penders%%, %%Chenut, Vincent|Vincent Chenut%%, Priscilla %%Beccarri, Priscilla|Beccarri%%, %%Bara, Manon|Manon Bara%%, Loïc %%Desroeux, Loïc|Desroeux%%, Robert %%Milin, Robert|Milin%%, Les %%Disparues, Les|Disparues%% (Aleksandra %%Chaushova, Aleksandra|Chaushova%%, Judith %%Duchêne, Judith|Duchêne%%, Teodora %%Cozman, Teodora|Cozman%%, Clara %%Sobrino, Clara|Sobrino%%), Yogan %%Muller, Yogan|Muller%%. Dans le même esprit, cet espace voit également défiler des jurys de fin d’année des écoles supérieures artistiques telles que %%Erg — ESA|l’Erg%%, %%Saint-Luc — ESA|Saint-Luc%%, %%Le 75 — ESA|le 75%%, l’%%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%, %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%. En cela, cet atelier touche définitivement l’émergence. Cet espace de diffusion de projets en cours de développement enclenche un cercle vertueux : il fournit un laboratoire et une vitrine aux jeunes artistes et constitue une bonne source de découvertes pour les historiens de l’art de l’ qui s’intéressent aux nouvelles tendances, aux nouvelles démarches artistiques. Le pôle « Exposition », essentiellement représenté par Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%% et Adèle %%Santocono, Adèle|Santocono%%, gère dorénavant cinq espaces d’exposition : la galerie, le studio, l’atelier, %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%%, l’espace de restauration *%%Au Passage de Milan%%*. À ces différents espaces s’ajoutent parfois des projets dans le %%Egmont, Parc d’|parc d’Egmont%% et *extra-muros*. L’Institut organise une panoplie d’activités pour marquer son quarantième anniversaire. Durant l’automne, il présente l’exposition *Célébration(s)* dans l’ensemble de ses salles : « l’ est traversé par le thème de la célébration et ses déclinaisons allant de la fête à l’anniversaire, du divertissement à la cérémonie, de l’enthousiasme d’une liesse collective à la mémoire et au souvenir. » Les membres de l’équipe de l’, les artistes et les visiteurs célèbrent la pérennité de la structure durant quatre journées festives suivant le vernissage. Les initiatives se multiplient : quarante textes sur l’art sont lus lors d’un marathon, quarante films sur la célébration sont projetés. En outre, une installation vidéo présentant quarante portraits d’artistes, de conférenciers et de visiteurs, réalisés par André %%Goldberg, André|Goldberg%% à partir d’entretiens individuels, révèle des réflexions critiques sur l’art contemporain. Hormis cette programmation spéciale qui constitue un temps fort pour l’, la création du programme de résidences artistiques et d’un concours visant l’intégration d’une œuvre dans l’espace de restauration constituent des initiatives plus pérennes. Effectif de 2011 à 2015, ce concours permet à cinq jeunes artistes de profiter d’un an de visibilité à l’ : Frédéric %%Penelle, Frédéric|Penelle%%, %%Obêtre%%, Sofi %%Van Saltbommel, Sofi|Van Saltbommel%%, Patrick %%Guns, Patrick|Guns%% et %%Bouvier, Amélie|Amélie Bouvier%%. Épaulé par une coordination générale et des soutiens logistiques, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% se donne le rôle d’ambassadeur des missions et des projets de l’ auprès des pouvoirs publics. Il veille sur tous les aspects qui permettent la programmation. Il valide les projets proposés et assure leur suivi et leur développement, mais offre une grande liberté à ses collaborateurs. Les cinq historiens de l’art se concentrent sur leur pôle (médiation, exposition, recherche) et la programmation. À cette époque, les historiens de l’art liés à l’[^77] deviennent des *programmateurs* au sens événementiel : ils programment des conférences, des rencontres, des ateliers, des journées d’étude, des visites guidées et des stages pour enfants, diverses activités pédagogiques et des expositions. Un changement majeur advient : chacun d’entre eux est invité à proposer et organiser des projets d’exposition. À partir du moment où ils ont l’occasion de délaisser un peu leur pôle pour organiser une exposition, les historiens de l’art travaillant à l’ en profitent. Ils y révèlent leur personnalité, leurs préoccupations et leurs champs d’intérêt. Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%%, impliquée dans la production d’expositions depuis 2003, demeure responsable de ce pôle. Elle organise dorénavant ses propres projets dont *Et le monde est plongé dans la pénombre* (2013 – Lise %%Duclaux, Lise|Duclaux%%), *Failure Falling Figure* (2015 - Agnès %%Geoffray, Agnès|Geoffray%%), *L’Image qui vient* (2016, en collaboration avec Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%), *\#Institut. Table of Content* (2017), *SYNC !* (2017), *Babel* (2019, en collaboration avec Mélanie %%Rainville, Mélanie|Rainville%%). Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% organise *Flesh* (2009/2011), *Exonymie* (2010), *ARCHIVES/déplier l’histoire* (2014) et *A Forest* (2018). Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% organise *%%Bonom%%, le singe boiteux* (2014), ainsi que *Being Urban. Laboratoire pour l’art dans la ville* (2015), en collaboration avec Pauline de La %%La Boulaye, Pauline de|Boulaye%%. Anne-Esther %%Henao, Anne-Esther|Henao%% organise *Christophe %%Terlinden, Christophe|Terlinden%%. No Sugar* (2014). %%Cheval, Florence|Florence Cheval%% organise *Hostipitalité* (2015) et *%%Balcou, Béatrice|Béatrice Balcou%% / Kazuko %%Miyamoto, Kazuko|Miyamoto%%* (2016).[^78] L’historien de l’art qui présente *son* projet veille dorénavant sur tous ses aspects, du concept de base au programme d’évènements qui l’accompagne. Il profite parfois d’une certaine collégialité, mais il a le dernier mot sur les choix. Ces expositions rivalisent d’originalité. Cette vague d’enthousiasme reflète la reconnaissance institutionnelle de la figure du curateur perceptible dans le milieu artistique. Les formations et les discours critiques sur l’exposition se développent : le Postgraduate Curatorial Programme (1999) à la %%KASK|KASK%% (Gand), le Master en design urbain avec une spécialité en design d’exposition – %%MASDEX%%[^79] (2014) à %%Arts²%%, le Master en pratiques de l’exposition – %%CARE%% (2015) à l’%%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%-EsA (Bruxelles). Ces formations, qui existent depuis longtemps au sein d’autres pays, sont à la fois l’indice et l’effet d’un engouement pour les métiers entourant la mise en public d’œuvres. Elles forment des spécialistes de l’exposition qui tentent de se frayer un chemin dans un monde professionnel relativement hostile compte tenu des conditions d’emploi précaires qu’il offre, notamment en raison du petit nombre de postes permanents disponibles dans les lieux de diffusion existants. Elles développent un secteur professionnel fragile, mais encouragent également une précieuse créativité dans la mise en exposition. En 2013, l’Institut s’associe au réseau transfrontalier d’art contemporain %%50 degrés Nord%%, qui fédère des lieux de diffusion d’art contemporain distribués de part et d’autre de la frontière franco-belge. Par cette association, l’ entérine sa présence au sein d’un réseau d’organisateurs d’expositions. Il accepte qu’il y ait comparaison, compétition et course vers l’augmentation du nombre annuel de visiteurs d’expositions. Devant rendre des comptes à ses subventionnaires, d’ailleurs, l’ commence à rigoureusement compter ses visiteurs. On sait dorénavant qu’une exposition collective attire en moyenne 1 500 visiteurs, tandis qu’une exposition individuelle attire en moyenne 1 400 visiteurs[^80]. Malgré ces moyennes, une exposition individuelle bat tous les records de fréquentation en 2014 : *%%Bonom%%, le singe boiteux* attire 14 000 visiteurs. Les statistiques de fréquentation sont considérées dans l’organisation des activités, les prises de risques sont mesurées : l’ commence à soutenir plus régulièrement des artistes établis. Les expositions organisées par les programmateurs de l’ sont ambitieuses, mais elles ne résument pas à elles seules les missions poursuivies. Au-delà de cette activité publique qui s’inscrit dans une durée plus importante que les cours ou les conférences, entre autres, plusieurs initiatives ciblées sont invisibles aux yeux des publics. Les nombreuses activités menées auprès de groupes d’élèves constituent de bons exemples. Entre 2012 et 2014, l’ entretient un partenariat avec %%Indications ASBL%%, qui se consacre à la sensibilisation artistique et à la sollicitation de l’esprit critique des jeunes. Dans ce contexte, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% et Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% rendent visite à des groupes scolaires pour discuter d’œuvres contemporaines et de leur portée. Les élèves sont ensuite invités à se confronter à des expositions présélectionnées et à remettre un prix à celle qui leur semble la plus percutante. Ce projet donne lieu à des échanges stimulants pour tous. Dans le même ordre d’esprit, l’atelier attenant au centre de documentation représente un laboratoire de production et de diffusion important pour les jeunes artistes. Il permet une programmation souple et accueille aussi bien des artistes en résidence que des projets d’étudiants. En 2013, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%, Jérôme %%Piron, Jérôme|Piron%%, Arnaud %%Hoedt, Arnaud|Hoedt%%[^81] et Olivier %%Cornil, Olivier|Cornil%% (respectivement programmateur à l’, professeurs et photographe) partent pour un voyage d’une semaine dans la %%Ruhr%% avec deux classes de 7e technique de l’Institut %%Institut Don Bosco|Don Bosco%%. Les étudiants découvrent une région industrielle, sont initiés aux techniques de prise de vue photographiques et visitent des expositions. Ils échangent quotidiennement au sujet des images capturées, d’une sélection et de ses potentielles mises en forme. Le fruit de leurs efforts prend place dans l’atelier de l’ à travers une exposition : *Die Welt ist Schön*[^82] (*Le monde est beau*). Cette intervention polymorphe menée par Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% et ses collaborateurs confond trois champs d’activités de l’, soit les ateliers dans les écoles, les voyages et les expositions. En élargissant l’horizon des étudiants, elle répond à la mission première de l’Institut : établir une connexion entre l’art – ou l’histoire de l’art – et des publics et agir comme intermédiaire au besoin. En mars 2015, tandis qu’Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% se consacre à l’organisation du Festival du film sur l’art et à l’art public, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% embauche Pauline %%Hatzigeorgiou, Pauline|Hatzigeorgiou%% (%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%%, %%Université catholique de Louvain (UCL)|UCL%%) à titre d’historienne de l’art et programmatrice associée à la médiation. Son arrivée à l’ donne une nouvelle impulsion à la médiation et aux liens avec les écoles. Elle conçoit notamment le projet %%Passerelle%%. Il s’agit d’une importante collaboration entre les programmes d’agrégation des écoles supérieures d'art francophones de %%Bruxelles%% (%%Erg — ESA|Erg%%, ESA-%%Saint-Luc — ESA|Saint-Luc%%, %%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%-ESA, %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%), plusieurs enseignants au sein de sections non artistiques d’écoles secondaires qualifiantes et le pôle Médiation de l’. Ce projet invite des étudiants en agrégation des arts plastiques à réaliser un stage avec un groupe d’étudiants qui ne rencontrent pas de questions culturelles dans leur parcours scolaire habituel. Dans le contexte de ce programme, ces derniers sont régulièrement plongés au cœur de manifestations artistiques et d’échanges d’idées portant sur la culture durant une année entière. Pauline %%Hatzigeorgiou, Pauline|Hatzigeorgiou%% conçoit ce projet pour provoquer des points de rencontre et d’échange entre la pédagogie, la médiation culturelle et la pratique artistique. Elle souhaite pointer les points communs entre ces trois sphères d’activité, à savoir « (…) la transmission et les problématiques associées aux réceptions des objets de savoir comme de culture, par les sujets auxquels elle s’adresse ».[^83] Plusieurs années après sa création, le projet %%Passerelle%% rencontre chaque année les besoins et les envies de participants. L’historienne de l’art participe également à des événements critiques par rapport à l’éducation artistique. Le 5 novembre 2016, elle se joint à Sébastien %%Marandon, Sébastien|Marandon%%[^84] et Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% pour proposer une lecture de l’ouvrage *Le Maître ignorant, cinq leçons sur l’émancipation intellectuelle* (1987), de Jacques %%Rancière, Jacques|Rancière%%, qui est tout à fait en phase avec ses réflexions. Les trois interlocuteurs examinent la réflexion philosophique et politique que l’auteur développe sur l’éducation à travers la biographie du pédagogue révolutionnaire Joseph %%Jacotot, Joseph|Jacotot%%. Quelques jours plus tard, ses champs d’activités sont également sollicités lors d’une « Mise au point / Table ronde » intitulée « Ils ne savent pas ce qu’ils font » (16 novembre 2016). %%Barbery, Géraldine|Géraldine Barbery%%, Sébastien %%Marandon, Sébastien|Marandon%% et Marie-Émilie %%Ricker, Marie-Émilie|Ricker%% confrontent leurs conceptions de la médiation artistique et discutent de problématiques qui la concernent ; ils ont la difficile tâche de dresser un état des lieux de la médiation. L’ continue d’offrir des projets de médiation sur mesure aux écoles. Les professeurs sont invités à formuler leurs souhaits concernant la temporalité, le sujet et la forme des interventions, à accueillir les médiateurs au sein de leur groupe, en classe ou à l’. Ce service à la carte donne lieu, entre autres, à plusieurs ateliers. Le « Monument à la jeunesse » (*Nous commun*), installé au %%CERIA%% et inauguré le 23 juin 2017, découle de ce service « à la carte ». Dans ce contexte, des élèves de 5e secondaire de l’Institut %%Institut Émile Gryson|Émile Gryson%% travaillent avec l’artiste Chiara Colombi, sous la responsabilité de Pauline %%Hatzigeorgiou, Pauline|Hatzigeorgiou%%, pendant plusieurs mois. Au terme de ce projet, une sculpture est installée sur le campus de %%Bruxelles%%. ### Réactualisation d’une identité institutionnelle Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% quitte la direction de l’ en décembre 2015. Ses quinze années de présence à l’Institut ont permis aux activités scientifiques de prendre de l’ampleur. Il a réactualisé l’image et l’identité de l’ dans la continuité de son histoire. Sous sa direction, le modèle de gestion gagne en clarté et en démocratie. Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% est la quatrième directrice de l’ (janvier 2016). Docteure en histoire de l’art, elle publie de nombreux articles au sein de revues spécialisées, ainsi que *Der Beuys Komplex – l’identité allemande à travers la réception de l’œuvre de %%Beuys, Joseph|Joseph Beuys%% (1945-1986)* en 2010. Elle enseigne l’histoire de l’art et organise plusieurs expositions avant de diriger l’%%Musée d’Art Contemporain de la Communauté Germanophone de Belgique (IKOB)|IKOB%%-Musée d’art contemporain de la Communauté germanophone de Belgique de 2013 à 2015. Elle se joint à l’équipe de  avec des intentions claires : elle souhaite l’imposer au cœur d’un réseau de réflexion critique et de recherche en art contemporain. Elle relève un problème de compréhension publique des missions et des activités de l’ pouvant être dû à la diversité de manifestations proposées, ainsi qu’à une étiquette d’*école* qui remonte à ses premières années d’existence, mais persiste dans l’imaginaire collectif. Selon elle, il importe de réduire et de clarifier les champs d’action de l’Institut qui, à l’époque, comprennent aussi bien des cours ou des conférences d’initiation à l’histoire de l’art (une forme d’éducation permanente qui rappelle le passé de la structure) que des conférences spécialisées en art contemporain. Une modification des activités et de l’image de l’ semble nécessaire pour le repositionner dans le monde de l’art contemporain. Elle se familiarise avec le microcosme et organise des discussions collectives au sein de son équipe pour travailler sur la définition identitaire de l’Institut. Qu’est-ce que l’ ? Quelles sont ses forces ? Comment peut-il se positionner dans le secteur de l’art contemporain actuel ? Prévu pour clarifier la nature de la structure, ce travail d’introspection institutionnelle s’extériorise de diverses manières. Le chantier est rendu public, notamment à travers des communications. À partir du 1er septembre 2016, les changements se succèdent rapidement. La brochure du premier quadrimestre de l’année académique 2016-2017 donne le ton. La page de couverture affiche désormais un nouveau logo. Le cercle orangé contenant l’acronyme «  » et le slogan « Voir et comprendre l’art contemporain » est substitué par l’expression « #Institut », écrit en noir sur blanc. Ce nouveau logo devient un *label*, indice et symbole du statut d’*institut* de l’. Ni école, ni centre d’exposition, il s’agit d’une plate-forme de réflexion et de recherche, d’un laboratoire qui rend l’expérimentation possible à travers des tentatives fructueuses ou non, des nouveaux formats d’activités souhaités plus englobants. Un échantillonnage de caractères d’imprimerie de différentes tailles et polices est réparti autour du logo. On pourrait croire à un nuancier de graphiste. La charte graphique est renouvelée. Nouveau format, nouvelle mise en page, trilinguisme, nouvelle terminologie. Dorénavant, les vernissages cèdent la place aux *activations* et le nom commun *médiation* se transforme en verbe au besoin. L’art contemporain doit être *médié*. La nouvelle image de l’ est accompagnée d’une tentative de clarifier son spectre d’activités aux yeux des publics. Une thématique annuelle crée un fil rouge entre les expositions, les conférences, les tables rondes, les résidences artistiques, entre autres. Une synergie est recherchée. Stimulant sur le papier, le projet bouscule des habitudes au sein de l’équipe et des publics. Les activités relevant de l’initiation sont écartées. La nouvelle grille horaire calquée sur les grands centres d’art contemporains internationaux effrite une histoire institutionnelle. En concertation avec son équipe, Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% associe la programmation de l’année académique 2016-2017 à la notion de communauté. Ce choix évoque l’intérêt de la directrice envers les réseaux d’acteurs de terrain. Au contraire de ses prédécesseurs qui invitaient surtout des historiens et des théoriciens de l’art à prendre la parole devant les auditeurs, elle invite et collabore régulièrement avec des curateurs d’expositions et des directeurs de lieux de diffusion, par exemple. De nouveaux points de vue émergent grâce à ces mises en contact. Le cycle d’expositions « #Institut » décline ses trois volets entre le 7 octobre et le 24 décembre 2016. La mise en relation d’une quinzaine d’œuvres dévoile les nouveaux contours éditoriaux de l’. Dès le début de l’année suivante, le collectif %%Messidor%%, premier lauréat du prix %%Connectif, Prix|Connectif%%[^86], rassemble ses œuvres au sein de l’exposition *Some Arguments Later* à l’issue de sa résidence à l’. Les trois volets de « SYNC  ! » réunissent des collectifs d’artistes invités à dialoguer sur ce que génère la notion de collectivité. Réalisé en collaboration avec %%ARGOS ASBL|ARGOS%%, « COM∩∪TIES » (23 septembre – 17 décembre 2017) prend place en deux lieux. Dans ce contexte, Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% et Ive %%Stevenheydens, Ive|Stevenheydens%% (ARGOS) sélectionnent des films et des vidéos en fonction de quatre catégories intitulées « Urbanité », « Sociabilité », « Politique », « Environnement ». Ils organisent leur diffusion au cœur de dispositifs d’exposition conçus par le duo d’artistes belges %%Sarah & Charles%%, et installés dans leurs institutions respectives. Le dispositif de l’ occulte l’architecture intérieure et prend la forme d’un écran de cinéma classique. Il évoque l’importance de l’espace communautaire engendré par le cinéma au XXe siècle. Celui d’%%ARGOS ASBL|ARGOS%% réfère plutôt au salon du XIXe siècle. Dans les deux cas, les sélections d’œuvres projetées changent toutes les trois semaines. L’année suivante débute avec le colloque « COM∩∪TIES. Seuils/Drempels/Thresholds » (25 – 28 janvier 2018). À son issue, Béatrice %%Delcorde, Béatrice|Delcorde%% rassemble les œuvres qu’elle a élaborées durant une résidence à l’ : l’exposition *On sort en bande, Labor of Love, Salad jours* clôture les investigations collectives sur la notion de communauté. Toutes ces expositions sont accompagnées de programmes de conférences et de performances liées à leur contenu. Entre septembre 2016 et avril 2018, Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% assiste à l’élaboration, la coordination, au montage et au démontage de trois expositions en trois ou quatre volets et deux expositions de forme traditionnelle. Cela équivaut à un cumul de douze expositions en dix-sept mois d’ouverture publique. Ces expositions s’ajoutent à l’édition de la revue *Patch*, dont le premier numéro[^89], coédité par %%Cheval, Florence|Florence Cheval%%, Franz %%Drakkar, Franz|Drakkar%% et Yoann Van Parys, synthétise les idées émergeant *durant* et *autour* du cycle « #Institut ». Durant la même période, les modalités du programme de résidences artistiques mis en place en 2011 sont revues et le prix Hors-d’œuvre est remplacé par le prix %%Connectif, Prix|Connectif%%. Si la multiplication des projets provoque un brassage d’idées foisonnant, elle a l’inconvénient d’essouffler ceux qui en sont à l’origine. Dans ce contexte, l’initiation, la consignation et la transmission d’idées sont affectées ; la notion de communauté ne s’enracine pas dans la construction d’un savoir. Cette cadence était peut-être nécessaire pour entraîner un changement de fond dans la structure, mais personne n’y était véritablement préparé. Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% quitte l’ au printemps 2018. ### Œuvrer au bénéfice des publics Arrivé à l’ à titre d’historien de l’art en 2010[^90], Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% connaît le passé et le présent de l’ avant d’en imaginer le futur. Directeur à partir du printemps 2018, il choisit d’abandonner toutes velléités de programmation et de laisser beaucoup de liberté à ses collaborateurs. Si son travail éditorial consiste à créer des ponts entre les divers champs d’activité, il insuffle pourtant l’une de ses principales préoccupations par rapport à l’art contemporain dans la grille d’activités de l’ : la médiation. Le fil conducteur entre les champs d’activités se trouve dans la manière de communiquer *durant* et *autour* des différentes manifestations. Il réintègre des cours d’initiation à l’histoire de l’art contemporain dans le programme. Quelques mois à peine après son arrivée, il programme un projet du duo %%Denicolai & Provoost|Denicolai & Provoost%% intitulé « Banquet des dix gâteaux » ou « Tien Taarten ». %%Denicolai, Simona|Simona Denicolai%% et %%Provoost, Ivo|Ivo Provoost%% travaillent en duo, à Bruxelles, depuis 1997. Leur pratique multidisciplinaire privilégie les processus, courts ou longs, et implique des acteurs étrangers au monde de l’art. À l’, le 26 juin 2018, ils présentent l’aboutissement d’un projet initié et soutenu à Genk par la %%Kunstcel%% dans le contexte du « Pilootprojecten Kunst in Opdracht », en 2015. Les artistes dévoilent dix gâteaux. Leur forme est élaborée suite à des discussions approfondies avec des habitants ou collectifs de Genk ayant fait la demande d’un monument dans la ville. Chacun de ces gâteaux évoque un monument désiré, lié à un événement majeur de l’histoire de la ville, de la résistance durant la Seconde Guerre mondiale à la fermeture des mines puis de Ford Genk. Offerts à la dégustation, ils sont rassembleurs. Ils permettent de commémorer, de digérer des événements difficiles. À travers ce projet, des perspectives communes émergent entre l’histoire de l’ et son nouveau directeur : l’art qui informe sur l’être humain et ses mondes, l’art comme vecteur de cohésion sociale, la médiation et l’espace urbain. La médiation s’introduit dans tous les interstices. Son omniprésence ouvre une réflexion de fond au sein de l’équipe de l’ qui s’y est pourtant confrontée deux ans auparavant, durant l’élaboration du cycle d’expositions « \#Institut » à l’automne 2016 : Qu’est-ce que la *médiation* et quelles en sont les limites ? L’historien de l’art Pierre Arese, qui fait partie de l’équipe de l’ depuis la fin de l’été 2017, s’engage officiellement auprès des publics à partir de juin 2019. Il hérite d’une grande responsabilité puisqu’un nombre croissant d’activités se rattachent désormais à ce pôle. Pédagogue hors pair, il est outillé pour la prendre à bras le corps. Ses heures de travail ne lui permettant pas de développer la médiation comme il l’entend, un poste de chargé des publics scolaires est ouvert. L’historienne de l’art Géraldine %%Marchal, Géraldine|Marchal%% se joint à l’équipe. Le binôme développe une brochure de vingt-cinq pages qui reprend toutes les activités de médiation proposées par l’. La nomenclature est précédée d’un texte éditorial annonçant un objectif clair : « Faire émerger, par la mise en commun d’expériences vécues, un propos donnant du sens à des essais esthétiques multiples qui s’insèrent tantôt dans la prospection de la réalité tangible, tantôt dans l’échappée utopique. » Cette approche teinte toutes les visites guidées d’expositions, les marches urbaines visant la découverte de l’art public et du *street art* bruxellois, les workshops créatifs dans les expositions, les stages pour enfants créés et encadrés par des artistes durant les vacances scolaires, les séances de lecture dispensées par des conteurs professionnels, les ateliers de lecture d’images, les ateliers d’analyse d’œuvres d’art moderne et contemporain, etc. Souvent réalisées à la carte pour des classes qui en font la demande, ces activités demeurent plus ou moins invisibles dans la programmation officielle de l’. Or, elles attirent pourtant 25% de son public actuel. En novembre 2019, %%Arese, Pierre|Pierre Arese%% et Géraldine %%Marchal, Géraldine|Marchal%% invitent l’artiste %%Bica, Lætitia|Lætitia Bica%% à entamer un cycle d’ateliers intergénérationnels à l’. Une dizaine d’élèves en quatrième année de l’école primaire %%École Baron Steens|Baron Steens%% et de pensionnaires de la maison de %%Maison de repos et de soins « Aux Ursulines »|repos et de soins%% « Aux Ursulines » se joignent à elle pour partager au sujet de leur rapport à l’engagement, à ses indices et ses symboles. Au fil des échanges, ils donnent des formes matérielles à leurs réflexions. L’exposition *Point de croix*, présentée du 24 janvier au 21 mars 2020 dans l’%%Espace Satellite%% de l’[^92], rend compte de leurs rencontres. Ce projet représente une manifestation concrète de la perméabilité croissante entre les secteurs scolaire et artistique observée par Sébastien %%Marandon, Sébastien|Marandon%%. Selon lui, de plus en plus d’artistes s’intègrent au sein d’équipes pédagogiques dans le but de développer des résidences combinant recherche, expérience artistique et pédagogie. À juste titre, il développe un cycle de rencontres et de conférences pour examiner les conséquences de ce nouveau phénomène. « Que disent ces convergences sur l’évolution de l’école aussi bien que de l’art ? Sur les conceptions changeantes de l’apprentissage de la citoyenneté, de la construction de l’individu et du commun à l’école ? Sur la place renouvelée qu’occupe l’art dans ce domaine de « formation » ? »[^93] La première itération de ce cycle prend place à l’ sous l’intitulé « L’artiste-pédagogue, pédagogue artiste ? » (13 février 2020). Elle consiste en une rencontre avec %%Busine, Laurent|Laurent Busine%%, fondateur et directeur du %%Musée des Arts contemporains de la Fédération Wallonie-Bruxelles (MAC’s)|MAC’s%%, Musée des arts contemporains de la Fédération Wallonie-Bruxelles, entre 2002 et 2016. Le lien avec les écoles n’est toutefois pas l’apanage exclusif du pôle Médiation. La transmission des connaissances et l’apprentissage par la pratique font partie intégrante de l’ADN de l’. Le pôle Exposition s’engage également auprès des étudiants. Outre l’encadrement de nombreux stages et les prêts de locaux pour les jurys d’écoles supérieures, il offre la totalité de ses espaces d’exposition à deux reprises à la fin des années 2010. Au printemps 2018, l’ met ses espaces d’exposition à la disposition des étudiants de deux écoles gantoises : le %%Hoger Instituut voor Schone Kunsten (HISK)|HISK%% et la %%Koninklijke Academie voor Schone Kunsten (KASK)|KASK%%. Jeunes artistes et commissaires d’expositions s’associent pour élaborer et réaliser l’exposition *State of Statelessness*. Un an plus tard, les étudiants du programme de Master en pratiques de l’exposition – %%CARE%%, de l’%%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%-EsA (Bruxelles), regroupent des interventions de leur cru ou d’artistes invités au sein de *Sly Composition*. En mars 2020, au début du confinement de la Belgique dû à la crise sanitaire provoquée par le coronavirus, Ludovic %%Lamant, Ludovic|Lamant%% signe un article intitulé « Biennales, fin de partie ? » dans *Mediapart*.[^94] Sa réflexion décrit clairement ce que de nombreux professionnels du milieu artistique ressentent depuis longtemps : le monde de l’art doit entrer dans un nouveau paradigme et s’intéresser davantage aux réseaux locaux, à l’écologie, l’inclusion, la lenteur, etc. Cette tendance s’immisce d’ailleurs dans la programmation de l’ depuis quelques années. Au-delà du fait que les œuvres d’art contemporain reflètent des aspects du monde dans lequel nous vivons, et qu’elles entraînent les acteurs culturels à aborder ces aspects au sein d’événements divers, on pressent une volonté plus affirmée d’aborder des enjeux liés à la société. En témoignent les nombreuses collaborations, les liens avec les écoles, les efforts pour établir un véritable contact avec les publics, les tentatives renouvelées de révéler le pouvoir des œuvres et de l’art. Quelques exemples sont particulièrement significatifs. En s’engageant dans la direction artistique de l’exposition *Gisements*, présentée lors de la soirée d’inauguration de %%Recy-K%%[^95] (25 octobre 2016) et appelée à devenir pérenne quelques années plus tard, l’ contribue à l’expérimentation et au développement de nouvelles formes d’économies. Il invite les artistes Joachim %%Coucke, Joachim|Coucke%%, Adrien %%Tirtiaux, Adrien|Tirtiaux%% et Thierry %%Verbeke, Thierry|Verbeke%% à s’imprégner du site de %%Recy-K%% pour réfléchir aux matériaux de production et aux relations sociales. Pour l’occasion, trois œuvres monumentales sont élaborées à partir de ressources recyclées, et accompagnées d’œuvres antérieures. Ce projet donne corps à une préoccupation écologique qui résonne au cœur d’autres projets menés par l’, tels que l’exposition *L’Art d’accommoder les restes* (23 juin - 23 juillet 2017). Dans ce contexte, les trois mêmes artistes prolongent leurs réflexions en développant des propositions plastiques installées dans les salles de l’. Depuis quelques années, l’historien de l’art Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% reconduit une collaboration avec %%Collectif formation société-Insertion socio-professionnelle (CFS-ISP)|CFS-ISP%% (Collectif formation société – Insertion socio-professionnelle) visant la production d’une formation de trois jours intitulée « La fabrique de l’autre ». À chaque itération, il se joint à des chercheurs pour tenter de défaire des représentations de l’*autre* héritées du colonialisme. En outre, plusieurs expositions d’œuvres contemporaines touchent également à de profondes mutations du monde actuel, en cours ou souhaitées. *A Forest* (2018) rassemble des artistes qui s’intéressent aux écosystèmes du monde végétal. *Unexistant* (2019) est une exposition-installation conçue par l’artiste belge Alec %%De Busschère, Alec|De Busschère%% qui aborde la notion identitaire en parallèle avec les réseaux sociaux. L’exposition collective *Babel* (2019) examine la question des langues qui rapprochent ou divisent les citoyens du monde entier. L’installation *Entre intérêts* (2019), produite par Maëlle %%Dufour, Maëlle|Dufour%%, traite des systèmes de surveillance qui ponctuent nos déplacements quotidiens. *Some Things* (2020) est une exposition individuelle des œuvres de l’artiste belgo-islandaise Guðný Rósa %%Ingimarsdóttir, Guðný Rósa|Ingimarsdóttir%% qui invite à profiter du silence pour développer une attention soutenue et entretenir un rapport intime avec des œuvres sur papier. *Savoir-faire* (programmée au printemps 2020, reportée en septembre 2021) révèle des gestes liés à la production et la consommation capitaliste, ou à la persistance et la résistance face à cette idéologie. Bien que non-exhaustifs, ces quelques exemples, indices de dysfonctionnements de plus en plus abordés par les artistes actuels, révèlent une forme de mobilisation face à des enjeux cruciaux. Il n’est pas anodin que l’ présente l’exposition *Inspire* (2020) à l’occasion de son cinquantième anniversaire. Les œuvres rassemblées au sein de ce projet véhiculent différentes conceptions du temps et, par extension, invitent à décélérer pour prendre conscience de la valeur de notre propre temps. Si l’heure était à la fête lors du quarantième anniversaire de l’ en 2011, l’heure actuelle est plutôt à la prise de conscience et à l’action collective. Peut-être dû au contexte sanitaire actuel, ou au contexte géopolitique et climatique incertain qui invite à un recentrement sur l’espace social, ce nouvel état d’esprit rétablit une salutaire connexion entre l’art et la réalité sociale qui brille par son absence dans certaines sphères du monde de l’art. On aura au moins vu émerger une solidarité rassurante dans le secteur des arts plastiques belges durant cette crise sanitaire. Différentes initiatives ont vu le jour pour fédérer les artistes et établir des réseaux de soutien s’adressant aux moins nantis, qui se sont vus amputer des contrats de travail. Espérons qu’ils seront pérennes. Si les expositions constituent l’interface publique la plus évidente de l’, elles s’inscrivent néanmoins dans une liste d’activités régulières incluant des cours, des conférences et des tables rondes. La dimension scientifique insufflée par Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% n’a jamais quitté l’. L’historien de l’art Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% la nourrit depuis près de dix ans. Outre les conférences qu’il produit et dispense lui-même, il invite de nombreux intervenants à présenter leurs travaux de recherche aux auditeurs de l’Institut. Professeurs généralistes ou spécialisés, collectionneurs passionnés, chercheurs et acteurs de terrain partagent leurs savoirs à l’Institut. Ils greffent parfois leur intervention au cœur d’un programme inhérent aux problématiques soulevées par une exposition. Par exemple, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% a développé un ambitieux programme autour de son exposition *A Forest*. Inauguré par une conférence de Paul %%Sztulman, Paul|Sztulman%% (« La Forêt nouvelle »), il se poursuivait par des interventions de l’ingénieure-agronome Caroline %%Vinck, Caroline|Vinck%% (« L’écosystème forestier, mode d’emploi »), l’actrice et dramaturge %%Dumont, Isabelle|Isabelle Dumont%% (« Hortus Minor »), l’écrivain et jardinier Marco %%Martella, Marco|Martella%% (« La forêt est un jardin »), etc. Il s’agit alors d’une véritable occasion de construire un savoir polymorphe, interdisciplinaire. Il n’est pas anodin non plus que Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% programme une rencontre entre Sébastien %%Marandon, Sébastien|Marandon%% et Christian %%Ruby, Christian|Ruby%% intitulée « Comment le public advient-il ? » pour la séance inaugurale de l’année académique 2020-2021. Ces deux intervenants tentent d’arrimer des expériences vécues à des théories et discutent, au passage, de la notion de public comme construction sociale. Cet événement introduit une perspective critique au sein d’un concept clé pour l’. ### Quelles formes donner aux savoirs mis en circulation ? L’institutionnalisation de l’articulation entre la pratique et la réflexion sur l’art au sein des écoles supérieures d’art modifie lentement, mais durablement l’activité artistique. La prise d’importance de la figure de l’artiste-chercheur découle certainement de cette modification du système académique. À la croisée des domaines artistique et académique se situe d’ailleurs un nouveau genre d’intervention qui prend la forme de conférence-performance. Des artistes créent de nouvelles approches discursives, de nouveaux formats de parole en présentant oralement le fruit de leurs recherches devant le public. Récemment invités à l’, Marie %%Cantos, Marie|Cantos%%, Jean-Philippe %%Convert, Jean-Philippe|Convert%% et Clara %%Thomine, Clara|Thomine%% sont à l’origine de ce type de pratique polyphonique de plus en plus courante. La nature et le contexte des résidences d’artistes se transforment également au cours des dernières années. Si on assiste à une augmentation du nombre de résidences artistiques dispensées en Belgique et dans d’autres pays depuis le début des années 2000, on observe à l’ que les tâches réalisées durant les résidences changent. Depuis la création du programme en 2011 et surtout depuis sa refonte en 2017, de plus en plus d’artistes choisissent d’employer ce temps de travail privilégié pour cumuler des articles, lire, écrire, chercher. Ils travaillent avec un ordinateur et donnent des formes artistiques à leurs hypothèses et découvertes. Les matériaux qui se retrouvaient généralement dans l’espace de travail sont de plus en plus virtuels. On passe de la résidence de production à la résidence de recherche. Que cherche l’artiste ? Malgré de nombreuses tentatives de définir et synthétiser les spécificités de la recherche en art, d'en cerner la nature dans les milieux artistique et académique, celle-ci se refuse à toutes catégories. En revanche, les modalités pouvant rendre la recherche visible peuvent faire l’objet d’essais concrets dans l’espace. C’est ce qu’a fait %%Barret, Pascale|Pascale Barret%%, en compagnie d’%%Abrahams, Annie|Annie Abrahams%% et Alix %%Desaubliaux, Alix|Desaubliaux%% (%%3G/eneration%%), au sein de l’installation *Constallations*, qui prenait place dans l’Espace Satellite de l’ au printemps 2019. Un dispositif juxtaposant trois vidéos et de nombreux extraits d’archives (images, extraits de discussions, captures d’écrans d’ordinateurs, etc.) rendait visibles les modes de recherche des trois protagonistes. Ainsi la recherche prenait-elle une forme artistique sur tous les plans. Si la recherche artistique est fertile et soutenue par de nombreux espaces de diffusion à travers des programmes de résidences, la recherche scientifique éprouve plus de difficultés à s’émanciper du système académique. Où sont les chercheurs en histoire de l’art ? Quels moyens met-on à leur disposition pour qu’ils puissent poursuivre leurs recherches à l’extérieur du cadre privilégié de l’université ? Sans historiens de l’art actifs, aucune histoire ne s’écrit et ne se pérennise. Face à la récurrente difficulté de trouver des historiens de l’art habilités à prendre la parole à l’Institut, alors que des dizaines d’étudiants sont diplômés chaque année, il est devenu évident que de nombreuses envies de recherche se dissipent face à l’absence de structures de soutien. Pour réagir à ce manque et soutenir de jeunes chercheurs, l’ entame un programme de résidences scientifiques à l’automne 2020. Il souhaite ainsi contribuer à la mobilisation des idées et des recherches touchant, de près ou de loin, à l’écriture ou la réécriture de l’histoire de l’art, ou de certains de ses enjeux. %%Vancampenhoudt, Lyse|Lyse Vancampenhoudt%%, dont les recherches portent principalement sur la visibilisation du travail des femmes artistes, devient la première chercheuse en résidence au cours de l’automne 2020. Le confinement lié à la crise sanitaire, événement qui fera tristement date, est une occasion pour le personnel de l’ de faire évoluer son mode de fonctionnement par rapport à la programmation de ses conférences. Entamée dès l’automne 2018 mais jamais systématisée, la mise en ligne de ses conférences permet une importante visibilité et une salutaire écoute tant pour les conférenciers, les historiens de l’art affiliés à l’, les chercheurs et tous les autres publics s’intéressant à l’art. Si bien que %%Arese, Pierre|Pierre Arese%% et Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% développent leurs propres émissions, qui sont transmises sur la plate-forme %%SoundCloud%% de l’ à partir de mai 2020. *L’Art au poing* présente des temps forts de l’histoire récente de l’art, des parcours d’artistes engagés et des événements marquants[^96]. Ce programme, sous la responsabilité de %%Arese, Pierre|Pierre Arese%%, donne également la parole à d’autres historiens de l’art. Dans *L’Art au poing \#4*, par exemple, Pierre-Yves %%Desaive, Pierre-Yves|Desaive%% traite de la %%Documenta%% X, présentée en 1997. Par ailleurs, *Zoom – La parole à l’œuvre* est une rubrique imaginée par Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%. Dans ce contexte, un historien, un curateur ou un critique d’art décrit, examine et analyse une œuvre d’art de son choix. Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% entame la série en traitant d’une œuvre de Teresa %%Margolles, Teresa|Margolles%% intitulée *Pistas de Baile* (photographies, 2016), avant de passer la parole à d’autres professeurs intervenant régulièrement à l’[^97]. ### D’une approche sociologique de l’art à la co-construction de sens La cinquième décennie de l’histoire de l’ est traversée par une crise identitaire qui entraîne une profonde remise en question de ses missions, de ses priorités, de la répartition du travail. Elle touche son fonctionnement interne, mais également sa portée externe. Trois personnes se succèdent à la direction et investissent la lourde responsabilité de repenser ses fondements. Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% (2010-2015), Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% (2016-2018) et Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% (2018 jusqu’à aujourd’hui) tentent, chacun à leur tour, de clarifier ses missions aux yeux des publics. Comme l’ produit des expositions et propose des conférences en auditorium – deux types d’activités qui résistent parmi un éventail de possibilités depuis 50 ans –, on le compare rapidement à un centre d’exposition. Or, sa spécificité ne se situe pas exclusivement dans son recours à ces deux modes d’intervention. Ceux-ci ne constituent que deux moyens de toucher la mission de l’. En réalité, ils occultent le véritable fondement identitaire de l’Institut, qui prend corps à travers des remises en question et des échanges humains plutôt qu’à travers un type d’activité en particulier. Si l’on compare l’objectif initial de %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% avec celui des historiens de l’art qui se sont rassemblés pour la remplacer depuis vingt ans, on observe qu’ils sont identiques malgré une formulation différente. Dans l’optique de démocratiser l’accès à l’art contemporain et d’offrir une éducation artistique aux citoyens en les incluant dans l’histoire relatée, %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% emploie une approche sociologique de l’art et de la culture. Cinq décennies plus tard, le désir d’abolir le fossé divisant l’art contemporain et les publics imprègne toujours le personnel de l’. À travers les personnalités d’Arlette %%Lemonnier, Arlette|Lemonnier%%, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%%, Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%%, et peut-être encore davantage celle d’Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%%, ce désir trouve réponse dans un profond investissement envers les publics et la médiation qui leur est adressée. Le partage des connaissances devient dialogique. On parle dorénavant d’art et d’histoire de l’art face aux œuvres. La méthode change, mais le projet social demeure le même : conserver une mémoire de l’histoire de l’art en l’arrimant à un contexte de production et aux phénomènes sociaux qui l’imprègnent. [^1]: Virginie %%Devillez, Virginie|Devillez%% a publié des textes sur le milieu de l’art belge de la fin des années 1960 et des années 1970. Elle souligne, dans l’un deux, qu’il s’agit d’une des plus anciennes foires dans l’histoire récente de ce type d'événements puisqu’elle précède %%Art Basel%% (1970) et la %%FIAC%% (1974). Virginie %%Devillez, Virginie|Devillez%%, « Galeriemodellen, Vroeger en Nu », *Veldanalyse Beeldende Kunst*, 2013, Instituut voor Beeldende, audiovisuele en mediakunst (%%Instituut voor Beeldende, audiovisuele en mediakunst (BAM)|BAM%%), 2013, p. 10. Une version française de ce texte, intitulée « D’hier à aujourd’hui, les nouveaux modèles de galerie », également disponible sur Internet, est publiée en collaboration avec %%Salon, Le|Le Salon%%. [^2]: Dans une lettre datée du 4 mai 1959, Henri %%Janne, Henri|Janne%%, alors recteur de l’Université libre de %%Bruxelles%% (%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%%), annonce à Joseph-Berthold %%Urvater, Joseph-Berthold|Urvater%% que l’%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%% a créé un cours d’histoire de l’art contemporain suivant l’une ses recommandations advenue un an plus tôt. À la fin des années 1960, la chaire d’histoire de l’art contemporain s’est sensiblement développée puisqu’elle comporte désormais 150 heures de cours par année. Cette lettre est conservée aux %%Archives de l’Art contemporain en Belgique (AACB)%%. [^3]: Suite à cette séance inaugurale, les premiers cours se font dans des locaux prêtés par %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%. [^4]: Actif depuis 1967 en rhétorique, en sémiotique et en théorie de la communication linguistique et visuelle, le collectif interdisciplinaire liégeois %%Groupe µ%% (Jean-Marie %%Klinkenberg, Jean-Marie|Klinkenberg%%, Francis %%Edeline, Francis|Edeline%%) contribue à sa théorisation. [^5]: *Environnement-Bruxelles*, n°9, 1971. [^6]: *Idem*. [^7]: Les archives de l’ISELP traduisent une organisation plutôt irrégulière des rencontres %%Inforart%% malgré la volonté d’une fréquence mensuelle. [^8]: Dennis %%Oppenheim, Dennis|Oppenheim%% expose des œuvres au %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais des Beaux-Arts%% du 28 mai au 29 juin 1975. La publication qui accompagne son intervention contient notamment un texte signé par Jean-Pierre Van Tieghem. [^9]: Ce programme dispensé à partir de l’automne 1973 est mené par des spécialistes des sciences pédagogiques. Il s’adresse aux professeurs de dessin, d’histoire, de français et de morale, ou à tout autre enseignant du secondaire supérieur et de l’enseignement artistique susceptible d’introduire des données ayant trait à l’art dans ses cours.  [^10]: Ces données réfèrent à l’année académique 1978-1979. [^11]: En 1971, une cotisation annuelle de membre adhérent coûte 500 francs belges (aujourd’hui 12,39 euros) et la qualité de membre à vie s’acquiert par le versement d’une cotisation égale à dix fois la cotisation annuelle, soit 5 000 francs belges (123,95 euros). En plus de cet abonnement, les auditeurs doivent payer les cours, conférences et autres rencontres de manière individuelle : 3 000 francs belges (74 euros) le semestre, à raison d’un cours d’une heure par semaine, pour un total de vingt séances. [^12]: Cette information figure sur un document conservé dans les archives de l’ISELP, mais n’est pas corroborée par des preuves concrètes. [^13]: Collectif, *ISELP dix années. Institut supérieur pour l’étude du langage plastique*, Bruxelles, Commission française de la Culture de l’Agglomération de Bruxelles, 1981, p. 11. [^14]: %%Forest National%% (palais des Sports et du Spectacle de Bruxelles) est inauguré le 8 octobre 1970 par les danseurs du Ballet du XXe siècle de %%Béjart, Maurice|Maurice Béjart%%. En 1974, son directeur artistique, Albert-André %%L’Heureux, Albert-André|L’Heureux%%, intègre les arts plastiques à son programme et permet à l’ISELP d’inaugurer un nouvel espace récemment ajouté à ses locaux. [^15]: %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% reprend un certain nombre d’œuvres présentées dans le contexte de l’exposition *Wege Zur Computer*, organisée par le %%Goethe Institut%%. Il s’agit d’œuvres de %%Besset, Klaus|Klaus Besset%%, Pierre %%Cordier, Pierre|Cordier%%, Hein %%Gravenhorst, Hein|Gravenhorst%%, Karl %%Holzaeuser, Karl|Holzaeuser%%, Gottfried %%Jaeger, Gottfried|Jaeger%%, Herbert W. %%Franke, Herbert W.|Franke%%, Manfred %%Mohr, Manfred|Mohr%%, Georg %%Nees, Georg|Nees%%, Freider %%Nake, Freider|Nake%%, Karl %%Siebig, Karl|Siebig%%, Eth %%Studenten, Eth|Studenten%% et Demetrios %%Yannakopoulos, Demetrios|Yannakopoulos%%. Elle invite Auro %%Lecci, Auro|Lecci%%, Peter %%Struycken, Peter|Struycken%%, Alexandre %%Vitkine, Alexandre|Vitkine%% et Edward %%Zajec, Edward|Zajec%% à se joindre à eux, ainsi que quelques artistes de %%MBB Computer Graphics%% et du Groupe Art et informatique de %%Vincennes, Groupe de|Vincennes%%. [^16]: Herbert W. %%Franke, Herbert W.|Franke%%, *Computer Graphics – Computer Art* (deuxième édition), Berlin/Heidelberg, Springer-Verlag, 1985 (1971), pp. 105-107. %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% présente à son tour un historique des expositions portant sur le sujet réactualisé à la fin de sa publication *Art et ordinateur*. Elle y ajoute son projet. [^17]: *Art et ordinateur* et *Artists Videotapes*, exposition organisée par %%Baudson, Michel|Michel Baudson%% et présentée au %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais des Beaux-Arts%% de %%Bruxelles%% en février 1975, abordent des sujets distincts. *Artists Videotapes* est un projet majeur qui mène à la constitution de la vidéothèque de %%Jeunesse et Arts Plastiques (JAP)|Jeunesse et%% Arts Plastiques, et à son enrichissement jusqu’au milieu des années 1980. Par contre, le palais de Beaux-Arts de %%Bruxelles%% (aujourd’hui Bozar) organise trois éditions du Festival international de %%Festival international de musique électronique, vidéo et Computer Art|musique électronique, vidéo%% et *Computer Art* en 1980, 1981 et 1982. La deuxième édition se déroule du 28 octobre au 10 novembre 1981 et investit plusieurs sites, dont le palais des Beaux-Arts, le %%Plan K%%, la %%Galerie Ravenstein|galerie Ravenstein%% et le %%Shell Auditorium%%. Il s’agit de l’édition la plus ambitieuse. [^18]: La Commission française offre un subside régulier à l’ISELP à partir de 1975. [^19]: Cette citation est extraite du texte « Le %%Milan, passage de|passage de Milan%% : des écuries du %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%% à l’ISELP », écrit par Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% à l’occasion des Journées du patrimoine 2019. Les informations concernant l’histoire du bâtiment du %%Egmont, palais d’|palais d’Egmont%% et de ses nouvelles écuries sont majoritairement issues de ses recherches. [^20]: *Idem*. [^21]: Monique Verken, *50 ans. %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais des Beaux-Arts%% de Bruxelles*, Bruxelles, %%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|palais des Beaux-Arts%% de Bruxelles, 1978. [^22]: L’*Exposition internationale de tampons d’artistes* est le fruit d’une collaboration avec %%Benon, Jean-Pierre|Jean-Pierre Benon%%, la %%Galerie Stempelplaats|galerie Stempelplaats%% d’Amsterdam, Johan %%Van Geluwe, Johan|Van Geluwe%% et son « Museum of Museums », ainsi qu'Hervé %%Fischer, Hervé|Fischer%%. [^23]: %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%% met l’accent sur la provenance des envois postaux plutôt que sur le nom des artistes dans l’introduction du catalogue de l’exposition. Elle renchérit néanmoins plus loin : « Certains auteurs réputés pour avoir ’exposé leurs œuvres’ dans les galeries les plus célèbres… d’autres vraisemblablement peu connus. » La longue liste d’artistes suit le texte d’introduction du catalogue : %%Ben|Ben%%, Jacques %%Lennep, Jacques|Lennep%%, %%Metallic Avau|Metallic%% Avau, Luc %%Van Malderen, Luc|Van Malderen%%, etc. [^24]: Le %%Palais des Beaux-Arts de Charleroi|palais des Beaux-Arts%% de %%Charleroi%% accueille un autre volet de l’exposition *Musée de poche. Inventaire permanent 1 – Milieu rural*, organisée et mise en circulation par le Centre d’Action Culturelle d’Expression française (%%Centre d’action culturelle d’expression française (C.A.C.E.F.)|C.A.C.E.F.%%), la Commission française de la Culture de l’Agglomération de %%Bruxelles%% (%%Commission française de la Culture de l’Agglomération de Bruxelles (C.F.C)|C.F.C.%%), la Ville de Liège et le %%Palais des Beaux-Arts de Charleroi|palais des Beaux-Arts%% de %%Charleroi%%. [^25]: %%Prévost, Claude|Claude%% et %%Prévost, Clovis|Clovis%% Prévost documentent les projets de nombreux créateurs inclassables, hors-normes, qui évoluent en marge des réseaux artistiques officiels. Leur documentation prend la forme d’articles, de photos et de vidéos. L’exposition *Les Bâtisseurs de l’imaginaire* a été présentée en divers lieux au fil des années. Le duo a publié ses recherches et ses documents au sein d’un livre augmenté et réédité à quelques reprises : Claude et Clovis Prévost, *Les Bâtisseurs de l’imaginaire*, %%Paris%%, Klincksieck, 2016. [^26]: La création de l’Espace Éphémère advient la même année que la création de l’ASBL bruxelloise %%Contretype%%, également dédiée à l’exposition de photographies. [^27]: Cette citation est extraite d’un document annonçant la création de l’Espace Éphémère. [^28]: Cette information est issue de la rubrique « Centre d’accueil » d’un journal trimestriel publié par l'ISELP : *ISELP - Institut supérieur pour l'étude du langage plastique asbl*, n°4, décembre 1983. [^29]: Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% approfondit ce sujet dans un essai intitulé « Art Espace Public. D'%%Environnemental%% à Being Urban, l'ISELP et l'art public », publié dans le présent ouvrage. [^30]: Cet intérêt envers l’urbanisme se manifeste également lors du premier colloque organisé par l’ISELP, en 1978, autour du thème de « La reconstruction de la ville européenne ». Cet événement rassemble des spécialistes internationaux. [^31]: %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, « Manifeste pour l’%%Environnemental%% », *%%Environnemental%%*, cahier n°1, 1983, pp. 5-9. [^32]: À titre d’organisateur d’exposition, %%Martin, Jean-Hubert|Jean-Hubert Martin%% revient sur ce projet dans le contexte d’un essai intitulé « L’art des villes et l’art des champs » et publié dans la publication *Mémoire de l’histoire de l’art*, deux ans plus tard. Cet essai semble confirmer l’attrait croissant envers l’art non européen, observable dans la programmation de l’ISELP tout au long des années 1980. [^33]: Par exemple, les expositions *La Roumanie salue l’%%Europe%% *(1988) et *Travaux d'architectes paysagistes danois contemporains* (1991) effectuent également des déplacements culturels favorisant la diversité. On y présente d’autres histoires, d’autres méthodes. [^34]: L’ouverture d’%%ARGOS ASBL|ARGOS ASBL%% (aujourd’hui ARGOS. Centre for Audiovisual Arts) en 1989, à Bruxelles, cristallise l’intérêt croissant pour le film et la vidéo. Ce centre soutient toutes créations d’images en mouvement échappant au cinéma. À l’affût des développements du secteur, il distribue, archive, conserve, expose et projette les créations audiovisuelles artistiques belges. Surtout, il les promeut à l’étranger. Cette nouvelle entité permet le développement d’expertises liées à l’art vidéo, aux documentaires fictionnels et autres films expérimentaux réalisés par des artistes. [^35]: %%Magie rouge%%, probablement un lieu de diffusion, situé à Bruxelles, au 52, rue Maes (Ixelles), accueille l’autre volet de l’exposition *%%Méliès, Georges|Méliès%% l’enchanteur*. [^36]: La chanteuse Beverly Jo %%Scott, Beverly Jo|Scott%% (BJ %%Scott, Beverly Jo|Scott%%), accompagnée du groupe de musique %%By Chance%%, fait une prestation le soir du vernissage. [^37]: %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, *Pochettes de disques : enluminures du XXe siècle*, Bruxelles, Éditions de l’ISELP, 1983, p. 4. [^38]: *Ibid*., p. 18. [^39]: Cette citation est imprimée sur le document en question, conservé dans les archives de l’ISELP. [^40]: Cette exposition est présentée dans l’Espace Éphémère du 2 au 22 mars 1984. [^41]: Une lettre de l’artiste %%Albert%% adressée à %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, datée du 19 septembre 1987, est reproduite dans l’ouvrage. Produit quatre ans avant la publication de l’ouvrage, ce document permet de saisir l’ampleur du travail réalisé. [^42]: Ce document a également été envoyé à des historiens de l'art, des chercheurs, des théoriciens, etc. [^43]: Les 150 reproductions couleur faisant partie de ce document sont reproduites en noir et blanc et en ordre chronologique dans l’ouvrage *Mémoire de l’histoire de l’art*, de la page 120 à la page 175. Cette liste d’œuvres de référence aurait été constituée à partir d’un principal critère de sélection : l’œuvre devait être reconnue par le plus grand nombre de regardeurs, et trouver résonnance même pour les publics non sciemment concernés par les arts plastiques. Qui plus est, les réactions et les émotions communiquées suite à la lecture de ce document ont également servi de baromètre pour évaluer la justesse de cette liste. [^44]: Ces artistes sont : %%Albert%%, %%Bauweraerts, Jean-Jacques|Jean-Jacques Bauweraerts%%, Michel %%Cleempoel, Michel|Cleempoel%%, Luc %%Coeckelberghs, Luc|Coeckelberghs%%, Patrick %%Corillon, Patrick|Corillon%%, Anne %%Cuvelier, Anne|Cuvelier%%, Luc %%De Blok, Luc|De Blok%%, Laurence %%Dervaux, Laurence|Dervaux%%, Juan %%d’Oultremont, Juan|d’Oultremont%%, Evelyne %%Dubuc, Evelyne|Dubuc%%, Hugo %%Duchateau, Hugo|Duchateau%%, Francis %%Feidler, Francis|Feidler%%, Nadine %%Fievet, Nadine|Fievet%%, Claude %%Foubert, Claude|Foubert%%, Chantal %%Labeeu, Chantal|Labeeu%%, Lut %%Lenoir, Lut|Lenoir%%, Philippe %%Lipo, Philippe|Lipo%%, Jacques %%Lizène, Jacques|Lizène%%, %%Marcase|Marcase%%, Marc %%Melsen, Marc|Melsen%%, Jacqueline %%Mesmaeker, Jacqueline|Mesmaeker%%, Urbain %%Mulkers, Urbain|Mulkers%%, Veerle %%Pinckers, Veerle|Pinckers%%, %%Po$t Zoro$|Po$t%% Zozo$, Toma %%Roata, Toma|Roata%%, Marc %%Schepers, Marc|Schepers%%, %%Tapta%%, Joëlle %%Tuerlinckx, Joëlle|Tuerlinckx%%, Bob %%Van der Auwera, Bob|Van der Auwera%%, Franck %%Van Herck, Franck|Van Herck%%, Jan %%Vanriet, Jan|Vanriet%%, Liliane %%Vertessen, Liliane|Vertessen%%, Eva %%Visneyi, Eva|Visneyi%%, Franck %%Volders, Franck|Volders%%, Jonas %%Wille, Jonas|Wille%%, Léon %%Wuidar, Léon|Wuidar%%. [^45]: Un hommage à la mémoire de Robert L. %%Delevoy, Robert L.|Delevoy%% constitue le tout premier texte de l’ouvrage. [^46]: Raymonde %%Moulin, Raymonde|Moulin%%, « Le marché et le musée, la constitution de la valeur artistique contemporaine », *Mémoire de l’histoire de l’art*, Bruxelles, Éditions de l’ISELP, 1991, pp. 28-41.  [^47]: Ce texte est extrait du programme de l’ISELP 1989-1990. [^48]: *Le Soir*, 15 octobre 1989. [^49]: Le programme est un peu plus modeste, il contient trois cours de quarante heures déployés entre octobre 1992 et mars 1993. [^52]: L’%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%% crée sa filière Gestion culturelle en 1989. [^54]: Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% est l’auteur d’une thèse remarquée sur « l’écriture figurative » qui porte sur les rapports entre signes et images depuis l’Antiquité. Il enseigne l’esthétique à %%École nationale supérieure d’architecture et des arts visuels de La Cambre (La Cambre)|La Cambre%%, expérimente le monde de l’édition et fonde une société de diffusion du livre d’art (%%Sociétés%%). Il installe une librairie à l’ISELP à titre d’indépendant. [^55]: La Fédération Wallonie-Bruxelles soutient une politique d’intégration d’œuvres d’art dans les bâtiments publics, conformément au décret du 10 mai 1984. Cela implique un processus de création artistique enchâssé au processus de création architecturale. Cette démarche vise autant à soutenir la création contemporaine et ses artistes, qu’à sensibiliser le public aux diverses formes d’interventions artistiques actuelles. [^56]: « Je ne crois pas aux choses, je crois aux relations » (Georges %%Braque, Georges|Braque%%) ; « L’art ne peut exister sans une condition permanente de remise en question » (Ad %%Reinhardt, Ad|Reinhardt%%), « Allons faire un %%Cézanne, Paul|Cézanne%% » (Paul %%Gauguin, Paul|Gauguin%% – Lorsqu’il commençait une nouvelle toile, il avait coutume de le dire) ; « Il n’appartient qu’à la pensée d’être ressemblante » (René %%Magritte, René|Magritte%%) ; « Le surréalisme a triomphé dans l’accessoire et échoué dans l’essentiel » (Luis %%Buñuel, Luis|Buñuel%%) ; « Ce n’est pas ce que vous voyez qui est l’art, l’art c’est la trouée » (Marcel %%Duchamp, Marcel|Duchamp%%) ; « L’habitude, sorte de mémoire, c’est un obstacle à la jouissance de la vie et de l’art » (Piet %%Mondrian, Piet|Mondrian%%) ; « Si quelque chose a un sens, peut-être en a-t-il encore plus répété dix fois » (Eva %%Hesse, Eva|Hesse%%) ; « Seules les choses inutiles sont essentielles » (Francis %%Picabia, Francis|Picabia%%) ; « Une vraie œuvre engendre un débat entre l’artiste et son public » (Rebecca %%West, Rebecca|West%%) ; « L’approbation du public est à fuir par-dessus tout » (André %%Breton, André|Breton%%) ; « Dans ce cas-là, quelle est la question ? » (Gertrude %%Stein, Gertrude|Stein%%) ; « On ne finit que sur du fini » (Jean-Auguste Dominique %%Ingres, Jean-Auguste Dominique|Ingres%%). [^57]: Internet vit ses balbutiements à partir de 1994-1995 mais se répand véritablement à partir de 1997. L’ISELP a un site Internet provisoire en date du 4 septembre 2000. [^58]: Cette citation est extraite du texte d’introduction publié sur le programme du cycle d’initiation et d’apprentissage culturel « Après le travail, avant la soirée » de l’année académique 1999-2000. [^59]: Cette œuvre de Paul %%Gonze, Paul|Gonze%% remporte le prix du public en 1984. [^60]: %%Pen, Laurence|Laurence Pen%% a mené des recherches sur cette période de la scène artistique bruxelloise : %%Pen, Laurence|Laurence Pen%%, *Des Stratégies obliques : une histoire des conceptualismes %%Belgique|en Belgique%%*, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015. Elle signait récemment un article dans le dossier « %%Bruxelles%%. Années 60/70 » de *%%L’Art même%%*. %%Pen, Laurence|Laurence Pen%%, « Vers une scène conceptuelle internationale à %%Bruxelles%%. Des acteurs engagés », *%%L’Art même%%*, n°81, 2020, pp. 4-9. Dans le même numéro, voir également l’article de Joris %%D’Hooghe, Joris|D’Hooghe%% intitulé « 1968-1975. Avant-garde à Bruxelles », pp. 10-13. [^61]: L’ISELP s'associe à cinq structures culturelles pour ce projet : L’%%Association intercommunale Culturelle de Bruxelles|association intercommunale culturelle de Bruxelles%%, Le Centre de l’audiovisuel à Bruxelles, Le %%Centre du film sur l’art|Centre du film sur l’art%%, Le %%Fonds Henri Storck|Fonds Henri%% Storck, La %%Maison de la Francité|Maison de la Francité%%. [^62]: Cette citation est extraite d’un article publié dans *La Lanterne*, le 16 novembre 2000. [^63]: %%Brys-Schatan, Gita|Gita Brys-Schatan%%, *Avoir lieu/Johan %%Muyle, Johan|Muyle%%*, coll. « Livrets d’art », Bruxelles, Éditions de l’ISELP, 2001, pp. 34-35. [^64]: Il s’agit d’une collaboration avec la revue *La Part de l’œil* (%%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%-EsA). [^65]: ArtContest (ASBL), créé en 2005, est le concours annuel d’art contemporain de référence pour les jeunes artistes belges ou résidant en Belgique de 35 ans maximum, parrainé par Hans Op de %%Op de Beeck, Hans|Beeck%%. Ce concours, fondé et dirigé par %%Boucher, Valérie|Valérie Boucher%%, attachée à la scène artistique émergente, a pour vocation de révéler, de suivre et d’accompagner le travail des jeunes artistes contemporains sur le long terme. [^66]: « Le dessus des cartes », entretien mené par Christine %%Jamart, Christine|Jamart%%, *%%L’Art même%%*, n°23, 2004, pp. 19-20. Ce numéro de *%%L’Art même%%* contient un dossier consacré au rapport entre l’art contemporain et la cartographie. [^67]: Pierre %%Sterckx, Pierre|Sterckx%% propose le cycle « Histoires de cartes. Cartographier la peinture » en guise de grandes conférences les 27 mai et 3 juin 2004. Ces conférences constituent une extension de sa contribution dans l’édition qui accompagne l’exposition. [^68]: %%Austin Langshaw, John|John Langshaw Austin%%, *Quand dire, c’est faire*, %%Paris%%, Points, 1991 (1962). [^69]: L’exposition *De Narcisse à Alice. Miroirs et reflets en question* (18 avril-21 juin 2008) concorde tout de même avec le colloque « Spéculations spéculaires : le reflet du miroir dans l’image contemporaine » (24-26 avril 2008). Dans le même ordre d’idées, le colloque « Aborder les bordures : l’art contemporain et la question des frontières » (22-24 avril 2010) est doublé d’un atelier (19-23 avril 2010) réalisé par l’artiste Éric Van Hove, en collaboration avec Nida %%Sinnokrot, Nida|Sinnokrot%% (%%Team Habibi%%), qui s’achève par une exposition. Présentée dans les grandes salles de l’ISELP du 24 avril au 29 mai 2010, l’exposition *Exonymie* consiste en la recomposition d’un rayonnage original de la %%Katholiek Universiteit Leuven (KUL)|Katholiek%% Universiteit Leuven (KUL) pour soulever des questions liées à la frontière linguistique et des questions communautaires qui écartèlent la Belgique depuis des années. [^70]: Cet espace d’accueil où l’on expose des œuvres récentes s’appelle « Espace Éphémère » entre 1978 et 1994, « %%Galerie Découverte%% et %%Rayon Art/Objets|Rayon Art/Objets%% » entre 2000 et 2011, « %%Espace Satellite%% » entre 2018 et 2020. [^71]: L’apparence de Rayon Art est transformée par le bureau d’%%ADN|architecture ADN%% (David %%Henkinet, David|Henkinet%%, Nicolas %%Lacobellis, Nicolas|Lacobellis%%) en 2006. L’espace est réorganisé et un nouveau mobilier y est installé. L’objectif de cette transformation est de faciliter la compréhension des activités de l’ISELP dès l’entrée pour les nouveaux visiteurs. [^73]: Cette citation est extraite d’un texte publié sur le site web de l’ISELP à l’époque. [^74]: L’ISELP est défini ainsi au début des années 2010. Cette phrase est largement reprise par les médias qui communiquent autour de son quarantième anniversaire en 2011. [^75]: Au moment où ces pages sont écrites, l’ISELP et %%Musée Art et marges|Art et marges%% musée (Bruxelles) développent une convention pour officialiser le dépôt du fonds de documents d’%%Musée Art et marges|Art et marges%% musée au centre de documentation de l’ISELP. [^77]: 2000-2010 : %%Bivier, Évelyne|Évelyne Bivier%%, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%, Sophie %%Godts, Sophie|Godts%%, Frédéric %%Hanon, Frédéric|Hanon%%, Anne-Esther %%Henao, Anne-Esther|Henao%%, Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%%, Kim %%Leroy, Kim|Leroy%%, Frédérique %%Margraff, Frédérique|Margraff%%, Olivia %%Nerincx, Olivia|Nerincx%%, Aurélie %%Rigaut, Aurélie|Rigaut%%, Adèle %%Santocono, Adèle|Santocono%%, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%% ; 2010-2020 : %%Arese, Pierre|Pierre Arese%%, %%Cheval, Florence|Florence Cheval%%, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%, Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%%, Pauline %%Hatzigeorgiou, Pauline|Hatzigeorgiou%%, Anne-Esther %%Henao, Anne-Esther|Henao%%, Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%%, Géraldine %%Marchal, Géraldine|Marchal%%, Mélanie %%Rainville, Mélanie|Rainville%%, Aurélie %%Rigaut, Aurélie|Rigaut%%, Adèle %%Santocono, Adèle|Santocono%%, Éric %%Van Essche, Éric|Van Essche%%. Septembre %%Tiberghien, Septembre|Tiberghien%% et Pauline de La %%La Boulaye, Pauline de|Boulaye%% se sont également jointes à l’équipe durant de plus courtes périodes. [^78]: Des expositions hors les murs sont également développées durant cette période : *FLESH II* au musée %%Musée Ianchelevici|Ianchelevici%% de La Louvière (Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%, 2011), *Duos d’artistes : un échange* au Musée %%Musée jurassien des Arts de Moutier, en Suisse|jurassien%% des arts de Moutier, en Suisse (Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%%, 2011), *Célébration(s)* au %%Centre Wallonie-Bruxelles|Centre Wallonie-Bruxelles%% à %%Paris%% (Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%%, 2013), *Corps commun* aux %%Anciens Abattoirs de Mons%% (Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%%, Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%%, 2013), *Transitions, Mira Sanders* à %%Été 78%% (Catherine %%Henkinet, Catherine|Henkinet%%, 2015). [^79]: Le %%MASDEX%% ne fait plus partie des programmes d’études d'Arts² depuis juin 2020. [^80]: Ces chiffres, qui datent de 2015, doivent être considérés comme des estimations. [^81]: Le 7 mars 2015, l’ISELP accueille une conversation guidée par Arnaud %%Hoedt, Arnaud|Hoedt%% et Jérôme %%Piron, Jérôme|Piron%%. Les enseignants traitent de la langue, de l’instruction et de l’écriture en insistant plus spécialement sur le caractère arbitraire de certaines règles d’orthographe. Des effets néfastes, tels que la discrimination sociale, sont nommés. Au final, la conversation soulève le débat et prend une forme théâtrale. L’approche humoristique des deux interlocuteurs invite à développer un sens critique face à toutes les conventions orthographiques qui sont trop peu remises en question. Dans ce contexte, les publics de l’ISELP sont invités à développer un esprit critique, à remettre en doute ce qui fait autorité. Les deux linguistes remportent un grand succès. Leur intervention finit par prendre la forme d’un spectacle vivant intitulé *La Convivialité*, ainsi que d’un livre intitulé *La Faute de l’orthographe* (4 octobre 2017). Il ne s’agit pas d’art à proprement parler, mais de culture et de remise en question. [^82]: Les élèves ayant participé à ce projet sont : %%Avci, Ismaïl|Ismaïl Avci%%, Erwin %%Blaszczuk, Erwin|Blaszczuk%%, %%Carette, Lionel|Lionel Carette%%, Kevin %%Collinet, Kevin|Collinet%%, Sébastien %%Ergo, Sébastien|Ergo%%, Sébastien %%Firre, Sébastien|Firre%%, Morteza %%Khavand Ghassroldashti, Morteza|Khavand%% Ghassroldashti, Valentin %%Hanssens, Valentin|Hanssens%%, Kevin %%Lapage, Kevin|Lapage%%, Mario %%Marasco, Mario|Marasco%%, %%Petit, Guillaume|Guillaume Petit%%,Sébastien %%Rodriguez Escaleira, Sébastien|Rodriguez Escaleira%%, %%Sens, Antoine|Antoine Sens%%, Kevin %%Vandenbroeck, Kevin|Vandenbroeck%%. [^83]: Pauline %%Hatzigeorgiou, Pauline|Hatzigeorgiou%%, « %%Passerelle%% : croiser les routes entre l’artiste et les élèves, l’art et la société », *Art, enseignement & médiation*, numéro 3, Bruxelles, %%Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA — ESA)|ArBA%%-EsA, p. 12. [^84]: Philosophe, professeur de français à l’école secondaire Institut %%Institut Sainte-Marie|Sainte-Marie%% et chercheur, Sébastien %%Marandon, Sébastien|Marandon%% s’intéresse aux croisements potentiels ou effectifs entre l’artiste et le pédagogue. Il participe à l’écriture de *Outside/Inside. Practices Between Art and Education* (%%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|BOZAR%% , Bruxelles, 2019) et à la publication des actes du colloque « Les places et les effets de l’artiste à l’école et sur les institutions culturelles » (*Art, enseignement & médiation*, n°4, %%Bruxelles%% / %%Paris%%, 2019). [^86]: Maïté %%Vissault, Maïté|Vissault%% remplace le prix Hors-d’œuvre, financé par %%Eeckman Art & Insurance|Eeckman%% Art & Insurance, par le prix %%Connectif, Prix|Connectif%% en 2016. Par la suite, les récipiendaires sont %%Messidor%% (Sirah %%Foighel Brutmann, Sirah|Foighel Brutmann%%, Eitan %%Efrat, Eitan|Efrat%%, Pieter %%Geenen, Pieter|Geenen%%, Meggy %%Rustamova, Meggy|Rustamova%%), Béatrice %%Delcorde, Béatrice|Delcorde%%, Chloé %%Schuiten, Chloé|Schuiten%% et Clément %%Thiry, Clément|Thiry%%, Camille %%Lancelin, Camille|Lancelin%%. [^89]: Le premier numéro de *Patch* est distribué à partir de janvier 2017. [^90]: Adrien %%Grimmeau, Adrien|Grimmeau%% est historien de l’art de formation (%%Université libre de Bruxelles (ULB)|ULB%%). Il enseigne, organise des expositions et publie des textes. Sa spécialisation porte sur divers enjeux liés à l’art public. Entre 2011 et 2015, il présente dans ce cadre les expositions *%%Bonom%%, le singe boiteux* (2014), *Being Urban. Laboratoire pour l’art dans la ville* (2015), *YO. Brussels Hip Hop Generations* (%%Palais des Beaux-Arts (BOZAR)|BOZAR%% , 2017), et publie *Dehors ! Le graffiti à Bruxelles* (CFC-Éditions, 2011). [^92]: L’%%Espace Satellite%% correspond à la partie avant du bâtiment, située à proximité de l’entrée du %%Waterloo (boulevard de)|boulevard de Waterloo%%. Elle a porté d’autres noms par le passé : Espace Éphémère (1978-1985) et la %%Galerie-Découverte%% (2000-2011). [^93]: Cette citation est extraite de l’encart promotionnel de l’événement publié sur le site web de l’ISELP. [^94]: Ludovic %%Lamant, Ludovic|Lamant%%, « Biennales, fin de partie ? », *Mediapart*, 28 mars 2020. [^95]: %%Recy-K%% est un bâtiment qui abrite diverses initiatives liées au domaine du recyclage. [^96]: %%Arese, Pierre|Pierre Arese%% écrit quatre émissions de *L’Art au poing* entre mai et juin 2020 : #1 : « Destruction in Art Symposium, 1966 », #2 : « %%Pavlenski, Piotr|Pavlenski%%, éclairage, 2017 », #3 : « Outrage au drapeau, 1989 », #4 : « Épié.e.s, 2013 ». [^97]: Six émissions suivent la rubrique de Laurent %%Courtens, Laurent|Courtens%% : \#2 : %%Baes, Rachel|Rachel Baes%%, *Le nœud* (1949) ; \#3 : Mark %%Manders, Mark|Manders%%, *Shadow Study (2)*, 2010 ; \#4 : Oriol %%Vilanova, Oriol|Vilanova%%, *Tête à tête* (2019 - en cours) ; \#5 : Edouard %%Manet, Edouard|Manet%%, *Les Bulles de savon*, 1867 ; \#6 : Emmanuel %%Van der Auwera, Emmanuel|Van der Auwera%%, *VideoSculpture XXI*, 2019 ; \#7 : Sonia %%Delaunay, Sonia|Delaunay%%, *Couverture de berceau*, 1911. Véronique %%Bouillez, Véronique|Bouillez%%, Pierre-Yves %%Desaive, Pierre-Yves|Desaive%%, %%Florence, Delphine|Delphine Florence%%, Rosanna %%Gangemi, Rosanna|Gangemi%%, Lyse %%Vancampenhoudt, Lyse|Vancampenhoudt%% et Christophe %%Veys, Christophe|Veys%% partagent leurs connaissances dans ce contexte.